Tout d’abord, les banques à charte ne créent pas d’argent à partie de rien. Seules les banques centrales ont ce privilège. Les banques à charte ont besoin des dépôts pour créer de l’argent. Voici comment une banque à charte crée de la monnaie à partir des dépôts (en supposant que les banques visent un ratio de réserve de 10%):
1) Sébastien dépose $100 dans son compte à la CIBC.
2) La CIBC garde $10 en réserve et prête à David $90.
3) David utilise l’argent pour acheter un lecteur Blu-Ray chez FutureShop.
4) À la fin de sa journée, le marchand dépose ses recettes à la Banque de Montréal, incluant le $90 de David.
5) Le lendemain, la Banque de Montréal conserve $9 en réserve du $90 de David déposé dans le compte de FutureShop et prête le reste, soit $81, à Martin.
6) Martin utilise l’argent pour payer sa saison de hockey. La ligue n’a pas besoin de l’argent pour le moment, elle le dépose donc dans son compte à la Banque TD.
7) La banque TD conserve $8.10 en réserve et prête le reste, soit $72.90, à quelqu’un d’autre, et ainsi de suite.
Argent initial = $100
Argent total dans le système après les transactions ci-haut = $100 + $90 + $81 + $72.90 = $343.90
Total de l’argent créé par le système = $243.90
Cet argent n’est pas apparu de nulle part. Si Sebastien n’avait pas déposé son argent, David n’aurait pas pu l’emprunter (c’est-à-dire que la CIBC n’aurait pas inventé $90 à partir de rien). Les banques ont besoin de dépôts pour créer de l’argent. Comme cet exemple utilise un ratio de réserve de 10%, cela signifie que si on poursuit, l’argent total qui pourrait être créé sera d’environ $1,000 ($100 * 1 / 10%).
Un ratio de réserve inférieur à 100% permet la création de monnaie ; c’est ce qu’on appelle un système bancaire à réserves fractionnaires. Vous comprendrez donc que si le ratio de réserves était de 100%, en exigeant que les banques conservent des réserves égales aux dépôts à vue, aucun argent n’aurait pu être créé dans notre exemple.
Contrairement aux banques à charte, les banques centrales peuvent créer de l’argent à partir de rien. Par exemple, la Banque du Canada n’a qu’à se faire un « chèque » de $100 à elle-même et l’utiliser pour acheter des titres obligataires du gouvernement ou autres. Quand la banque centrale achète de la CIBC une obligation de $100 émise par le Gouvernement du Canada, elle le fait avec de la monnaie crée ex nihilo. La CIBC se retrouve alors avec une réserve de $100 qu’elle peut utiliser pour faire des prêts.
On peut aussi visualiser le processus en observant le bilan d’une banque. Du côté des actifs on retrouve les réserves ainsi que les prêts, alors que les passifs sont essentiellement constitués des dépôts et du capital. N’oubliez pas que le côté gauche doit toujours être égal au côté droit.
Première étape, la banque reçoit un dépôt de $100. Voici l’impact au bilan:
Deuxième étape, la banque fait un prêt avec l’argent de ce dépôt. En supposant qu’elle vise un ratio de réserves de 10%, elle fera donc un prêt de $90. Il y aura trois étapes dans le processus.
Tout d’abord, le prêt est émis:
Ensuite, il le montant est déposé dans le compte de l’emprunteur. Notez qu’à ce moment-ci, on observe déjà que de l’argent a été créé:
Par la suite, l’emprunteur dépense l’argent:
Finalement, voici le résultat net: pour $100 de dépots, la banque a $90 de prêts et $10 de réserves. L’argent nouvellement créé n’est pas disparu; il aboutira simplement dans d’autres banques sous la forme de dépôts. Ces autres banques feront la même choses avec ces cépôts et, pour un ratio de réserves de 10%, un total de $1,000 de nouvel argent sera créé à partir du dépôt initial de $100!
Lorsque l’emprunteur remboursera son prêt de $90, ce dernier disparaîtra et l’argent retournera en réserves. Les intérêts s’ajouterons quant à eux à l’encaisse et au capital de la banque. Elle pourra utiliser ces profits pour payer des dividendes, investir dans son réseau de succursales ou encore supporter l’expansion de son bilan (faire plus de prêts).
S’il y a moins de nouveaux prêts octroyés que de prêts remboursés, les réserves grossissent plus vite que les prêts et l’argent créé disparait. Si ce phénomène se produit sur l’ensemble du système bancaire, on parle alors de « désendettement » et de « pression déflationniste ».Pour une même quantité de biens, s’il y a moins de monnaie, les prix baissent. C’est pourquoi les banques centrales ont inondé l’économie de liquidités en 2008 pour tenter de contrer ce phénomène. Entre août 2008 et août 2009, la masse monétaire des États-Unis (M1) a augmenté de 18.5%, et ça s’est poursuivit par la suite.
Autrement dit, pour maintenir l’inflation, il faut que les montants des nouveaux prêts soient supérieure aux montants des prêts remboursés. La logique derrière ces actions est que si on réussit à créer de l’inflation, les volumes de ventes et les prix vont augmenter. Cette stimulation artificielle de la demande va faire en sorte que les entreprises verront leurs profits augmenter et pourraient investir dans leur capacité de production et embaucher de nouveaux employés. Ces nouveaux employés vont dépenser et aider à faire repartir la machine de la croissance économique (voir ceci).
Le corollaire de cette vision est qu’il faille inciter les gens à emprunter en maintenant les taux d’intérêts le plus bas possible. C’est ce qui est fait à l’aide de la politique monétaire de la banque centrale, qui consiste à injecter des liquidités dans le système en créant de la monnaie ex nihilo et en l’utilisant pour acheter des titres obligataires auprès des banques, ce qui fait augmenter les réserves des banques (et donc leur capacité à faire des prêts et créer de la monnaie) et baisser les taux d’intérêt.
Le résultat ultime de ces opérations est une augmentation continuelle de l’endettement, ce qui fut observé dans les pays du G7 depuis la création de leurs banques centrales respectives. Comme l’endettement consiste ni plus ni moins en un déplacement de consommation du futur vers le présent, il est inévitable qu’un jour ou l’autre, il faudra réduire sa consommation pour rembourser les dettes, ce qui causera une récession. C’est à ce moment que les banques centrales interviennent de façon à éviter le désendettement et redémarrer le crédit. Il y a cependant une limite à l’endettement qu’une économie peut supporter. Cette limite fut possiblement atteinte au Japon il y a 20 ans et aux États-Unis en 2007.
Si la croissance par endettement est définitivement terminée, les seules autres avenues de croissance sont par la démographie et par l’amélioration de la productivité. Pour ce qui est de la démographie, il est difficile de l’influencer. En ce qui a trait à la productivité, c’est l’investissement et l’innovation qui permettront de l’améliorer, choses qui sont présentement bien peu encouragées par l’interventionnisme étatique.
Un système à réserves fractionnaires est aussi sujet aux crises financières. La banque illustrée ci-haut se retrouve au final avec $100 de dépôts et seulement $10 de réserves. S’il fallait que Sébastien décide tout à coup de retirer ses $100, la banque deviendrait insolvable. Quand beaucoup de déposants se mettent à retirer leurs dépôts en même temps, obligeant la banque à fermer ses portes avant que ses réserves ne soit à sec, on dit qu’il y a une « ruée sur la banque (ou « bank run »). C’est ce qui est arrivé à Northern Rock au Royaume-Uni en 2008 ainsi qu’à bon nombre de banques au cours des derniers siècles. La banque centrale agit alors comme prêteur de dernier recours et vole au secours de la banque fautive. C’est d’ailleurs en partie dans ce but que la Federal Reserve fut créée en 1913.
Cependant, il arrive souvent que cette situation se produise lorsque la banque est en faillite, c’est-à-dire lorsqu’elle n’a plus de capital. Quand les emprunteurs font défaut sur leurs prêts, la banque subit des pertes qui viennent réduire son capital. Lorsque ces pertes sont immenses et systématiques, comme ce fut le cas suite à la débâcle immobilière américaine en 2008, il est possible que le capital des banques s’évaporent. Le ratio minimum selon les règles de Bâle 3 est de 3%, ce qui est bien maigre lorsque les prix des maisons s’effondrent de 35% ! À ce moment, la banque centrale ne peut pas faire grand chose pour sauver les banques. Il faut alors compter sur le gouvernement, qui doit investir en prenant des participations financières dans les banques pour les aider à rebâtir leur capital. C’est ce que la plupart le gouvernement américain a fait en 2008 avec son TARP. Est-ce que cela était nécessaire ? Je ne crois pas (voir ceci et ceci).
Les articles antérieurs qui ont inspiré ce billet sont :
https://minarchiste.wordpress.com/2009/09/10/comment-les-banques-creent-de-largent/
https://minarchiste.wordpress.com/2009/09/20/comment-les-banques-creent-de-largent-partie-2/
Confusion entre « masse monétaire » et « liquidité en circulation »…
Pourquoi ?
Les banques ne prêtent pas les dépôts, elles émettent des reconnaissances de dettes. Partant de là cet article est un contresens intégral.
@Jean-Philippe
…et votre source est?
…et en quoi cela change les conclusions de l’article?
Les banques ont besoin de liquidités (les dépôts) pour financer les prêts qu’elles émettent.
Un dépôt peut être considéré comme une reconnaissance de dette (IOU) dans une certaine mesure, mais ça ne change rien au raisonnement énoncés dans l’article.
« et votre source est? » >> Un siècle de macroéconomie depuis les chartalistes dès 1895, puis Wicksell, Schumpeter, Fisher, etc. Cela peut vous paraître contre-intuitif, mais le mécanisme que vous détaillez en début d’article (comment les dépôts créeraient des prêts) est tout simplement faux. En un mot, le « multiplicateur » que vous décrivez n’existe pas, c’est un non-sens économique, et c’est assez simple de comprendre pourquoi: ce sont les crédits qui créent les dépôts, et la monnaie est endogène (et non pas exogène). Je vous fournis des explications simples ci-dessous bien évidemment:
http://www.winterspeak.com/2009/09/loans-create-deposits-how-banks.html
http://www.forbes.com/sites/johntamny/2012/07/29/ron-paul-fractional-reserve-banking-and-the-money-multiplier-myth/
http://monetaryrealism.com/loans-create-deposits-in-context/
« en quoi cela change les conclusions de l’article? » >> Les conclusions de l’article sont ni plus ni moins qu’une reformulation de l’ABCT, concept faux s’il en est, inconsistant avec toutes les mesures empiriques, et rejeté par quasiment tout le monde depuis 70 ans pour des raisons évidentes. Je ne pense pas avoir à m’attarder là dessus, la littérature qui prouvent l’invalidité de ce modèle est pléthorique (Caplan en est une bonne introduction, sinon ce papier se suffit à lui même: http://fernandonogueiracosta.files.wordpress.com/2011/08/cullen-roche-mmt-understanding-the-modern-monetary-system.pdf).
« Les banques ont besoin de liquidités (les dépôts) pour financer les prêts qu’elles émettent. » >> Oui, mais pour compenser leurs bilans, pour les raisons que évoquées plus haut. Et attention il faut bien différencier dépôts et réserves.
« Un dépôt peut être considéré comme une reconnaissance de dette (IOU) dans une certaine mesure, mais ça ne change rien au raisonnement énoncés dans l’article. » >> Le raisonnement énoncé dans l’article reste erroné, ça ne change pas, je vous l’accorde.
Vous évoquez ensuite les banques centrales qui « injectent des liquidités dans le système en créant de la monnaie ex nihilo », c’est là encore plus complexe que ça (il existe une grosse différence entre « créer de la monnaie ex-nihilo » et « opérer des asset swaps »), c’est aussi une incompréhension de l’action des banques centrales, je vous laisse lire ceci à ce sujet: http://pragcap.com/stop-with-the-money-printing-madness
Même, plus simplement, je cite la FED elle-même: “Changes in reserves are unrelated to changes in lending, and open market operations do not have a direct impact on lending. We conclude that the textbook treatment of money in the transmission mechanism can be rejected.” (http://www.federalreserve.gov/pubs/feds/2010/201041/201041pap.pdf)
Entendons nous bien, je ne fais cette remarque que parce que je vois ce contresens régulièrement, et il est toujours dommageable de laisser perdurer des incompréhensions. Cette erreur est aisée et donc fréquente, je ne vous jette absolument pas la pierre ! Je partage évidemment votre combat pour la liberté, et je pense simplement que ce combat sera d’autant plus concluant qu’il est basé sur une compréhension fine de l’économie et non pas sur des concepts erronés qui font passer les libéraux pour des gens pas suffisamment sérieux voire dogmatiques.
Bien à vous.
@ Jean-Philippe
J’ai lu un de vos liens (je lierai les autres plus tard). Celui que j’ai lu (sur forbes.com) ne contredit pas du tout le fonctionnement du système à réserves fractionnaires décrit par Minarchiste, mais simplement la conclusion des rothbardiens selon laquelle il ne devrait pas y avoir de réserves fractionnaires. Ce avec quoi je suis d’accord, contrairement à Minarchiste. Je suis personnellement plutôt partisan du free banking, dans lequel il n’y a pas ni monopole monétaire, ni banque centrale, ni taux de réserves minimal.
J’ai lu (en partie, je ne l’ai pas encore fini) l’excellent livre de George Selgin, « La Théorie de la Banque Libre », que je conseille à tout le monde!
