La population des pays riches s’accroit par migration plutôt que par la natalité et les nouveaux arrivants s’installent dans les milieux urbains, où les possibilités d’emplois dans les services sont meilleures. La croissance de l’emploi a été supérieure dans les milieux urbains et les emplois créés sont de meilleure qualité. Cela fait augmenter la demande pour les résidences en milieu urbain.
En même temps, les accès entre les banlieues et la ville sont de plus en plus congestionnés pour ceux qui utilisent la voiture, tandis que dans plusieurs pays les transports en commun sont incapables de prendre le relais. Les coûts des carburants, du péage et des stationnements en ville rendent la voiture trop chère, ce qui pousse les gens à aller habiter en ville.
Aux États-Unis, l’incitatif fiscal à devenir propriétaire de sa résidence (i.e. une déduction fiscale pour la charge d’intérêt sur l’hypothèque) équivaut à $200 milliards par année (plus de 1% du PIB). Dans beaucoup de pays, l’achat d’une propriété est directement subventionné. Au Canada, les emprunteurs qui n’arrive pas à fournir la mise de fonds de 20% peuvent obtenir une assurance-prêt garantie par le gouvernement. Ces politiques font augmenter la demande pour les résidences.
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La socialisation du marché immobilier résidentiel américain.
L’offre est contrainte
De l’autre côté, la construction de nouvelles habitations en ville est contrainte par diverses politiques. Premièrement, il y a les « Ceintures Vertes » (aka Green Belts), des zones qui ceinturent les villes et dans lesquelles la construction est pratiquement interdite. La ceinture verte de Toronto a fortement contribué à faire augmenter les prix des propriétés dans cette ville.
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Puis, les propriétaires actuel soutiennent des règles qui nuisent au développement pour préserver certains aspects de leur quartier. Ces gens arrivent souvent à avoir beaucoup d’influence au niveau municipal et arrivent à faire bloquer des projets pour préserver une vue, un parc ou simplement éviter une augmentation de la densité.
Il y a aussi le contrôle des loyers, qui en maintenant les loyers trop bas par rapport au marché décourage l’investissement dans les édifices à appartements locatifs, ce qui accentue évidemment les pénuries de logements.
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Le zonage
Selon les experts consultés par The Economist, il existe trois types de systèmes de zonage : discrétionnaire, autocratique et règlementé.
Le premier est surtout présent dans les pays du Commonwealth, les résidents locaux ont beaucoup de poids et peuvent bloquer les projets de développement. C’est aussi ce genre de système qui prévaut dans la région de San Francisco, où la crise du logement est très grave. Les pays qui appliquent ce système ont vu les prix des résidences augmenter beaucoup plus que les autres car l’offre est plus contrainte.
Les pays plus autocratiques arrivent à augmenter l’offre de résidence de manière plus adéquate. En Russie, le nombre d’habitations construite par année a récemment atteint 1 million, alors qu’il n’y en avait que 200,000 il y a 20 ans. Même son de cloche à Singapour, où les autorités peuvent raser un quartier pour reconstruire à plus haute densité sans que les résidents puissent s’objecter. Ce système peut sembler efficace, mais donne trop de pouvoir au gouvernement, qui peut exproprier sans vergogne.
Le troisième système prévaut dans plusieurs pays Européens comme la France et l’Allemagne. Si un projet rencontre une liste de critères préétablie, il est approuvé automatiquement et ce même si les résidents locaux s’y opposent. Ce système fonctionne relativement bien. Depuis les années 1950s, l’Allemagne a construit deux fois plus de résidences que le Royaume-Uni. En Suisse, il se construit deux fois plus de maisons per capita qu’aux États-Unis. En Suisse, les taxes prélevées par les municipalités demeurent sous le contrôle de celle-ci, ce qui lui donne un incitatif à favoriser le développement, alors qu’en Angleterre, des taxes prélevées localement sont acheminées à des paliers supérieurs du gouvernement. Résultat : les prix des maisons ont moins augmenté en Suisse depuis 100 ans que dans tous les autres pays riches.
Les conséquences
Les mauvaises politiques affectant l’offre et la demande d’habitations ont des effets pervers sur l’économie et la société. Les plus évidents sont certainement les pénuries de logements et l’itinérance, que les gouvernements tentent de contrer à coup de contrôle des loyers, de logements sociaux et de subventions.
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D’autre part, lorsque les prix des résidences augmentent, les gens utilisent la plus-value de leur maison pour emprunter sous la forme de lignes de crédit adossées à l’immobilier, ce qui leur permet de consommer et investir davantage, ce qui fait mousser le PIB. Pour d’autres, le simple fait de financer 80% du prix d’une résidence dispendieuse par de la dette résulte en un niveau d’endettement très élevé. Le résultat est que l’on constate une hausse marquée de l’endettement des ménage, ce qui les place dans une situation financière précaire et favorise l’instabilité du système économique.
L’autre conséquences est une hausse des inégalités. Des économistes ont démontré que la grande majorité de la hausse des inégalités de richesse décriée par Piketty et al. est causée par les prix des résidences et des terrains et des revenus explicites et implicites qui en sont dérivés.
