Il y a présentement 182 tours à condo en construction à Toronto. C’est la ville où il y en a de plus au monde. Face à cette situation, beaucoup d’experts affirment qu’il s’agit d’une bulle et font des prédictions alarmantes à cet égard. Qu’en est-il vraiment? Voici mes explications.
Les facteurs qui favorisent l’appréciation d’une propriété immobilière sont :
– La densité de la population dans les environs.
– Les contraintes limitant les nouvelles constructions (naturelles, politiques ou infrastructurelles).
– L’amélioration des infrastructures de transport.
La croissance de la population n’est pas un facteur prépondérant, sauf si elle se produit dans des endroits où les contraintes sont élevées. Cependant, pour une raison facile à comprendre, la croissance de la population se produit généralement dans les endroits où les contraintes sont faibles.
Si on prend les principaux marchés des Etats-Unis et que l’on compare l’appréciation des prix entre 1992 et 2011 avec la densité de la population, on remarque qu’il y a une corrélation, mais qu’elle n’est pas parfaite (voir graphique ci-bas).
Les marchés qui ont connu une forte croissance de la population n’ont pas vraiment bien fait. La raison est que les contraintes y sont faibles (par exemple Las Vegas).
Les marchés qui ont le mieux fait sont ceux où les contraintes sont les plus élevées. À Boston, Portland et New York, le développement est fortement limité par les politiques de type « green belt ». À Denver, il y a une pénurie d’eau. À Washington, la hauteur maximale des édifices est limitée à un niveau très bas (20 pieds de plus que la largeur de la rue), ce qui nuit au développement de tours à condos. En revanche, Los Angeles et San Francisco n’ont pas fait aussi bien qu’elles ne l’auraient dû vu l’insuffisance de leurs infrastructures de transport.
En ce qui concerne le Canada, entre 2001 et 2010, ce pays a connu la plus forte croissance de population du G8. À Toronto seulement, il y a 100,000 nous arrivants par année. Par ailleurs, le Canada est le pays de l’OCDE avec la plus grande concentration de population. Nos 10 plus grandes villes accueillent 54% de la population et 80% de la population vit à moins de 160 kilomètres de la frontière américaine.
Les villes de Toronto, Montréal et Vancouver sont aussi denses que les villes américaines qui ont connu la plus grande appréciation de prix soit San Diego, Portland, Denver, Washington et Seattle. Et elles ont connu environ la même croissance de population aussi.
En ce qui concerne Toronto, en 2003, les politiciens ont créé la « Green Belt », une immense ceinture qui entoure la ville dans laquelle rien ne peut être construit. Il est donc nor
mal que la construction se soit tournée vers le centre-ville et comme l’endroit est déjà dense, il est normal que cette construction se fasse en hauteur : des tours à condo.

Nous avons donc observé une forte baisse des nouvelles constructions de maisons et une forte hausse de nouvelles constructions de condos (voir graphique ci-bas).
Il se construit présentement environ 35,000 nouvelles habitations à Toronto par année (si on additionne les maisons et les appartements). Comme il y a 100,000 nouveaux habitants par année, cela fait 2.8 personnes par foyer, soit un nombre plus élevés que la moyenne américaine. Il n’y a donc pas de sur-construction à Toronto.
Évidemment, on verra possiblement une correction modérée des prix immobiliers à Toronto, ne serait-ce qu’en raison de la bulle de crédit engendrée par la politique monétaire expansionniste de la Banque du Canada. D’ailleurs, la correction pourrait bien devenir une prophétie auto-réalisante car plus les médias crient au loup, plus les gens deviennent craintifs et retardent leurs décisions. Néanmoins, pour moi il ne fait aucun doute que la création de monnaie orchestrée par le gouvernement a contribué à générer ce boum, mais pas autant que les politiques de zonage du gouvernement.
En lecture complémentaire, voir ceci.

En matière d’immobilier, il est préférable de regarder l’évolution du nombre de ménages plutôt que celle de la population brute. C’est un indicateur plus pertinent. On sait que dans les pays développés le nombre de ménages a eu tendance et a encore tendance à augmenter, à population égale. D’où une hausse de la demande, que ce soit en nombre de logements qu’en superficie totale (un appartement pour 4 personnes occupe moins d’espace que 4 appartements pour une personne), même quand la population augmente pas ou peu.
Et sinon, Ed Glaeser et je-sais-plus-qui ont bien montré l’influence néfaste des politiques de zonage sur les prix.
Et je ne peux m’empêcher d’inviter le lecteur à lire les articles du spécialiste libéral et francophone du logement: Vincent Bénard: http://www.objectifliberte.fr/2003/01/objectif-libert.html
Le livre qu’il a écrit sur le sujet est même disponible gratuitement à la lecture: http://www.scribd.com/doc/80163334/Logement-crise-publique-remedes-prives-Vincent-Benard-Institut-Turgot-2007
Bonjour,
Puis-je vous demander votre avis sur ce billet : http://www.lgifinance.com/canada-le-risque-immobilier-pese-lourd-sur-leconomie/ ? Vous pouvez y répondre directement sur le blog.
Je trouve votre article très intéressant. Toutefois, je reste convaincu que la politique du logement et les facilités d’accès au crédit pratiquées par la CMHC ont favorisé la surévaluation de l’immobilier au Canada et surtout, font peser un risque important sur l’économie du pays.
Je profite par ailleurs pour vous féliciter pour votre blog que je viens de découvrir.
Au plaisir
@Critiswiss
Merci de vous intéresser à mon blogue.
Je suis largement en accord avec votre article.
Je confirme haut et fort que la politique monétaire expansionniste de la BdC et l’intervention étatique de la SCHL ont contribué à gonfler les valeurs immobilières au Canada à des niveaux qui pourraient être difficiles à soutenir.
Ceci étant dit, le présent article visait plutôt à comprendre pourquoi Toronto a davantage bénéficié de cette manne.
Ainsi, on pourrait conclure en disant que oui le marché Canadien de l’immobilier est fortement évalué, mais la performance relative de Toronto est en bonne partie justifiée.