Ces articles sont forcément approximatifs puisqu’ils servent à vulgariser des recherches plus poussées que l’on a tout simplement pas le temps de lire. Il rappelle juste au milieu de la première page que le « money multiplier » est effectivement un mythe, et c’est à peu près tout ce qu’il faut en retenir. L’argument Rothbardien comme quoi les réserves fractionnaires seraient une fraude ne tient également pas puisqu’il oublie que le dépot en banque vous fait perdre par contrat le titre de propriété sur votre dépôt, et que cette transaction est apparue spontanément sur les marchés.
J’aime bien le free banking sur le papier, mais vu qu’il ne sera très probablement jamais mis en place, je préfère me concentrer sur des problématiques plus concrètes et ancrées dans la réalité actuelle du système, qui comprends des banques centrales et qui n’est pas prêt de changer sur ce point.
Jean-Philippe :
« Il rappelle juste au milieu de la première page que le « money multiplier » est effectivement un mythe, et c’est à peu près tout ce qu’il faut en retenir. »
Hmm… dans le texte référencé, il est écrit : « In truth, just as there are no sellers without buyers, there are no borrowers without savers; thus rendering the very notion of a money multiplier moot. »
C’est donc ça la critique du multiplicateur ? Effectivement, comme l’ABCT le démontre, du crédit artificiel n’est et ne peut pas être accompagné par une épargne équivalente, car cela aurait signifié que les dépenses en investissements productifs auraient connu une expansion, et les dépenses en consommation entre temps une contraction. Le fait que le crédit artificiel convient à booster les dépenses en investissements sans réduire les dépenses en consommation est un fait suffisant pour désigner l’erreur. Pour bien comprendre, ceci est tout à fait différent du modèle de Selgin et White, qui estiment que le crédit supplémentaire dans un marché libre est dépendant du désir d’épargne, soit sous forme d’une hausse d’encaisses monétaires ou une chute dans la fréquence et/ou montant des dépenses, les deux facteurs étant généralement corrélés. Ce qu’il se passe, donc, c’est que les banques augmentent le montant de crédit quand elles découvrent que le montant de leur passif, par opposition aux actifs, augmentent du fait que les individus dépensent moins vite, et donc la monnaie circulent moins vite, conséquemment. Les banques vont accroitre le crédit quand elles verront le flux de retour des billets diminuer, suite à une vitesse de circulation de monnaie amoindrie. Selon Selgin, cela aurait le même impact qu’une épargne réelle, vu que l’effet est celui d’une baisse des dépenses de consommation subséquente à une hausse de la demande de monnaie (i.e., épargne). Dans le système réglementé actuel, ce n’est plus la banque qui « répond » en fonction de la vitesse de retour des billets dans les compensations interbancaires, suite aux fluctuations dans la demande de monnaie par les porteurs de billets. Autrement dit, dans un système parfaitement libre, il y aurait autant de sellers que de buyers. Dans le système présent, il y a plus de sellers. C’est l’endettement assuré. Non vraiment, c’est un mauvais article. Même pour de la simple vulgarisation.
« J’aime bien le free banking sur le papier, mais vu qu’il ne sera très probablement jamais mis en place »
Par le passé, il a déjà été mis en place. Avec succès, d’ailleurs.
Sur le Free Banking, celui-ci est le bon lien.
A propos de ceci, « banque qui « répond » en fonction de la vitesse de retour des billets dans les compensations interbancaires », je voulais dire que les banques agissent comme des institutions d’intermédiation. Voici, selon Selgin, comment cela se passe quand il y a une institution bancaire ayant le monopole d’émission monétaire + privilège du cours légal :
Comme je le disais, il y a un cruel ‘mismatch’ entre porteurs de billets et institutions bancaires, en ce qui concerne l’offre et la demande. J’en parle ici.
@ M.H.
Je ne pense pas qu’il s’agisse d’une critique du multiplicateur, plutot un rappel du fait que ce mécanisme n’existe pas, comme l’a reconnu la FED. Technicalité, soit, mais tout de même.
« Par le passé, il a déjà été mis en place. Avec succès, d’ailleurs. » >> Je suis d’accord, et c’est un modèle que je pense séduisant. Reste que je ne le vois pas mis en place dans un futur proche, pour des raisons principalement politiques (plus que pratiques, bien que concrètement je vois pas comment organiser une telle transition non plus, j’avoue ne pas y avoir réfléchi suffisamment) donc je préfère m’intéresser à comprendre le système actuel.
« Jean-Philippe, le chartalisme auquel vous avez prêté allégeance, c’est le MMT, n’est-ce pas ? » >> Oui. « Prêter allégeance » est un terme trop fort. Je pense que ce modèle est à l’heure actuelle le plus crédible pour décrire les choses, oui, ça ne m’empêche pas de garder un point de vue critique et de ne pas être toujours d’accord avec les prescriptions qui en découlent.
« Avez-vous lu cet article de Bob Murphy, à tout hasard ?
http://mises.org/daily/5260/The-UpsideDown-World-of-MMT » >> Oui, bien sur. Murphy admet lui-même que c’est une réaction à chaud, après peu de réflexion sur le sujet, et les réfutations n’ont pas tardé (http://www.nakedcapitalism.com/2011/05/on-the-upside-down-world-of-mmt.html). Plus tard, il a échangé avec Warren Mosler sur le sujet, et plus en profondeur: http://www.modernmoneynetwork.org/mmt-vs-austrian-school.html
« Les dettes du gouvernement sont équivalentes, interchangeables à la dette émise par le privé. Cela ne saurait être vrai que seulement si les dépenses du gouvernement étaient aussi utiles du point de vue du marché et du consommateur que celui du privé. » >> En tant qu’actif financier (i.e. la confiance que l’argent reviendra en temps voulu) elles le sont (et même mieux: on est certain que l’Etat peut rembourser, pas pour un acteur privé). C’est la seule chose qui compte pour l’investisseur. La nature des dépenses est une bonne question, mais ce n’est pas celle qui est posée ici. Cela dit, il y a des exemples de dépenses publiques rentables, mais même sans ça, ce qui compte dans l’équation comptable, c’est que la contribution monétaire nette du secteur publique soit suffisante pour compenser les besoins du secteur privé. Autrement dit, si vraiment la « nature » des dépenses vous embête, dites vous qu’il est possible de faire faire ces dépenses au secteur privé et ainsi éliminer le problème (mais, encore une fois, ce n’est pas la question ici).
« Sûr, vous êtes un enfant terrible. » >> Le sarcasme n’est pas un argument, ni ne vous rend plus crédible.
« manipulations par exemple de la banque centrale, et donc utilisé comme proxy pour le taux d’intérêt naturel » >> Je prendrai le temps d’étudier vos sources (merci au passage), mais votre description dévoile la mariée: il n’y a pas de « taux d’intérêt naturel » dans un système à taux de change flottants avec une monnaie monopolistique (enfin, techniquement si, et ce taux est précisément zéro: http://www.epicoalition.org/docs/Forstater_Mosler_article.pdf). Si j’emprunte 1$ pour investir dans le système actuel il n’y a pas quelqu’un qui se retrouve avec 1$ de moins quelque part dans l’économie, et c’est pourtant le postulat (aujourd’hui faux) que semble admettre l’ABCT. En fait, l’ABCT postule a priori que le taux d’intérêt révèle une certaine quantité d’épargne disponible, et que les entrepreneurs décident en fonction de cette donnée: c’est plausible dans un monde étalon-or / 100% réserves, mais complètement faux dans le monde réel. Les taux d’intérêts ne signalent pas l’épargne, puisqu’ils sont décidés par la politique monétaire, et les entrepreneurs le savent très bien, c’est d’ailleurs le système qui prévaut depuis des générations. Donc qu’une incitation gouvernementale crée de l’argent facile et gonfle certaines classes d’actif est un processus observable (et c’est un phénomène qui ne vient pas que des taux, attention !), mais croire que ce qu’il se passe en réalité ce sont des entrepreneurs trompés par des « faux » taux d’intérêts est risible: tout le monde sait que les taux d’intérêts ne signalent pas une quelconque quantité d’épargne ou d’argent disponible (d’ailleurs, puisqu’on peut techniquement imprimer autant d’argent qu’on veut, la « quantité d’épargne disponible » est un concept vide de sens). Toute construction sur cette base me semble donc erronée, et des résultats concluants plus une coïncidence qu’une preuve. Autrement dit la comparaison entre taux long et un soit-disant « taux naturel » présuppose un cadre de raisonnement qui n’existe plus depuis longtemps et qui n’existera très probablement plus, à savoir un taux de change fixe et donc une concurrence de marché pour de l’épargne et donc l’existence d’un « taux naturel » révélant la « rareté » de la ressource. Comprendre que ce cadre là n’existe pas ne rend pas forcément la théorie intrinsèquement fausse (je la pense d’ailleurs cohérente d’un point de vue interne), mais juste impertinente aujourd’hui. Je ne jette pas la pierre aux autrichiens sur ce point, leur théorie a été construite dans un environnement similaire, qui n’est juste plus réel aujourd’hui.
« (…) L’empirisme ne sert pas à confirmer ou invalider une théorie, mais à lui donner un certain appui. Par exemple, Bob Murphy ne dira pas que les tests empiriques « valident » l’ABCT, mais il a dit qu’ils étaient simplement « cohérents » avec elle. » >> C’est un point important, et je suis tout à fait d’accord. L’économétrie approxime énormément de choses, et est toujours à prendre avec des pincettes (comme toute mathématisation de sciences sociales et autre phénomènes non déterministes: on ne peut au mieux qu’utiliser des approx locales). Ca ne veut pas dire qu’on ne puisse pas comprendre ce qu’il se passe et proposer des modèles mathématiques qui sont valides entre certaines bornes.
Enfin, juste un point un peu plus théorique, il me semble que la division de fond entre autrichiens et (entre autres) keynésiens réside dans la croyance et non-croyance en l’auto-régulation des marchés. Je pense que la question est plus complexe: un marché libre peut s’auto-réguler, ça me semble acquis, mais écarter catégoriquement la possibilité d’une déstabilisation endogène (et donc embrasser l’idée que sans banques centrales ni réserves fractionnaires ni dépense publique il n’y aurait pas de cycles éco) me semble juste ridicule aux vues des découvertes du siècle derniers dans des domaines aussi variés que la psychologie des foules, sociologie des organisations, théorie mimétique, équilibre de nash, etc, etc. La question politique ici est plutôt « n’aurait-on pas un meilleur système si la quantité de monnaie était fixe et où les taux d’intérêt signalent réellement une quantité d’épargne disponible ? » (et c’est une bonne question !). Pour plein de raisons, je répond: ce n’est pas évident,.
Mais je digresse, au fond l’ABCT, si elle peut expliquer une partie des phénomènes observés lors d’un cycle économique omet d’aborder d’autres éléments autant voire plus pertinents, ce qui la rend, au mieux, incomplète, au pire hors de propos. Le fait que les autrichiens aujourd’hui semblent se refuser à la remettre en question ne serait-ce que pour l’actualiser, l’intégrer au chartalisme ou la réécrire complètement est pour le moins surprenant, sans aller jusqu’à dire révélateurs d’autres motivations.
Et bien sur, il y a la question de la partie prescriptive de la théorie: « ne rien faire » au beau milieu d’une crise de liquidité c’est précisément « a recipe for disaster », les grecs l’auront assez compris. Non seulement c’est injuste (pourquoi est ce que tout le monde devrait souffrir pour les fautes de quelques uns ?) mais c’est surtout inutile (i.e. on peut rendre les choses plus faciles, donc on doit le faire). Sur ce point là l’AE semble encore plus éloignée de la réalité que sur sa partie descriptive.
Au final, je trouve que cette position « dure » sur l’ABCT ne sert absolument pas la crédibilité du mouvement libéral, et c’est bien ce qui m’attriste.
Bien à vous.
Jean-Philippe, le chartalisme auquel vous avez prêté allégeance, c’est le MMT, n’est-ce pas ? Avez-vous lu cet article de Bob Murphy, à tout hasard ?
http://mises.org/daily/5260/The-UpsideDown-World-of-MMT
Vous citez Cullen Roche, c’est très bien. Ce passage m’a fait sursauter :
3) If the government runs a budget deficit (taxes less than it spends) then Paul buys a bond from the government and the government gives Paul’s bank deposit (which he used to buy the bond with) to Peter. Paul gets a bond which the government created in much the same way that a private corporation creates a bond when they issue corporate debt. If you want to say these entities “print” financial assets then fine. Corporations print stocks and bonds every day and you don’t hear the world exploding with hyperinflation rants because of it….
Mais entre nous, c’est exactement le même argument ressassé par les adeptes et autres gourous du MMT. Les dettes du gouvernement sont équivalentes, interchangeables à la dette émise par le privé. Cela ne saurait être vrai que seulement si les dépenses du gouvernement étaient aussi utiles du point de vue du marché et du consommateur que celui du privé. Mais ce n’est pas le cas. Le déficit initial du gouvernement conduira à un déficit accru.