Puis, une hausse fulgurante des prix des habitations en milieux urbains a comme impact de diminuer la mobilité entre les villes, ce qui diminue l’efficience économique et nuit à la productivité. Les gens peuvent plus difficilement migrer vers les villes où la demande de main d’œuvre est plus forte ou dans les régions où leurs compétences sont les plus en demande.
Lorsque le coût des habitations augmentent fortement dans une ville, les travailleurs obtiennent généralement des salaires plus élevés, qui sont refilés aux consommateurs sous la forme de prix plus élevés lorsque c’est possible, faisant gonfler les prix à la consommation pour tous, ou lorsque les augmentations de prix ne sont pas possibles, ces entreprises deviennent moins concurrentielles et perdent des parts de marché aux mains d’entreprises qui produisent dans des villes moins dispendieuses ou encore dans d’autres pays. Un marché résidentiel trop échaudé a donc des effets très pernicieux sur la société et l’économie.
Les solutions
La première solution consiste à réduire les contraintes de zonages et à adopter un système qui ne permet pas l’obstruction des résidents actuels sur des bases de NIMBY (aka « not in my back yard »). En second lieu, il ne faudrait plus subventionner la propriété d’une quelconque façon, de manière à ne pas distordre le marché.
Troisièmement, les gouvernements devraient remplacer les taxes et impôts pour des taxes sur les terrains. Plusieurs économistes libéraux considèrent que les taxes sur les terrains sont les moins pires taxes, incluant Ricardo, Smith, Mill et Friedman. Contrairement à un impôt sur le revenu, une taxe sur la terre ne décourage pas le travail. Elle ne décourage pas l’investissement comme les taxes sur les profits et elle n’est pas régressive comme les taxes de vente.
Elle décourage aussi l’achat de terrains pour spéculer plutôt que pour une utilisation productive. Ces taxes permettraient de réduire les rentes économiques engendrées par les terrains et de les redistribuer à ceux qui n’ont pas eu la chance de devenir propriétaire foncier.
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Une telle taxe donnerait au gouvernement un incitatif à investir dans les infrastructures, puisque cela ferait augmenter les valeurs foncières et, par conséquents, les revenus de taxation, ainsi qu’à favoriser des règles de zonage moins restrictives pour les mêmes raisons. En quelque sorte, les investissements du gouvernement seraient auto-financés auprès de ceux qui en bénéficient le plus, plutôt que d’être dépendants des impôts sur l’ensemble de la société. Les taxes foncières levées par les municipalités incluent une taxe sur le terrain, mais elles ont comme impact de décourager l’investissement sur la propriété et le bâtiment et sont trop basses pour décourager la spéculation.
En bref, une libéralisation de l’immobilier résidentiel serait souhaitable avant que les conséquences des politiques actuelles ne deviennent désastreuses…
Quelques liens intéressants sur le sujet:
« Le troisième système prévaut dans plusieurs pays Européens comme la France et l’Allemagne » C’était peut être comme cela à la base en France mais aujourd’hui, le foncier est surreglementé dans ce pays. Sans parler des contraintes qui impose un nombre minimum de logements sociaux.
Et l’état francais a pas mal plannifié à une époque en construisant de grands immeubles HLM, cela a donné lieu aux cités. Lieu de non droit contrôlé par les délinquants et les islamistes.
Vincent Benard a publié cet excellent ouvrage disponible gratuitement ici en pdf: https://fr.scribd.com/document/80163334/Logement-crise-publique-remedes-prives-Vincent-Benard-Institut-Turgot-2007 expliquant le pourquoi des problèmes de logement en France et les solutions à la crise de logement. Il aborde le problème des logements sociaux
En France, les vieux qui sont propriétaires sont avantagés par rapport aux jeunes générations qui ont des logements bien plus chers qu’à l’époque.
Le coût du logement est l’un des plus gros problème des jeunes générations; Et tout cela à cause des politiques débiles menés par l’état francais.
Et en Suisse, la situation est loin d’être idéal: il y a des lois pour protéger les paysages qui sont draconiennes.
De manière générale, la Suisse est économiquement très libérale mais absolument pas dans le domaine du logement. En matière de logement, la Suisse est très dirigiste.
En Suisse, vous pouvez vous opposer aux constructions en tant que voisins! Si vous perdez du soleil il est possible de bloquer un projet! Les normes de construction sont totalement folles (par exemple pour la couleur vous avez souvent, selon les communes, un catalogue et vous ne pouvez prendre une autre couleur!) et affreusement lourdes – s’il y a un domaine où la Suisse est un pays étatiste c’est celui-là, dans les classements la suisse est nulle.
En Suisse vous pouvez être pénalisé si vous construisez (muuh l’environnement!) ou si vous ne construisez pas (muuh thésaurisation!)
La politique suisse en matière de logement détruit le pouvoir d’achat des classes moyennes.
Le problème du prix du logement en Suisse vient de très fortes restrictions du foncier.
Donc ce n’est pas parce que la situation est un peu moins pire qu’en Grande Bretagne ou aux USA que cela veut dire que c’est une bonne situation.
Aux états unis, des études ont montré que les métropoles où il y a le plus d’inégalités en matière de logement c’est les métropoles menant le plus une politique de gauche en matière de logement, c’est les métropoles réglementant le plus le logement. http://www.newgeography.com/content/005767-progressive-cities-home-worst-housing-inequality