« l’ABCT, concept faux s’il en est, inconsistant avec toutes les mesures empiriques »
Sûr, vous êtes un enfant terrible. Vous n’avez même pas pris la peine de vous renseigner. Je sais pas, cherchez un peu. C’est pas compliqué. Pas plus tard que l’année dernière, j’en avais recensé plus d’une dizaine d’études économétriques. J’ai bien apprécié par exemple, « Austrian business cycle theory: Empirical evidence » de Bismans et Mougeot, (PDF, ou la version (française aussi). Ils ont trouvé que deux variables ont provoqué une économie en surchauffe; le 1er (Spread) étant l’écart grandissant entre taux (d’intérêts) courts et longs car il a été considéré que les taux longs sont beaucoup moins sensibles aux manipulations par exemple de la banque centrale, et donc utilisé comme proxy pour le taux d’intérêt naturel, tandis que le taux court terme est le taux bancaire actuel. L’autre variable (Dep) étant le ratio dépense de consommation / dépense d’investissement. L’ABCT prédit que la hausse de ce ratio provoque le boom économique. Les tests t indiquent en conclusion que ces deux variables sont hautement significatifs, et différents de zéro.
C’est cohérent avec l’ABCT car elle stipule que la sur-expansion du crédit empêche la réallocation des ressources productives des stades de production inférieures (ex, entreprise et commerce de détail) vers les stades de production supérieures (ex, l’exploitation minière et autres industries de fabrication des biens et outils d’équipements et diverses machines), subséquente à une baisse du taux d’intérêt via une hausse d’épargne. Dans le cas d’une baisse du taux via les crédits expansionnistes, il n’y a pas de baisse de préférence temporelle, donc pas plus d’épargne réelle, ce qui veut dire que les dépenses en consommation ne diminue pas relativement par rapport aux dépenses en investissements productifs, et un sorte de goulot d’étranglement se met en place, entre les particuliers qui empruntent aujourd’hui en prévoyant de rembourser demain et les entreprises qui empruntent aujourd’hui en prévoyant une hausse de demandes de production demain, la coordination est ainsi complètement brisée et la crise à venir une question de temps. D’où la hausse du ratio provoquant la surchauffe. Concernant maintenant le spread des taux courts versus long, cela s’explique par le fait que le taux naturel est celui qui aurait prévalu sans crédits artificiels, ou plutôt, que le taux d’intéret bancaire était purement fonction du désir d’épargne et/ou consommation, càd sans interférance du style « cours légal ». Dans le cas contraire, le taux d’intérêt bancaire diminue, s’écarte du taux naturel, tombant généralement en dessous de celui-ci.
Je recommande, ensuite, de lire l’article ci-dessous, notamment les derniers paragraphes, extrêmement importants, sur l’ABCT :
Pourquoi y a-t-il des cycles économiques et des récessions? – Partie 3
Pour une bonne intro à l’ABCT, voir Huerta de Soto, Money, Bank Credit, and Economic Cycles, ou Hayek, Prix et Production (PDF français, merci l’Institut Coppet), ou The Pure Theory of Capital. Entre nous, sinon, il me semble futile d’argumenter sur le terrain empirique, plutôt que théorique. Pas seulement les autrichiens, mais mêmes certains néo-keynésiens que j’ai pu croiser sur divers blogs pensent cela. L’une des raisons est que toutes les variables importantes ne sont pas nécessairement « capturées » dans les tests économétriques. L’empirisme ne sert pas à confirmer ou invalider une théorie, mais à lui donner un certain appui. Par exemple, Bob Murphy ne dira pas que les tests empiriques « valident » l’ABCT, mais il a dit qu’ils étaient simplement « cohérents » avec elle. De toute façon, si vous tentez de l’attaquer sur le terrain empirique, vous allez perdre, alors autant examiner l’ABCT juste théoriquement. Vous aurez plus de chances.
Mateo : il y a deux ans, j’avais écrit une série d’articles sur le livre de Selgin, The Theory of Free Banking. Ci-dessous, la partie 5. (c’est divisé en 11 parties)
George A. Selgin, The Theory of Free Banking: Money Supply under Competitive Note Issue [1988] (5/11)
Merci beaucoup pour ce long article sur la création monétaire par les banques. On apprend beaucoup de choses sur la création monétaire.
@Jean-Philippe
Disons que vos « sources » sont assez discutables.
L’article de Forbes est risible. L’auteur ne connaît rien au système bancaire. Il ne fait même pas la distinction entre dépôts à vue et dépôts à terme.
Pour lui, sans réserves fractionnaires, il n’y aurait plus d’intermédiation financière et les banques ne feraient pas de profits.
Ce n’est pas ce que l’histoire monétaire démontre, au contraire.
« ce sont les crédits qui créent les dépôts,”
Tout à fait d’accord, mais ça ne change rien au principe! Le crédit de l’un devient le dépôt de l’autre, qui devient ensuite le crédit de l’autre…
« Et attention il faut bien différencier dépôts et réserves. »
Je ne dis pas la contraire. Mais la majorité des réserves sont des dépôts ou du « wholesale funding ».
Le papier de la Fed est le plus intéressant, mais n’est pas du tout en désaccord avec l’exemple sur-simplifié que j’ai utilisé dans l’article. Il ne fait que démontrer que le ratio de réserve, aussi bas soit-il, n’a pas été une contrainte à l’expansion du crédit dans l’histoire américaine récente. Il ne signifie aucunement que les réserves sont inutiles!
Voici les précisions que j’apporterais pour vous éclairer :
– En effet, les réserves n’ont pas été une contrainte à l’expansion du crédit aux États-Unis depuis longtemps, et surtout depuis la crise. En fait, au Canada, il n’y a même pas de minimum de réserves (mais il y en aura bientôt un en vertu des règles de Bâle 3).
– J’ai souvent expliqué pourquoi il en est ainsi sur ce blogue : la Fed a injecté beaucoup de réserves dans le système bancaire et la demande de crédit a été déprimée par la récession. Les réserves excédentaires des banques ont donc explosé.
– Même avant la crise, les banques maintenaient généralement des réserves excédentaires; donc une réduction des réserves par les transactions « open market » de la Fed ne pouvaient effectivement pas affecter les activités de prêt (je suis donc d’accord avec le papier).
– Par ailleurs, avec l’expansion du financement wholesale, des marchés repos, et de la titrisation, les banques peuvent générer des réserves au besoin, jusqu’à un certain point. En fait, dans mon exemple simplifié, les banques ne gardent pas 10% de réserves par contrainte règlementaire, mais bien par prudence et gestion de risque de liquidité et de refinancement. C’est un chiffre que j’ai choisi arbitrairement pour faire un chiffre rond, en réalité le ratio est beaucoup plus bas.
– Ainsi, les deux contraintes « effectives » à l’expansion du crédit sont dorénavant les ratios de capital et la demande de prêts.
– Cela ne signifie pas que les réserves n’ont pas d’importance : aucune banque ne pourrait faire de prêts si elle n’avait pas de réserves.
– Et cela ne signifie pas que les dépôts n’ont pas d’importance non plus : les banques qui ne se financent pas par les dépôts doivent se financer wholesale ou par titrisation. Dans les deux cas, la contrepartie se financera in fine par des dépôts d’une façon ou d’une autre!
– Autrement dit, le système bancaire ne crée pas de monnaie (ou ne fait pas de prêts) à partir de rien, il le fait à partir de dépôts.
« l’ABCT, concept faux s’il en est, inconsistant avec toutes les mesures empiriques, et rejeté par quasiment tout le monde depuis 70 ans pour des raisons évidentes.”
Il vous faudra élaborer là-dessus, car je ne suis pas au courant de l’existence d’une critique viable de l’ABCT.
J’ai lu Caplan et l’ai réfuté, comme les autres, il y a déjà un bout de temps, voir ceci :
https://minarchiste.wordpress.com/2010/03/19/les-critiques-de-la-theorie-autrichienne-des-cycles-economiques/
Bien peu de gens comprennent vraiment ce qu’est l’ABCT et ses implications.
En fait, à la lecture de votre commentaire, je constate que certaines de vos lectures vous ont mené vers une tangente erronée. Il vous faudra des lectures plus sérieuses pour mieux comprendre l’aspect historique et l’impact économique.
Pourquoi ne pas commencer par De Soto? Il couvre à la fois l’histoire du système bancaire/monétaire ainsi qu’une explication des plus détaillées de l’ABCT.
https://minarchiste.wordpress.com/2011/05/09/recommandation-de-lecture-money-bank-credit-and-economic-cycles-jesus-huerta-de-soto/
Comme je l’expliquais plus haut, ces sources se servent qu’à vulgariser des points de recherche pour ne pas avoir à lire 50 pages à chaque fois, il y a donc forcément des simplifications et des passages un peu rapides.
Nous sommes d’accord sur le fait que ce que prête la banque elle l’emprunte ailleurs, et qu’une même unité de monnaie se trouvant à deux endroits à la fois (un IOU pour le déposant, un autre pour l’emprunteur) entraîne une augmentation de la masse monétaire. Ca n’en rend pas le mécanisme du multiplicateur moins fictif. Ce que je fait remarquer, c’est que la vision néoclassique de la monnaie (monnaie exogène déterminée par l’action de la banque centrale via le taux d’intérêt et le multiplicateur) est complètement et indéniablement fausse. Ce qui est un résultat bien normal puisque la monnaie est endogène, comme l’avaient bien montré Fisher et Minsky.
Cela dit, ce qu’il faut aussi comprendre sur le sujet, c’est que l’endogénéité de la monnaie, c’est à dire le fait que la monnaie provient de l’intérieur du système monétaire à travers le système du crédit et des réserves fractionnaires, est apparue spontanément et librement des marchés, même à l’époque de l’étalon or. Je cite « Triffin (1985: 152) estimates that in 1800 bank money or credit money probably constituted less than 33% of the money supply. But by 1913 paper currency and bank deposits accounted for 90% of overall currency circulation in the world, and actual gold itself for not much more than 10%. Thus growth rates in the 19th century were only sustained by a massive expansion of credit money, and what economic growth that did occur was not achieved under the type of “pure” gold standard that existed in previous centuries. »
Autrement dit, l’expansion de la masse monétaire pour répondre à l’expansion de l’économie réelle via la flexibilité du crédit est une innovation entrepreneuriale qui est venu répondre à une demande exprimée des marchés pour de la liquidité. L’argument rothbardien sur l’immoralité d’une telle pratique en apparait donc d’autant plus incohérent, voire risible: le dépot à vue est clairement un moins bon deal que le dépot à terme, en vertu de quoi le marché a massivement favorisé ce dernier. Au final, un système fiat apparait spontanément sur un marché libre tout simplement parce que c’est un système bien plus flexible et qui permet la croissance en n’empêchant pas l’expansion de la masse monétaire quand et où elle est nécessaire, c’est objectivement un meilleur système que celui où la masse monétaire serait artificiellement limitée (soit par une commodité soit par la loi), qui lui sera incapable de gérer un épisode déflationniste.
« je ne suis pas au courant de l’existence d’une critique viable de l’ABCT » >> Vous m’étonnez. Ayant été moi-même un autrichien féroce, il ne m’a pas fallu longtemps pour découvrir ses failles et lire des modèles un peu plus réalistes. Sans aller bien loin, il suffit d’aller sur Wikipedia pour avoir un corpus de papiers qui en montrent les failles (ce qui aussi explique pourquoi la très grosse majorité des économistes s’en sont écartés aujourd’hui). http://en.wikipedia.org/wiki/Austrian_business_cycle_theory#Empirical_research
Simplement, l’ABCT est une construction purement théorique, qui s’appuie sur des postulats erronés ou invérifiables (3 exemples: a/l’idée que l’Etat et sa dette fonctionne comme celle d’une entité privée et qu’on peut donc comparer les 2, ce qui est faux; b/ l’idée qu’un marché déflationniste adapte rapidement ses prix à la baisse: c’est parfaitement contradictoire avec tout ce qui a été observé dans le monde réel; et c/ l’ignorance totale de la théorie mimétique de rené Girard dans l’étude des comportements individuels, pourtant validée empiriquement et participant à l’exubérance irrationnelle), et qui au final n’explique qu’en partie – au mieux, peut-être pas du tout – les raisons et le déroulement d’un cycle économique.
J’ai survolé votre réponse à Caplan, a priori je n’y ai vu aucune réfutation puisque vous ne faites que répéter les mêmes analyses Miséennes que l’on a déjà entendu partout et qui passent à côtés de bien des choses. Le mécanisme mis en évidence (théoriquement) par l’ABCT, qu’un money supply excessif peut créer des misallocations de capital, est plausible, et a peut-être participé et / ou complété la création de boom&bust cycle, mais en faire l’alpha et l’oméga du cycle économique, en oubliant tous les autres phénomènes qui entrent en compte est juste risible: au mieux, c’est une théorie incomplète et partielle qui peut expliquer une partie des cycles éco, et c’est tout. En réalité, ses incohérences internes ont été débattues pendant longtemps, et le consensus intellectuel a débouché sur le fait que cette théorie n’étaient pas un modèle valable pour étudier le réel. Aujourd’hui l’ABCT relève plus tot de l’exercice intellectuel en disant « si on avait un système comme ceci alors les choses se passeraient comme cela », soit, c’est peut-être joli sur papier mais ça ne nous concerne pas car dans le monde réel le cycle de crédit et les banques centrales vont pas disparaitre. Cela dit j’essaierai de prendre le temps de formuler une réponse plus construite directement sur l’article. J’ai été aussi très séduit par la simplicité de ses principes, au début, et puis j’ai été forcé d’en voir les limites.
S’y accrocher à une époque où tout le monde a vu ces mêmes limites (ce ne sont pas les illuminatis qui empêchent les économistes de réaliser ses qualités, ils ne sont pas débiles, c’est juste qu’elle ne décrit pas correctement la réalité, let’s move on and build something better) me semble relever bien plus de l’agenda politique que de la pensée scientifique.
Enfin, concernant De Soto, j’ai encore son papier sur mon PC datant de ma période autrichienne, c’est vous dire. C’est en effet un résumé de la pensée autrichienne, avec toutes les qualités, les défauts, les bonnes idées et les erreurs que cela contient. Ma position là dessus est claire: (entre autres) 1/ l’étalon or et toute autre forme de restriction artificielle du money supply couplé à une fixation des taux de change est une ânerie encore plus dangereuse que stupide (e.g. l’Euro en Grèce); 2/ l’opposition morale aux réserves fractionnaires ne tient pas la route; 3/ l’ABCT est inconsistante avec les résultats empiriques, ses postulats négligent l’endogénéité de la monnaie aussi bien que l’absence de contraintes sur le financement de l’Etat et est de toute façon un modèle théorique peu fiable comparé par exemple à certaines recherches plus récentes; 4/ La pensée autrichienne me semble pousser l’idée que tout forme d’inflation est intrinsèquement mauvaise, ce qui est faux puisque la croissance et l’innovation créent de l’inflation, et que la croissance est précisément ce que veulent les individus. Idem pour les dépenses publiques qui distordent l’économie: c’est précisément le but !
Bref, je ne nie pas les grandes avancées sur le sujet qui ont été permises par l’école autrichienne, je dis juste qu’il est risible de considérer son corpus théoriquement comme un modèle intégral qui permet d’expliquer le fonctionnement de l’économie partout et sans faille: ce n’est pas le cas.
Sur ce point je rejoins donc Friedman quand il dit « There is no Austrian economics – only good economics, and bad economics. Austrians do some good economics, but most good economics is not Austrian. »
Cordialement,
JP
@Jean-Philippe
« Cela dit, ce qu’il faut aussi comprendre sur le sujet, c’est que l’endogénéité de la monnaie, c’est à dire le fait que la monnaie provient de l’intérieur du système monétaire à travers le système du crédit et des réserves fractionnaires, est apparue spontanément et librement des marchés, même à l’époque de l’étalon or. »
Je ne suis pas d’accord.
De Soto explique en détails de quelle manière le système bancaire à réserves fractionnaire et la banque centrale n’ont pas émergé naturellement sur le libre-marché, mais ont bel et bien été imposés par l’État par force de loi.
Est-ce que les réserves fractionnaires permettent de créer davantage de richesse (et non pas seulement de la croissance de PIB)? Oui, mais si on y soustrait la destruction de capital qui survient lors de la récession en raison des mauvais investissements, le résultat net est négatif.
» il ne m’a pas fallu longtemps pour découvrir ses failles et lire des modèles un peu plus réalistes. »
Et bien quels sont spécifiquement les arguments qui vous ont convaincu?
« l’étalon or et toute autre forme de restriction artificielle du money supply couplé à une fixation des taux de change est une ânerie encore plus dangereuse que stupide (e.g. l’Euro en Grèce) »
Il y a des différences cruciales entre l’étalon-or et l’Euro!
« l’opposition morale aux réserves fractionnaires ne tient pas la route »
Ceci est un point sur lequel nous ne serons jamais d’accord.
« l’ABCT est inconsistante avec les résultats empiriques »
À ce sujet, j’aimerais bien qu’on me donne enfin des exemples valables.
« La pensée autrichienne me semble pousser l’idée que tout forme d’inflation est intrinsèquement mauvaise »
Non, de l’inflation pourrait résulter d’un raccourcissement des préférences temporelles de la population ou encore de la découverte d’un immense gisement d’or (sous étalon-or).
« la croissance et l’innovation créent de l’inflation »
Non! L’innovation améliore la productivité et fait baisser les coûts de production, ce qui est déflationniste.
Et l’accélération de la production de biens et services, avec une masse monétaire constante, fait baisser le prix des biens et services.
« Je ne suis pas d’accord. De Soto explique en détails de quelle manière le système bancaire à réserves fractionnaire et la banque centrale n’ont pas émergé naturellement sur le libre-marché, mais ont bel et bien été imposés par l’État par force de loi. » >> Je relirai ce passage alors, mais la description que vous m’en faite me semble en contradiction flagrante avec tout ce qu’il s’est passé depuis le 16ème siècle (et notamment le fait que les banquiers se sont spontanément mis à émettre plus de reconnaissances de dettes que d’or en réserves, ce qui a alimenté la croissance).
« Est-ce que les réserves fractionnaires permettent de créer davantage de richesse (et non pas seulement de la croissance de PIB)? » >> Indéniablement.
« Oui, mais si on y soustrait la destruction de capital qui survient lors de la récession en raison des mauvais investissements, le résultat net est négatif. » >> N’importe quoi. Le 20ème siècle a vu une croissance phénoménale en termes réels, crises incluses, avec des réserves fractionnelles tout le long.
« Et bien quels sont spécifiquement les arguments qui vous ont convaincu? » >> Pas assez de temps ni de place pour tout décrire, mais de manière courte: le fait qu’aucune évolution de la théorie n’a été conduite pour tenir compte des caractéristiques du monde réel, la théorie mimétique de Girard, Minsky, Fisher, Friedman, et plus théoriquement et en un mot: le néo-chartalisme: http://hir.harvard.edu/debt-deficits-and-modern-monetary-theory
« Il y a des différences cruciales entre l’étalon-or et l’Euro! » >> Soit, mais les deux bloquent de manière artificielle un des 2 prix les plus fondamentaux de l’économie, le taux de change, ce qui empêche la fluctuation de la valeur d’une monnaie conjointement à sa productivité. Charle Gave s’est largement exprimé sur le sujet et a rapporté les principales raisons pour laquelle un tel type de monnaie est complètement catastrophique. Aussi, cf http://nationalinterest.org/article/critique-pure-gold-5741?page=show (et de toute façon, l’étalon or ne reviendra pas donc je ne vois pas l’intérêt de rabacher tout le temps combien c’est une mauvaise idée)
« Ceci est un point sur lequel nous ne serons jamais d’accord. » >> Il n’y a pas à être d’accord, l’argument d’immoralité apporté par Rothbard est factuellement incohérent, preuve: http://socialdemocracy21stcentury.blogspot.fr/2010/06/fractional-reserve-banking-evil.html (après si vous avez d’autres arguments à apporter, faites vous plaisir, mais les rothbardiens ne sont pas recevables). Au mieux, vous pouvez dire que si vous aviez le choix vous ne mettriez pas vos sous dans une telle banque, mais plutôt sous le matelas (ce que vous pouvez toujours faire d’ailleurs); il reste évident que la plupart des gens, moi y compris, acceptons parfaitement la rémunérations de nos comptes grâces au système de réserves fractionnaires.
« À ce sujet, j’aimerais bien qu’on me donne enfin des exemples valables. » >> Qu’on soit d’accord ou pas avec eux, Friedman puis Krugman ont assez disserté sur le sujet. Un autre exemple plus hétérodoxe: http://johnquiggin.com/2009/05/03/austrian-business-cycle-theory/
« Non, de l’inflation pourrait résulter d’un raccourcissement des préférences temporelles de la population ou encore de la découverte d’un immense gisement d’or (sous étalon-or). » >> Le premier cas est purement théorique, le deuxième est un argument contre l’étalon-or puisque les périodes de forte croissance au 19ème ont surtout coincidé avec les ruées vers l’or, c’est à dire une augmentation conséquente du money supply (en plus de l’extension du crédit, le chartalisme a ici encore raison empiriquement), et que la « planche à billet » sous un tel système est constitué de mines d’or cela ne fait que donner un raison de plus à l’Etat pour les nationaliser, bref toujours aussi risible. Ce petit exemple montre bien l’absurdité d’un tel système: http://pegobry.tumblr.com/post/25012885537/de-limportance-de-la-politique-monetaire-ou-pourquoi
« Non! L’innovation améliore la productivité et fait baisser les coûts de production, ce qui est déflationniste. » >> De manière sectorielle seulement, ce qui est un cas complètement à part de la déflation monétaire qui elle est générale. Ce qui compte, c’est que la monnaie étant composée essentiellement de dettes fixes en nominal, toute déflation provoque une chute de la demande globale, avec les effets récessionistes que l’on connait (crise de l’euro dans les pays du sud).
« Et l’accélération de la production de biens et services, avec une masse monétaire constante, fait baisser le prix des biens et services. » >> Théoriquement, oui, mais encore une fois je ne m’intéresse qu’au monde réel, avec ses défauts et ses gouvernements. Mais la croissance, en termes réels, est parfaitement compatible avec de l’inflation, et s’en trouve même favorisée (cf l’exemple plus haut) à travers la rigidité des prix. Après, la réalité du système monétaire actuel est celle de la monnaie fiat avec banques centrales et réserves fractionnaires, je ne vois pas l’intérêt de perdre du temps dans des masturbations intellectuelles sur des modèles théoriques impossibles à tester en conditions réelles. C’est aussi pour ça que Scott Sumner ou Warren Mosler, par exemple, sont crédibles aujourd’hui et pas Robert Murphy: les premiers étudient le réel, le second réfléchit sur des modèles complètement théoriques.
Je me permets de rajouter cette ressource qui m’avait pas mal éclairé à l’époque: http://rationalitelimitee.wordpress.com/2008/10/25/une-modeste-critique-de-la-theorie-autrichienne-du-cycle/
Je vous cite mon exemple personnel qui illustre assez bien comment une banque fonctionne. Je suis retraité de l’Etat français et ma pension est transférée chaque mois sur mon compte à la Deutsche Bank à Tenerife (îles Canaries) où je réside. Je n’ai pas de dettes (pas de crédits, pas de logement à rembourser, etc) et ma banque sait exactement combien d’euros je dépense chaque mois, elle dispose de programmes informatiques de statistiques sur tous ses clients. De plus, comme je suis locataire, ma banque s’est portée sur ma demande, garant ou caution ou aval, je ne sais pas comment on dit au Québec, bref pour cette garantie j’a bloqué 2500 euros sur un compte séparé. La Deutsche Bank sait que je ne suis pas un bon client puisque je n’ai pas contracté de prêts auprès d’elle mais elle sait aussi que j’ai toujours quelques milliers d’euros sur mon compte qu’elle utilise comme elle l’entend et d’ailleurs ça m’est égal puisque le jour où je déciderai de retirer tous les euros de mon compte Deutsche Bank n’aura qu’à me rayer de ses statistiques. vous comprenez aisément pourquoi je n’ai pas ouvert de compte dans une banque espagnole car DB est une institution fiable. Multipliez mon cas par quelques dizaines de millions de clients et vous comprendrez que DB ne vit qu’avec les dépôts de ses clients et les intérêts que les Etats lui versent pour les prêts consentis à ces derniers afin de financer leur dette. Le reste, c’est de la pure spéculation.
Jean-Philippe :
« la théorie mimétique de Girard »
C’est le genre d’erreurs communes quand on ne parvient pas à considérer l’offre de dépôt pour les bases de crédit. Dans une économie libre, les individus n’ont pas de poches infinies, pas même les banques. Que se passe-t-il quand les banques décuplent les crédits ? Assèchement des fonds, et donc hausse des taux d’intérêts, qui va immédiatement réfréner les demandes de crédits. Aussi, comme je l’ai dit plus haut, en temps normal, une hausse de crédit pour financer l’investissement doit conduire à un boom relatif dans les stades productifs supérieurs, et un déclin relatif dans les stades inférieurs. Il n’y a aucune exubérance irrationnelle dans ce modèle. Dans le cas présent, sous l’absence de hausse d’épargne, les stades supérieurs connaissent une expansion alors que les stades inférieurs ne contractent pas. Dans l’ensemble, il y a un gonflement d’optimisme car les marchés financiers voient que dans l’ensemble, les valeurs augmentent, alors que rien ne se contracte. Il y a exubérance car la consommation ne diminue pas, voir augmente, de même que l’investissement. Dans un système bancaire libre, les investissements productifs décuplent en même temps que la consommation diminue. Pas d’exubérance.
« Soit, mais les deux bloquent de manière artificielle un des 2 prix les plus fondamentaux de l’économie, le taux de change, ce qui empêche la fluctuation de la valeur d’une monnaie conjointement à sa productivité. »
Le problème de l’euro, Philippe Baggus s’en est chargé le mieux. Recommandation de lecture: « The Tragedy of the Euro », par Philipp Bagus.. Concernant l’étalon-or, le problème que vous ne voyez pas est l’intervention de l’Etat.
« De manière sectorielle seulement, ce qui est un cas complètement à part de la déflation monétaire qui elle est générale. »
C’est un peu comme si vous dites que la productivité accrue d’un secteur économique n’a pas d’effet de spillover. Je ne vois pas comment on peut ne pas considérer cela comme une faute de débutant. Quelle que soit la cause des baisses de prix, par la contraction monétaire ou l’amélioration productive, les prix tombent, mais à des rythmes différents. La meilleure référence en ce qui concerne la déflation, selon moi, est définitivement « Less than Zero: The Case for a Falling Price Level in a Growing Economy », voir en particulier le chapitre 3, DEBTORS AND CREDITORS.
« la monnaie étant composée essentiellement de dettes fixes en nominal, toute déflation provoque une chute de la demande globale »
La demande globale, c’est du keynésianisme si ma mémoire est bonne ? Le hic avec la macro, c’est qu’elle ne voit pas les subtilités et les détails sur lesquels la micro-économie insistent tellement, comme les déformations et changements relatives dans les structures de l’économie. Voilà pourquoi ils échouent à comprendre comment éviter et sortir des crises. La relance monétaire et/ou budgétaire ratera sa cible pour des raisons évidentes. La chute de la « demande globale » n’est pas infinie, et Rothbard dans MES ou America’s Great Depression, disait que lorsque l’on tente d’empêcher ou ralentir la baisse des salaires et prix, les entrepreneurs ont tendance à prolonger leurs attentes spéculatives. C’est pourquoi il pense que l’on doivent plutot accélérer cette baisse des prix, pour convenir au plus vite à leurs attentes spéculatives, et ainsi l’enrayer au plus vite. Dans tous les cas, les « spéculations à la baisse » stopperont visiblement quand les dettes seront allégées. Vous ne ferez qu’alourdir les dettes avec vos fiscal stimulus.
« C’est aussi pour ça que Scott Sumner ou Warren Mosler, par exemple, sont crédibles aujourd’hui et pas Robert Murphy: les premiers étudient le réel, le second réfléchit sur des modèles complètement théoriques. »
Comme je l’avais dit, les données ne sont pas des preuves. Les données doivent être interprétées, et correctement. Je n’ai pas besoin de citer Human Action de Mises pour que vous compreniez. Trop se focaliser sur les chiffres pour négliger le reste est dangereux. Imaginez juste qu’entre un laps de temps donné, vous constatez une hausse des crimes subséquente à une hausse de la population carcérale. Qu’allez vous en conclure ? Que la hausse de la pop. carcérale cause la hausse des crimes, qu’il faut donc baisser le 1er pour réduire le 2nd ? Pour que vous comprenez bien, lisez ceci :
http://mises.org/daily/5158/Mises-on-Mind-and-Method
La même chose est vraie concernant les travaux économétriques censés prouver la validité du keynésianisme (plus exactement, relance budgétaire). Si la théorie est erronée, que pouvons-nous en conclure des travaux empiriques même s’ils valident le keynésianisme ? Simplement que ces données et chiffres manquent cruellement de pouvoir explicatif. Rejeter tout fond théorie, c’est un déni de la réalité. En ce sens, ce sont les autrichiens qui étudient le réel, et vous la fiction.
« Je me permets de rajouter cette ressource qui m’avait pas mal éclairé à l’époque »
C’est un article très moyen. Le Minarchiste avait répondu ici. Et même, ces critiques (Caplan, Cowen, Krugman), c’est le genre qui a été ressassé 1000 fois, et détruit 1000 fois par les autrichiens. Entre les théories ridicules du style prophétie auto-réalisatrice, Hangover, ou le fait que l’ABCT postulerait soit-disant une économie parfaites, difficile à prendre au sérieux. Entre nous, je ne crois pas que vous ayez une connaissance aiguisée de l’économie autrichienne, juste superficielle. Je me méfie toujours de ceux qui citent des liens Wiki au lieu des ouvrages et leurs passages/pages clés. Ce que j’insinue, c’est que sur la plupart des blogs U.S. que je visite temps à autre, le niveau est bcp plus élevé que les modestes critiques de l’ABCT que vous proposez. Vous n’avez même pas touché un mot concernant la critique boîteuse de Sraffa, encore moins celle de la controverse de Cambridge, selon moi la plus terrible. Un blogueur argentin s’est chargé de dézinguer Sraffa, mieux que je l’avais fait à l’époque. Les liens, à consommer absolument, et sans modération, surtout :
Sraffallacies: A Misesian Defense of ABCT (I)
Sraffallacies: A Misesian Defense of ABCT (II)
Ceux qui connaissent réellement bien l’ABCT doivent en avoir entendu parler, puisque ça en parle de partout. Enfin, concernant le Cambridge Controvery, je m’en suis chargé. Mais concernant les critiques de l’ABCT, en général, de Soto est celui qui a touché le plus de sujet. C’est pourquoi il est nécessaire de lire les chap. 6 et 7.
« que l’ABCT postulerait soit-disant une économie parfaites »
Je voulais écrire : « économie en constante équilibre ». Le fameux ERE (evenly rotating economy) de Mises. Certains, comme Lord Keynes, dont vous citiez le blog, sont même allés jusqu’à dire, je crois, que l’ABCT postulait une économie sans chômage, selon les propres termes du blogueur Lord Keynes, une économie « without idle resources ». C’est vous dire…
猛虎
Merci de votre réponse.
« Dans une économie libre, les individus n’ont pas de poches infinies, pas même les banques. Que se passe-t-il quand les banques décuplent les crédits ? Assèchement des fonds, et donc hausse des taux d’intérêts, qui va immédiatement réfréner les demandes de crédits. » >> c’est précisément cette conception erronée du système monétaire qui ne tient pas. 3 objections:
a/ Dans une « économie libre » (à supposer que l’on soit d’accord déjà sur ce terme), les banques sont libres de contractualiser avec leurs clients pour accorder ou non des prêts grâce à leurs dépôts, et émettre des reconnaissance de dettes en conséquence: la masse monétaire y est tout sauf fixe, et l’émission de crédit ne vient que répondre à la demande du marché pour des liquidité selon un processus somme toute classique. Les prêts créant les dépôts, on n’assèche aucune ressource en émettant du crédit, on ne fait que fournir de la liquidité là où on en a besoin. Simplement, dans une économie libre un euro prêté ne prive pas un autre agent économique de ce même euro.
b/ Nous ne vivons pas dans une « économie libre », depuis longtemps et pour encore longtemps. Nous vivons dans une économie avec d’énormes interventions étatiques, des banques centrales aux actions difficilement prévisibles, et surtout pas de free banking. Si je vous accorde que réfléchir à un monde théorique débarrassé de certaines de ces contraintes est un exercice utile et passionnant, il n’en reste pas moins que je préfère – et qu’il est opportun – de réfléchir dans le cadre réel dans lequel nous vivons, et dans lequel bien des mécanismes de marchés fonctionnent différemment. Le fait que la dépense publique ne soit pas contrainte par les recettes publiques ou que le déficit public correspond au surplus privé ont des implications très profondes dans la compréhension du cycle économique, et pourtant je ne vois pas d’autrichiens en parler.
c/Les taux d’intérêts ne signalent pas une quantité d’épargne disponible, et les agents économiques le savent très bien (et ne basent donc pas leur calcul sur cette donnée). De plus dans notre cas, comme l’ont détaillé Mosler et Forstater ici: http://www.epicoalition.org/docs/Forstater_Mosler_article.pdf , le taux « naturel » d’intérêt est précisément zéro, et le taux effectif est unique à chaque emprunt, mêlant les préférences de liquidité des agents, la perception du risque, etc.
Ce dernier point m’amène à votre réponse à Sraffa, je n’ai pas abordé cet aspect de la question car il ne s’est pas présenté, et qui concerne en effet la version « Hayek » de l’ABCT et pas celle de Mises. L’autrichien Murphy en a d’ailleurs parlé dans sa thèse en 2003, et a récemment ramené son école à la raison sur le a question des taux d’intérêt: http://consultingbyrpm.com/blog/2011/07/is-keynes-from-heaven-or-hell.html
« La demande globale, c’est du keynésianisme si ma mémoire est bonne ? » >> Non, c’est une mesure comptable, rien de plus. Le keynésianisme construit des recommandations de politique économique à partir de constats sur l’évolution de la demande globale notamment durant des crises de liquidité, mais c’est une couche d’opinion au dessus d’une simple donnée quantifiable. (et de plus, je n’ai jamais affirmé être keynésien, puisque je ne le suis pas).
« La chute de la « demande globale » n’est pas infinie, » >> 97% de la monnaie en circulation dans l’économie réelle est en réalité composée de créances de banques commerciales. A supposer que les gens continue de payer leurs traites, diminuant la masse monétaire d’autant, vous comprenez à quel point elle peut baisser. En pratique, une baisse ne serait-ce que modérée suffit à amener à la situation grecque, et très probablement des extrémistes au pouvoir.
« lorsque l’on tente d’empêcher ou ralentir la baisse des salaires et prix, les entrepreneurs ont tendance à prolonger leurs attentes spéculatives. » >> Il n’y a pas baisse de salaire et des prix, il y a licenciement et faillites. Dans tous les cas il y a une très forte et très durable (plusieurs années) rigidité à la baisse des prix, et la pression à la baisse des prix se traduit par la destruction des chaines de valeur et non leur simple réajustement.
« C’est un peu comme si vous dites que la productivité accrue d’un secteur économique n’a pas d’effet de spillover. (…) » >> Il me semble que vous confondez toujours le problème en termes réels et en termes monétaires. Une augmentation de productivité n’a pas d’incidence sur le montant des dettes en cours. La chute du prix du Go de stockage ne réduit pas la quantité de monnaie en circulation. Une récession, c’est précisément quand vous avez X euros de dettes en nominal, et 0.5X euros en circulation: quoi que vous fassiez ça va mal finir. Le manque de liquidité est ici une question entièrement politique et non économique.
« Trop se focaliser sur les chiffres pour négliger le reste est dangereux. » >> Mais nous sommes d’accord ! Théoriquement aussi, les principes autrichiens sont discutables. Je prendrai simplement l’idée répandue que la dépense publique présenterait un « effet d’éviction » de la dépense privée dans une trappe à liquidité: c’est bien ne pas comprendre et la nature du taux d’intérêt (phénomène principalement monétaire) et la nature du crédit (un euro emprunté ne prive pas quelqu’un d’autre, ailleurs dans l’économie, de ce même euro). Et les taux d’intérêts bas actuels sont en accord avec ce modèle. Par ailleurs je suis tout à fait d’accord pour dire que dans le cas présent la dépense publique est en moyenne de moins bonne qualité que la dépense privée, et qu’il convient de favoriser la seconde bien plus que la première, mais c’est une question plus technique sur les mécanismes de transition, moins que sur la théorie sous-jacente.
Au final, je pense que vous passez à côté de ma critique, je m’excuse donc si je me suis mal exprimé sur ce sujet: l’ABCT me semble cohérente sur ses bases, mais non seulement ses bases ne sont pas pertinentes dans le système monétaire actuel, et de plus elle n’a pas vocation à expliquer l’intégralité des cycles économiques dans leurs moindres détails. Autrement dit, c’est au mieux une approche incomplète. J’en veux pour exemple les nombreux autrichiens qui voudraient coller la crise immo de 2007 sur la seule baisse des taux d’intérêts de la FED, nonobstant toutes les raisons non-monétaires inhérente à sa formation (alea moral, etc).
Vous avez raison quand vous dites que je ne connais pas l’école autrichienne dans ses moindres détails, je vois juste par exemple que dans le cas de la crise de 2008, les autrichiens se sont empressés de raconter vraiment n’importe quoi sur l’inflation, le fonctionnement des banques et de leur réserves, et le rôle de l’Etat dans l’économie (comparer le bilan de l’Etat avec le bilan d’un foyer par exemple), voire même évoquer l’hyperinflation ou mesurer la valeur des actifs en onces d’or. Ne confondons pas autrichiens et école autrichienne, bien sur, mais j’attends toujours de lire un papier autrichien pertinent sur ce cas précis. Cet article de Cullen Roche résume bien la chose: http://pragcap.com/way-way-off-base
Bien à vous
Je réponds au commentaire d’en haut, de Jean-Philippe :
« donc je préfère m’intéresser à comprendre le système actuel »
C’est une phrase qui revient par moment chez mes interlocuteurs. Mais comprenez que c’est une erreur. Car pour (mieux) comprendre le système actuel, il faut aussi étudier les modèles alternatifs, et les comparer. Par exemple, en psychologie (en particulier sur le QI), il est courant que je lise des études utilisant des méthodes à modèles d’équation structurelle et autre machins complexes, mais c’est une étape nécessaire, à savoir quel modèle est le mieux adapté aux données, les modèles à voie unique versus voie commune (i.e., qui pose l’existence d’un facteur médiateur) – en anglais, les termes sont « independent pathway model » et « common pathway model » – etc. L’économie ne devrait pas y échapper. Par exemple, si vous n’aviez pas étudié le Free Banking « à la Selgin » je doute que vous auriez pu entrevoir nombre des multiples failles de la théorie des paniques bancaires aléatoires de Diamond et Dybvig.
« Cela dit, il y a des exemples de dépenses publiques rentables, mais même sans ça, ce qui compte dans l’équation comptable »
Justement, qu’est-ce qui vous fait croire que ce n’était pas juste par pur hasard ? Encore une fois, je le dis, et répète, mais si nous sommes d’accord sur le fait que le gouvernement est un mauvais allocateur de ressource car non aiguillée par le système de concurrence et de profits/pertes, cela me paraît difficile de conclure que le gouvernement peut être rentable, par moment. D’ailleurs, pour qui est-il rentable ? Peut-être pour le pouvoir lobbyiste ? Il y avait sur le minarchiste quelques articles à ce propos, sur la collusion entre gouvernement et les gens riches. Tappez juste les mots clés. Ceci étant dit, rappelez vous les problèmes de calcul économique dans le système socialisé.
http://herve.dequengo.free.fr/Mises/AH/AH26.htm
Mais que cela ne nous égare pas. Ce que je voulais faire passer, en citant ce passage idiot de Cullen Roche, c’est que les chartalistes raisonnent comme s’il n’y avait pas de différence que le gouvernement vous emprunte ou une compagnie privée le ferait. Dans le bouquin (assez court) de Warren Mosler, Seven Deadly Frauds of Economic Policy, c’était récurrent. Bien sûr, dans le plan comptable c’est du pareil au même, mais dans la réalité, c’est tout à fait différent. Donc, je le répète, les chartalistes sont des falsificateurs. Je trouve leur modèle parfois encore plus farfelu que le keynésianisme.
« si vraiment la « nature » des dépenses vous embête, dites vous qu’il est possible de faire faire ces dépenses au secteur privé et ainsi éliminer le problème »
En principe, lorsque le privé ne crée pas un marché, c’est qu’il n’y a pas de profits à faire ici. Ou alors, si un marché spécifique n’apparaît pas, c’est peut-être due à des réglementations qui gonflent des coûts ou subventions qui donnent l’avantage à X en désavantageant Y, ce qui explique l’absence d’apparition d’un marché Y.
« il n’y a pas de « taux d’intérêt naturel » dans un système à taux de change flottants avec une monnaie monopolistique »
De toute façon il n’existe pas de taux naturel tout court. Vous avez lu le débat Sraffa-Hayek ? J’ai fourni plusieurs liens sur « Sraffalacies ». Mais même cela n’est pas un problème pour l’ABCT. J’avais toujours dit à ceux qui voulaient l’entendre que la multiplicité des taux « naturels » est aussi normal que la multiplicité des prix pour tout produit concurrentiel sur un marché. Il n’existe pas « un » taux dans le sens taux « universel ». Les explosions de crédits déforment « les » taux. Donc je ne vois pas le problème de se référer aux documents auxquels j’ai référé. Le concept reste tenable : les taux longs sont moins influencés par la politique monétaire que les taux courts. Donc le spread des taux est un indice que les taux naturels s’écartent des taux d’équilibre.
« Si j’emprunte 1$ pour investir dans le système actuel il n’y a pas quelqu’un qui se retrouve avec 1$ de moins quelque part dans l’économie, et c’est pourtant le postulat (aujourd’hui faux) que semble admettre l’ABCT »
Non, justement, et c’est bien pour ça que j’ai clairement vu que vous ne connaissiez rien à l’ABCT, contrairement à ce que vous disiez. Dans le modèle de l’ABCT, les taux sont influencés par la préférence temporelle des agents économiques, mais il fait aussi l’hypothèse de ce qui se passe quand il y a une intervention monétaire, via banque centrale ou via cours légal. La question posée par l’ABCT, donc, concerne l’étude de la réaction des entrepreneurs et particuliers suite à des fluctuations de taux dues à la politique monétaire. Ils comparent le modèle n°1 où les taux sont déterminés uniquement par des changements dans la préférence temporelle (i.e., demande de monnaie) avec le modèle n°2 où les taux qui auraient prévalu dans le modèle n°1 sont déformés par des actions externes.
« croire que ce qu’il se passe en réalité ce sont des entrepreneurs trompés par des « faux » taux d’intérêts est risible »
Ce qui est risible, c’est de croire que les entrepreneurs savent ce qu’impliquent des baisses et hausses des taux d’intérêts dans la structure de l’économie. Ou de croire qu’ils savent comment fonctionne la création monétaire, ou ce qu’est une banque centrale. Et encore, c’est à condition qu’ils savent que l’argent est « créé » à partir de ce qu’ils déposent. La réponse est non à toutes ces questions. Oh bien sûr, on peut trouver des exceptions, mais ça confirmerait alors ce que je dis. En ce sens, oui, les entrepreneurs sont trompés par des faux taux d’intérêts. Car ils réagissent aux fluctuations du prix du crédit comme si ces fluctuations étaient dues à des changements dans la demande d’épargnes/d’encaisses de la part des individus. S’ils ne savent pas distinguer les changements « naturels » et « artificiels » des taux, ils sont nécessairement dupés.
Les particuliers eux aussi sont dupés pour la même raison. Ils n’ont jamais désiré épargné plus, mais consomment tout autant voire plus, alors que de l’autre côté, les entrepreneurs multiplient les investissements productifs « comme si » les individus avaient augmenté leurs épargnes, ce qui aurait ainsi permis la consommation future. Mais leurs épargnes n’ont pas connu une expansion, donc pas de consommation future possible pour la production supplémentaire, qui de toute façon ne sera pas complétée ni achevée, puisqu’il y a surenchérissement sur les prix des facteurs productifs, dans la mesure où les machines et travailleurs dans les stades inférieurs de la structure de production n’ont pas été « libérés » pour être employés dans les stades supérieurs voire intermédiaires. Donc, dans tous les stades de production, inférieurs, intermédiaires, supérieurs, les entrepreneurs sont obligés de payer un prix, ou coût, supplémentaire aux facteurs productifs (i.e., main d’oeuvres, outils, machines).
Mais tant que les facteurs productifs des stades inférieurs ne sont pas transférés vers les stades supérieurs, il devient extrêmement difficile d’allonger la structure de production. La seule raison pour laquelle ils s’obstinent, c’est que le crédit facile donne l’illusion que les coûts ont baissé. Dans la réalité, les coûts de production vont augmenter, mais il y a un « lag » du fait de la lenteur des hausse des coûts, faisant ainsi qu’ils ne peuvent pas rattraper l’apparente baisse des coûts due au crédit facile. Sauf si, bien sûr, l’on cesse cette folie du crédit facile, mais alors les coûts rattraperont immédiatement les profits, et les entrepreneurs réaliseront ainsi que leurs prévisions étaient erronées, et cesseront d’investir, d’où une quantité phénoménale de projets non terminés.
Et les autrichiens, pour cette raison, trouvent insensé l’idée de restaurer ces projets non finis ou réutiliser les outils et matériels pour d’autres secteurs via l’argent public, car dans ce cas, ça revient comme à dire que le gouvernement décide qualitativement des investissements à faire. Pour que ces ressources laissées à l’abandon soient le mieux exploitées, ce doit être le privé de s’en charger. car lorsque des projets nouveaux sont financés par le gouvernement, la demande que crée le gouvernement n’est que temporaire, et ces emplois seront détruits quand l’argent public cessera de couler, donc à nouveau restructuration d’un pan de l’économie. Ajoutez à cela que l’argent public investi n’ayant pas créé de richesses, la dette n’en sera qu’alourdie. Je pense que ces méthodes keynésiennes ne peuvent que prolonger la crise.
« psychologie des foules, sociologie des organisations, théorie mimétique, équilibre de nash »
J’y ai déjà répondu. Mais vous l’avez ignoré.
« n’aurait-on pas un meilleur système si la quantité de monnaie était fixe et où les taux d’intérêt signalent réellement une quantité d’épargne disponible ? »
Le 1er n’est pas nécessaire au 2nd. Quand vous dites ensuite que ce n’est pas évident, vous n’expliquez pas. Me concernant, je l’ai déjà fait, en décrivant comment les bulles se mettent à gonfler. Théoriquement, si, c’est évident que l’économie se porterait mieux si les taux d’intérêts étaient un vecteur fiable d’information. Revoir les qq paragraphes plus haut, et mes autres commentaires.
« il y a la question de la partie prescriptive de la théorie: « ne rien faire » au beau milieu d’une crise de liquidité »
Oui, c’est le même genre de caricature que j’ai vu déjà cent fois. Quand je lis « les autrichiens laissent faire » je le traduis systématiquement par « laissent les pauvres creuver ». Soyez un peu plus sérieux. Les autrichiens croient aux mécanismes du marché, efficients en situation normal comme en situation de crise.
« Sur ce point là l’AE semble encore plus éloignée de la réalité que sur sa partie descriptive. »
Je ne vois pas le rapport avec la phrase précédente.
Bonsoir, désolé de ma réponse incomplète, mais une grosse charge de travail m’éloigne temporairement de cet intéressant débat. Rapidement:
« pour (mieux) comprendre le système actuel, il faut aussi étudier les modèles alternatifs, et les comparer. » >> Je ne dis pas le contraire, reste que bien des supputations des inflation hawks sont théoriquement et empiriquement fausses.
« si nous sommes d’accord sur le fait que le gouvernement est un mauvais allocateur de ressource car non aiguillée par le système de concurrence et de profits/pertes, cela me paraît difficile de conclure que le gouvernement peut être rentable, par moment » >> Bien sur, mais il faut comprendre la rôle de la politique dans cette équation. Quand le gouvernement alloue des fonds pour assurer un train de vie minimum à des handicapés, ou une éducation ou une couverture santé à des enfants de familles non solvables, il y a fort à parier que ces dépenses se font à pertes, et qu’il y a un gros coût d’opportunité à les faire, mais c’est bien le but ! Le processus démocratique conduit à précisément choisir de distordre certains marchés en faveur de ceux qui n’y auraient pas autrement accès, et d’allouer des fonds non pas selon un principe de recherche de la rentabilité, mais selon une volonté d’assurer, immédiatement, certaines missions dans un but précis, quitte à perdre de l’argent, ou du moins ne pas en gagner. Commence ici un débat politique et non plus économique, où je pense par ailleurs que nous trouverions bien des points d’entente (je pense qu’il est préférable de trouver autant que possible des alternatives de marché aux missions étatiques, exemple: http://www.morganwarstler.com/post/44789487956/guaranteed-income-choose-your-boss-the-market-based). Ceci dit, il est vrai que l’Etat s’est abrogé des prérogatives opérationnelles bien au delà de son domaine de compétence de même de ses missions principales, ce qui m’amène à réitérer ma proposition précédente: lorsque la nécessité de réinjecter des liquidité dans le système s’impose pour compenser une chute de la dépense globale, les autrichiens veulent laisser les prix chuter (ce qui n’arrive pas et ruine tout le monde), les keynésiens font confiance à l’Etat (ce qui est une erreur), les monétaristes croient que les banques vont prêter leurs réserves (ce qui est impossible), reste les innovateurs qui ont des idées neuves, par exemple celle ci: http://www.morganwarstler.com/post/37140255525/who-gets-the-new-money
« Les explosions de crédits déforment « les » taux. » >> Toujours cette idée sous-jacente que les taux « naturels » seraient forcément plus élevés. Idée qui découlent de la conception que l’épargne précède l’investissement, ce qui est vrai dans un système d’étalon-or et 100% réserves (le background dans l’élabortation de l’ABCT), mais qui ne l’est pas aujourd’hui et dans le cas qui nous concerne, celui des marchés libre (ou pas) où l’argent est de la dette. Comme je l’ai expliqué plus haut, les seuls moyens d’intervention de l’Etat sur les taux consistent à émettre des treasuries ou à verser des intérêts sur les réserves (ce qui crée un plancher pour les taux, les faisant donc monter en moyenne). Si la politique monétaire sait refroidir une économie en surchauffe, tout le monde est à peu près d’accord pour dire qu’elle ne peut pas forcer la création de crédit dans le secteur privé, puisque c’est un phénomène purement endogène (d’où l’absurdité du « multiplicateur »). Ce qui fait s’effondrer l’économie, c’est le resserrement du crédit (ou le surplus public qui bouffe l’épargne privée), mais dire que le boom vient uniquement de la politique monétaire, c’est faux. Si le marché est libre (i.e. le taux directeur est à zéro, les banques sont libres d’évaluer le risque et l’inflation pour fixer leurs taux), il n’y a pas de raisons pour des misallocations: il y aura autant de crédit que de projets rentables qui en requièrent, dans la limite de la solvabilité des banques en concurrence. En pratiques, ce sont d’autres mécanismes (notamment réglementaires) qui vont créer des misallocations, pas principalement la politique monétaire. L’exemple de la bulle immobilière est intéressant: d’autres secteurs ne bénéficiant pas des garanties type Fannie / Freddie n’ont pas vu de misallocation malgré un taux de base identique. C’est un nexus de conditions réglementaires, d’aléas moraux, et de déresponsabilisation du système bancaire du à la taille des banques, qui les a conduites à accorder trop de crédit, et donc à des misallocations, les taux faibles du début des 2000s n’étant qu’une petite partie du schéma, nécessaire mais pas suffisante. « L’explosion du crédit » ne vient pas tant des taux bas que des conditions très particulières en vigueur dans la régulation bancaire. Alors attention, je ne dis pas que les interventions discrétionnaires de la banque centrale ne viennent pas perturber les choses, surtout pour casser une bulle, je dis juste qu’y voir l’essence intégrale du cycle économique est une erreur. D’autres facteurs entrent en jeu.
« Ce qui est risible, c’est de croire que les entrepreneurs savent ce qu’impliquent des baisses et hausses des taux d’intérêts dans la structure de l’économie. Ou de croire qu’ils savent comment fonctionne la création monétaire, ou ce qu’est une banque centrale. » >> Pas plus risible que de croire qu’ils considèrent les taux d’intérêts comme des indicateurs de l’épargne disponible. De la même manière que ce sont les prêts qui créent les dépôts, et pas l’inverse, c’est l’investissement qui crée l’épargne, et pas l’inverse. Vous le savez puisque vous avez lu Mosler.
« Dans le modèle de l’ABCT, les taux sont influencés par la préférence temporelle des agents économiques » >> Oui, ce qui oublie le fait que les taux sont avant tout des phénomène monétaires, et que la « pure time preference theory » ne tient pas. Même Murphy en est revenu.
« Mais leurs épargnes n’ont pas connu une expansion, donc pas de consommation future possible pour la production supplémentaire, » >> L’épargne est une variable que l’on peut contrôler. Vous semblez toujours raisonner comme si la quantité de monnaie était fixe ou presque, et donc l’épargne aussi. Mais ce n’est pas le cas. On peut imprimer autant d’épargne qu’on veut, dans la limite du risque inflationniste, ce qui n’est pas tellement pertinent dans la situation actuelle. La « consommation future possible » n’a pas à être limitée arbitrairement par une masse monétaire qu’on empêche de bouger politiquement, on consommera ce qu’on produira, la monnaie n’est qu’un outil qu’on adapte à nos besoins, pas l’inverse.
« Je pense que ces méthodes keynésiennes ne peuvent que prolonger la crise. » >> C’est un point qui se défend, c’est bien pour ça qu’il y a d’autres méthodes, et pas que du côté du « hard money ».
« Soyez un peu plus sérieux. Les autrichiens croient aux mécanismes du marché, efficients en situation normal comme en situation de crise. » >> Cela me fait penser à H.H. Hoppe qui écrit, je cite, « Les ajustements des prix s’opèrent immédiatement et sans délai. N’importe quel changement dans l’offre ou la demande d’un bien affecte les prix de façon instantanée (…) l’immédiateté des ajustements des prix et l’intégration praxéologique du court et du long terme ne font aucun doute » (Against Fiduciary Media, H.H. Hoppe, J.G. Hulsmann, W. Block, Quarterly Journal of Austrian Economics 1998). Je n’ai pas besoin d’expliquer en quoi c’est complètement absurde dans une trappe à liquidité et une tendance déflationniste. (d’ailleurs Selgin s’en est chargé si je ne m’abuse).
« Je ne vois pas le rapport avec la phrase précédente. » >> Le rapport est que croire que les prix vont s’ajuster à la baisse dans un système où les dettes sont fixées en nominal est complètement ridicule, ça n’arrivera jamais, et c’est bien logique. Ne rien faire, c’est agir comme si l’épargne existaient en quantité fixe et limitée et qu’il « fallait » laisser le marché s’adapter à la quantité d’épargne disponible, et non l’inverse, alors que ce n’est pas le cas dans le système monétaire actuel. Le rapport c’est aussi réaliser que laisser les prix s’effondrer, et donc les ménages faire défaut et s’appauvrir considérablement en termes réels, c’est faire payer à des innocent les erreurs d’une poignée de gens. Politiquement et moralement, ça se passera jamais, parce que c’est injuste.
Dans une spirale déflationniste, il faut rajouter de l’argent dans le système pour au moins atteindre le niveau des dettes en cours, sinon tout le système s’effondre. La grande question est bien sur de savoir par quels mécanismes doit-on injecter ces liquidités, et c’est là que réside le débat le plus important.
Merci pour tous ces liens, je tacherai de les parcourir quand j’aurai un peu de temps sous le coude !
Oh, et un résumé du débat Murphy / Mosler, bien que malheureusement il soit partisan c’est le seul que j’ai trouvé: http://hereticaldruthers.wordpress.com/2013/06/12/summary-and-critique-of-the-warren-mosler-mmt-vs-bob-murphy-austrian-debate/
Jean-Philippe :
Pour finir, votre article de Naked Capitalism en réponse à B. Murphy n’est pas de bonne qualité, n’adressant pas tous les points particuliers de Murphy. Quoi qu’il en soit, sur votre article, il est d’abord malhonnête en ce sens où il sélectionne délibérément l’histoire de Murphy sur Crusoé où il n’y a pas de transaction, alors que la partie intéressante et pertinente est celle impliquant « Sam » et « Tabitha ». Suivant, nous avons :
Then, what about her coconuts? Well, for 25 days in a row, Kate gathers her ten coconuts per day to feed her family as usual, but the family only eats eight of them. This allows her to accumulate a stockpile of 50 coconuts, which can serve as a ten-day buffer (on half-rations) should the family become sick or injured. Kate is saving. But this saving has nothing to do with GDP or national income and product accounts that are used to measure economic activity. Now if Kate took her 50 coconuts and sold them to her uncle, Sam, for $5 each, she would have $250. And if she gave Sam $230 in return for his goods and services, she would have saved $20 as measured in GDP. She would be net saving $20 and Sam would have a net deficit of $20. That’s how it works.
Que dire, à part que je cherche encore la queue et la tete. Kate a juste réussi à vendre ses produits plus chers que les prix que Sam a réussi à charger sur Kate, ce qui veut dire que Kate fait un profit de $20 dans cette affaire car la valeur des produits vendus de Sam à Kate est inférieure à celle vendue par Kate à Sam de $20. D’où vient le « net deficit » ? Pourquoi n’avoir pas supposé que Sam avait de l’épargne, ce qui lui aurait permis d’acheter aujourd’hui pour $20 plus cher que ce qu’il a vendu ce jour même. Supposez que Sam s’est permi un « déficit » de $20 parce qu’il avait une épargne préalable, tandis que Kate a épargne car elle n’en avait pas, ou moins que Sam, pour commencer ? Comment re-interprêter l’histoire, maintenant ?
Aussi, que vient faire « net saving » là dedans ? L’article élude tout à fait la pertinence du concept qu’ils nomment « net savings ». Si cela signifie l’épargne non investie dans l’économie, comme MMT l’évoque, à quoi cela peut-il référer ? Si je dis thésaurisation, personne ne me contredira, même pas vous, n’est-ce pas ? Mais c’est en ce sens justement que MMT devient ridicule. Cela nous fait revenir au vieux débat des conséquences de la thésaurisation, et alors dans ce cas MMT ne propose pas grand chose d’original. On joue simplement sur les mots. Si la thésaurisation fait baisser les prix en les rendant bon marché, il n’y a pas de raison de supposer que les gens ne vont pas se remettre à consommer. En crise, c’est différent puisque les gens consomment du fait de l’endettement et de la fragilité de bien des compagnies de société. Dans un environnement d’incertitude, on peut avoir tendance à plus épargner, ce qui est logique, mais la baisse des taux d’intérêts par ce biais n’est pas une mauvaise chose.
Passage suivant :
Now, let’s introduce some deficits and debt into the scenario. For the sake of argument, let’s say that year in, year out we produce the same amount, the same value of stuff. However, in one particular year, you produce a lot of stuff – and I want to buy it. The problem is that I produce less stuff that you want to buy. What do we do? I could issue you an I.O.U. and tell you I will pay you back sometime later. You accept the deal and now I have received the goods and services and you have received an equivalent value from the two sources, currency and the I.O.U. Again, it is a wash from an accounting perspective. I have a deficit in this particular year and you have a surplus.
Là encore, c’est oublier ce que Murphy a dit au sujet des déficits du gouvernement; nous n’en avons pas besoin pour épargner. C’est toujours valide. Aussi, dans cette histoire, l’un a juste épargné pour que l’autre consomme immédiatement. C’est un échange mutuellement bénéfique, mais c’est justement ce que les autrichiens disent.
L’autre concept farfelu non évoqué est celui de l’impôt excédentaire, comme si le gouvernement dépensait moins que ses revenus. C’est un peu là où ils veulent en venir quand ils s’appuient sur l’équation “G − T = S − I” pour dire que tout excédent budgétaire équivaut à une fuite du revenu et de l’épargne du secteur privé. Il faut comprendre que dépenser, c’est taxer. C’est en ce sens que la 1ere moitié de ce passage est ridicule :
« So when you think of government deficits as the primary way to reduce private sector debt burdens, you really should also be thinking about the malinvestment and future slow GDP investment that a misallocation of resources would create. »
Il n’a d’ailleurs fourni aucune réponse concrète à la « misallocation » des ressources. Juste des recommandations politiques sur les stabilisateurs et utiliser les tax cuts pour réguler la demande globale. Là encore, il faut déjà se demander comment un boom économique se met en place. J’ai déjà expliqué en quoi la théorie du mimétisme ou de l’exubérance ne peut pas tenir compte du phénomène de boom. Seule la monnaie est un catalyseur suffisamment puissant. Car à monnaie constante, ou du moins si la quantité de monnaie correspond au désir d’épargne (i.e., d’attente) des agents dans un modèle de Free Banking, chaque hausse de prix est compensée par une baisse, ce qui annule toute possibilité d’exubérance basée sur l’illusion d’une prospérité globale, car une contraction se produit de part et d’autres et une expansion de part et d’autres. Le fait aussi que les crédits sont limités par le désir d’épargne, qui n’est pas infiniment élastique. Seul un taux continuellement bas peut provoquer la surchauffe d’il y a quelques années aux USA.
Le débat Mosler-Murphy est trop long pour que je le visionne aujourd’hui. Un résumé aurait été préférable. Enfin, Vincent Bénard, de Objectif Liberté, avait dédié des articles sensationnels sur le sujet. C’est difficile de tous les retrouver (notamment celui sur la Grèce), mais j’ai encore en mémoire ceux là :
http://www.objectifliberte.fr/2010/05/dette-publique-piege-mortel.html
http://www.objectifliberte.fr/2004/10/le-drapage-de-n.html
http://www.objectifliberte.fr/2008/11/capital-vs-cred.html
Jon Catalan a publié un blog post en défense de l’ABCT et ses fondamentaux, en y attaquant le comme d’habitude ignorant Lord Keynes. Il a souvent de bonnes choses à dire, c’est pourquoi je le lis régulièrement (mais réponds rarement).
http://www.economicthought.net/blog/?p=4823
J’y ai laissé un commentaire avec des posts de l’économiste autrichien Juan Ramon Rallo vs Lord Keynes. Un long débat, que je n’ai pas fini de lire. Les posts de JRR sont en espagnols (ceux de LK en anglais), mais c’est une langue facile, et une transcription littérale est quasi-possible. En ce sens, google translate marche étonnamment bien.
Le seul point où j’ai le moins d’aptitude, car ayant le moins étudié, me concernant, est la catégorisation des biens de production. Me rappelant de H de Soto, ce n’était pas un problème puisque de toutes les manières, l’ABCT concerne essentiellement les discoordinations temporelles (càd, entre épargne et investissements productifs) – des étapes de productions additionnelles et types ou quantité de production qui n’auraient jamais existé sans le crédit artificiel. Sinon, Catalan en a touché un mot sur la catégorisation des biens ou moyens de production :
http://www.economicthought.net/blog/?p=4634
Jean-Philippe :
>> « Les prêts créant les dépôts, on n’assèche aucune ressource en émettant du crédit, on ne fait que fournir de la liquidité là où on en a besoin. »
C’est bien ce que je dis. Quand les taux ne baissent pas en cas de sur-expansion de crédit, le boom devient possible car les ressources (de crédit) ne sont pas asséchées. Concernant le « fournir de la liquidité là où on en a besoin », je vous renvoie à mes anciens commentaires sur le Fractional Reserve Free Banking. Il y a une nette différence entre la création monétaire dans le FRFB et le système actuel : la coordination temporelle absente dans le second système.
>> « Les taux d’intérêts ne signalent pas une quantité d’épargne disponible, et les agents économiques le savent très bien »
Désolé, mais ce sont des âneries. Les gens mis à part quelques initiés comme les lecteurs de ce blog ne savent pas ce qu’est une banque centrale, les réserves fractionnaires, les discoordinations temporelles, et encore moins l’ABCT. Ce ne sont pas des économistes. Cela me navre d’avoir à énoncer une chose aussi évidente. C’est pourquoi vous avez tort de généraliser des cas exceptionnels. Imaginez vous juste en train d’interroger les gens dans la rue.
>> « le taux « naturel » d’intérêt est précisément zéro »
Ah oui, ce document, on me l’avait déjà cité. Ce fut je crois sur le forum (désormais désactivé) de Mises Community. Une longue discussion sur MMT.
An Austrian Critique of MMT?
MMT redux
Sur le premier lien, Warren Mosler en personne est intervenu à plusieurs reprises sous le pseudo « warrenmosler ». Je l’ai jamais trouvé convaincant. Enfin, pour répondre au document, il faut dire que lorsqu’ils considèrent un taux naturel de zéro, ils énoncent clairement l’idée des interventions gouvernementales, du genre, il y a une demande de monnaie étatique en raison de la taxation. D’abord, ce n’est pas nécessairement vrai, tout dépend du privilège accordé (ou non) de monopole d’émission, ou toute autre loi. Aussi, lorsque les autrichiens, eux, évoquent le taux naturel, c’est celui qui prévaut dans une économie libre, pas comme Mosler. Sinon, il n’y a pas « un » taux naturel. Ou ce serait comme imaginer un triangle sans angle. Les auteurs ont beau insister « Note that deficits with the department’s currency are “natural” in the sense that they result from the student demand to net save units of that currency » mais ceci n’a pas de sens car la monnaie étatique est une monnaie privilégiée. Et aussi car le concept du taux naturel dans MMT diffère de celui sous-jacent à l’ABCT.
La raison pour laquelle il n’existe pas « un » mais « plusieurs » taux, c’est la même pour laquelle il y a plusieurs prix compétitifs dans l’économie. Voyez Hazlitt, dans son fameux livre (p. 278) où il fait voler Keynes en éclat :
Now in a free (non-statist, non-socialist, non-totalitarian) economy, wages do not and cannot adjust themselves en bloc, as a unit, by some neat, fixed, round, uniform percentage. Nor do prices adjust themselves en bloc, by a uniform percentage or as a unit. Nor does production adjust itself en bloc or as a unit.
>> « Non, c’est une mesure comptable, rien de plus. »
Ce que je voulais signifier par là est le problème inhérent à la macro, qui ignore les fluctuations des prix relatifs. D’où l’erreur du raisonnement en termes globales.
>> « En pratique, une baisse ne serait-ce que modérée suffit à amener à la situation grecque, et très probablement des extrémistes au pouvoir. »
Le rapport avec la Grèce, je cherche encore. Ce pays vivait à crédit sur le dos, si je puis dire, des autres pays européens. Son problème est là d’abord. Lisez les chapitres 4 (et 8, mais c’est optionnel) du livre The Tragedy of the Euro, par Philipp Bagus. PDF.
>> « Il n’y a pas baisse de salaire et des prix, il y a licenciement et faillites. »
Parce que ce n’était pas évitable. Comme j’ai dit, le boom a permis de créer des activités qui n’auraient jamais eu lieu sans crédit artificiel. Donc quand cette politique folle s’achève, il y a des projets laissés à l’abandon. Il y a faillite et licenciement. C’est obligatoire. Mais le fait qu’on empêche la baisse des salaires et prix, en revanche, est un problème pour ce qui concerne la reprise économique. En situation de crise, les entreprises cherchent à ‘couper’ dans les coûts de production. L’investissement diminue car 1) en situation de boom, l’investissement était excessif 2) le retournement économique les rend plus prudent. Du fait de 2), ils préfèrent investir dans des projets moins intensifs en capital. Donc, il est nécessaire de faciliter la réallocation de la main d’oeuvre et outils, machines, vers des activités moins intensives en capitales, càd, vers les stades inférieurs (i.e., proches de la consommation finale) de la structure productive.
C’est pourquoi la flexibilité est cruciale, et H de Soto avait insisté là-dessus. Si les salaires n’ont pas « un » taux mais « des » taux, cela signifie que le chômage est causé non du fait d’une baisse de demande « globale » mais par un déséquilibre dans les prix/salaires relatifs. Or, les mécanismes de marché oeuvrent pour ramener les prix/salaires relatifs vers leurs points d’équilibre, le plus possible. En ce sens, la macro-économie ne vous aide pas à percevoir cette idée. Par la même occasion, c’est pour cette raison à mon avis que le gouvernement est plus effectif quant il est question d’un problème purement « macro » et non « micro » car dans ce dernier cas, l’intervention étatique devient quasi-impossible à opérer correctement. Or, je pense que dans notre économie, ce qui déraille est généralement de niveau micro, et non macro.
>> « la pression à la baisse des prix se traduit par la destruction des chaines de valeur et non leur simple réajustement. »
La baisse des prix aide au réajustement pour la simple et bonne raison que c’est le crédit artificiel qui a déformé la structure productive. Si vous maintenez le stock monétaire en l’état par la création monétaire, vous continuez à désorienter la structure productive.
>> « c’est bien ne pas comprendre et la nature du taux d’intérêt (phénomène principalement monétaire) et la nature du crédit (un euro emprunté ne prive pas quelqu’un d’autre, ailleurs dans l’économie, de ce même euro) »
Je ne suis pas sûr à quoi vous faites référence par « phénomène principalement monétaire ». Mais JM Keynes disait la même chose, donc si ce à quoi je pense est exact, alors c’est faux. Le taux d’intérêt est le point de coordination entre l’offre et la demande de crédit. Hazlitt avait souvent reproché à Keynes de ne pas comprendre cela.
>> « mais non seulement ses bases ne sont pas pertinentes dans le système monétaire actuel, et de plus elle n’a pas vocation à expliquer l’intégralité des cycles économiques dans leurs moindres détails »
Concernant la 1ere moitié, il faudrait expliciter. Concernant la 2ème partie, c’est erroné. J’ai déjà expliqué les principes dans mes précédents coms (cf, le tout dernier, ici). Il n’est pas possible d’initier un boom sans crédit artificiel. Le propre des booms, c’est que tout augmente et croît en même temps, bien qu’à rythme différent.
>> « J’en veux pour exemple les nombreux autrichiens qui voudraient coller la crise immo de 2007 sur la seule baisse des taux d’intérêts de la FED »
Vous parlez comme si l’ABCT n’avait jamais envisagé les hypothèses alternatives. Bien sur que si. Mais la théorie dit que ce ne sont que des détails, et que sans le crédit, ces facteurs ne peuvent pas déclencher un boom. Peu importe les conflits d’intérets chez les agences de notations (conflits générés par la SEC, tiens donc), les asymétries informationnelles, le mimétisme, les inégalités qui soit-disant auraient encouragé les pauvres à sur-consommer via le crédit, selon Rajan je-sais-plus-quoi. Ceci est sans importance sans le crédit artificiel. Je fatigue à répéter, mais le boom est possible seulement lorsque le prix du crédit n’augmente pas, et si l’expansion de certaines industries n’est pas compensée par une contraction dans d’autres. Aucune de vos théories proposées à ma connaissance ne tient compte de cela.
Jean-Philippe :
>> « … que les taux « naturels » seraient forcément plus élevés. Idée qui découlent de la conception que l’épargne précède l’investissement, ce qui est vrai dans un système d’étalon-or et 100% réserves »
C’est aussi valide dans le système actuel. Relisez ceci sur le modèle n°1 et n°2.
>> « système d’étalon-or et 100% réserves (le background dans l’élaboration de l’ABCT) »
Pas nécessairement. Le Free Banking ne pose pas ces contraintes, et reste cohérent avec l’ABCT. Même si j’admets que les autrichiens ne sont pas tous d’accord là-dessus, moi je le suis.
>> « Pas plus risible que de croire qu’ils considèrent les taux d’intérêts comme des indicateurs de l’épargne disponible. »
Où l’ai-je affirmé ? J’ai dit, si vous avez bien lu, que les entrepreneurs ne savent pas distinguer l’épargne réel et le crédit artificiel. Mais que lorsque les taux reflètent réellement les préférences temporelles, les actions entrepreneuriales sont en correspondance, en ligne, avec la quantité d’épargne future et donc la soutenabilité des investissements productifs, même s’ils ne le savent pas instinctivement.
>> « Vous le savez puisque vous avez lu Mosler. »
Je l’ai lu, mais ça ne veut pas dire que je sois d’accord avec le fait que le crédit créerait l’épargne. C’est tout faux. Ce qui est vrai est que le prêt n’est plus seulement dépendant des épargnes réelles, et que la partie des crédits déconnectée de ces épargnes correspond à un crédit artificiel. C’est un concept simple que ceux qui prêchent le dogme du « crédit faisant les dépôts » ne peuvent pas voir. Comme les macro-économistes ne voient pas les distorsions de structure productive, car ce détail est inexistant dans leur modèle.
>> « Ce qui fait s’effondrer l’économie, c’est le resserrement du crédit (ou le surplus public qui bouffe l’épargne privée) »
Le resserrement est une condition nécessaire qui suit le boom. C’est le boom qui est la maladie, et le bust qui en est le symptôme. C’est comme une tumeur; quand vous l’avez elle n’est pas détectable de suite, car il y a un stade 1, puis 2, puis 3 et 4 (ces derniers étant généralement indicatifs de symptômes). Les investissements additionnels ne trouveront aucun débouchés car les gens n’ont pas plus d’épargnes pour permettre une hausse de la consommation future. Si vous avez le temps, lisez le chapitre 6 du bouquin de Huerta de Soto. il explique ce qu’il se passe si l’expansion du crédit persiste pour tenter d’empêcher ou de reporter l’arrivée de la crise. Pages 399-405, très exactement.
Cliquer pour accéder à desoto.pdf
>> « L’exemple de la bulle immobilière est intéressant: d’autres secteurs ne bénéficiant pas des garanties type Fannie / Freddie n’ont pas vu de misallocation malgré un taux de base identique. »
Cela est sensé être une condition suffisante pour réfuter l’ABCT ? La théorie autrichienne prédit que le crédit artificiel peut déclencher à lui seul tout un enchainement d’événements qui aggraveraient le gonflement des bulles, comme le mimétisme, tiens. Le crédit artificiel est autrement dit LE médiateur de tous ces autres facteurs participant au gonflement des bulles. Je fatigue à répéter. D’autant que vous ne fournissez aucun argument nouveau.
Et même si l’évidence empirique n’est pas une preuve définitive, elle illustre bien l’ABCT en ce sens où aucun boom historique n’a eu lieu sans expansion de crédit ou monétaire. Il y a plusieurs articles sur le Minarchiste, à ce propos. Dans L’Essentiel du Minarchiste :
https://minarchiste.wordpress.com/lessentiel/
Vous trouverez ceci :
La bulle des tulipes confirme la règle.
Les premières bulles financières.
Les bulles spéculatives – partie 1.
Les bulles spéculatives – partie 2.
Les bulles spéculatives – partie 3.
>> « … « L’explosion du crédit » ne vient pas tant des taux bas que des conditions très particulières en vigueur dans la régulation bancaire. … D’autres facteurs entrent en jeu. »
Montrez moi juste théoriquement qu’il est possible d’engendrer une bulle sans crédit artificiel, et là, je prendrais vos critiques plus au sérieux.
>> « tout le monde est à peu près d’accord pour dire qu’elle ne peut pas forcer la création de crédit dans le secteur privé, puisque c’est un phénomène purement endogène »
D’abord, vous dites que les crédits font les dépôts (qui, bien sur, serviront de base pour des crédits supplémentaires), et maintenant, que la politique monétaire ne peut pas forcer la création de crédit ? Je ne vous suis pas. Bien sûr que la banque centrale force le crédit, tout comme elle peut le restreindre. En revanche, ce qu’elle ne contrôle pas c’est la direction, l’endroit où vont les crédits.
>> « (d’ailleurs Selgin s’en est chargé si je ne m’abuse). »
Certes. Mais c’est différent du sujet abordé ici. HH Hope ne croit pas au modèle de Free Banking. C’est à cela qu’il s’attaque. Plus récemment Bagus & Howden ont fait la même critique à Selgin, qui leur a répondu dans « Mere Quibbles: Bagus and Howden’s Critique of The Theory of Free Banking ». Lien PDF, aux pages 143-144. B&H ont répondu à leur tour, mais je ne les trouve pas nécessairement convaincant. (Cherchez sur google scholar, dans les documents « cités ».)
>> « Vous semblez toujours raisonner comme si la quantité de monnaie était fixe ou presque, et donc l’épargne aussi. »
Non, et jamais je ne l’ai fait. Revoir notamment mes premiers commentaires, sur le Free Banking. Aussi, même dans un système d’étalon-or à 100% réserves, il n’est pas exclu que l’épargne puisse fluctuer.
>> « On peut imprimer autant d’épargne qu’on veut »
L’erreur consiste à ne pas comprendre que l’épargne n’est pas créée par le crédit. Revoir Hazlitt, pages 94-95. Mais surtout, les pages 226-227 : elles sont délicieuses.
Cliquer pour accéder à failureofneweconomics.pdf
Comme je l’ai dit, une épargne consiste à sauvegarder une portion de ses revenues en restreignant sa consommation présente. J’ai répété bcp de fois que dans la mesure où les épargnes ne sont pas suffisantes pour assurer la consommation future, toute expansion des investissements productifs est nécessairement vouée à l’échec. D’où par la meme occasion l’absurdité des concepts comme le « crédit faisant les dépôts » qui pourrait vaguement laisser croire que le « crédit crée (imprime) les épargnes ». Pourtant, n’est-ce pas exactement ce que prétend faussement MMT ? D’ailleurs MMT dit aussi (ou plutot, Mosler, dans son 7 Deadly Frauds, page 64) que c’est l’investissement qui crée l’épargne. En vérité c’est l’inverse. Il est impossible d’imaginer l’investissement sans épargne préalable. Il faut des réserves supplémentaires pour vous sustenter quand vous allez construire des outils pour améliorer votre pêche en poisson, car durant le temps de confection de l’outil, vous ne pêchez pas. C’est l’épargne qui rend possible l’investissement.
Si le crédit artificiel crée de l’épargne, ça voudrait dire que les individus tendraient à consommer moins dans la même proportion. Et là, on parlerait d’épargnes réelles, comme dans le modèle FB de Selgin (sinon, ce sont des épargnes fantômes). Mais même dans ce cas, on ne peut pas dire que c’est le crédit lui-même qui crée l’épargne, vu que pour Selgin, cette création monétaire « réagit » simplement à la tendance des individus à retarder/reporter leurs consommations, donc à « épargner ».
>> « La « consommation future possible » n’a pas à être limitée arbitrairement par une masse monétaire qu’on empêche de bouger politiquement, on consommera ce qu’on produira, la monnaie n’est qu’un outil qu’on adapte à nos besoins, pas l’inverse. »
C’est comme si vous disiez que le 100% réserve était incompatible avec la liberté économique, ou plutôt, qu’elle implique nécessairement l’intervention de l’Etat. Je n’en suis pas nécessairement convaincu, même si les partisans du Free Banking tendraient à y croire. Quoi qu’il en soit, Dans les deux modèles, fractionnaires ou non fractionnaires, je dirais que la monnaie n’est pas limitée arbitrairement. Contrairement à Selgin, je pense que les deux modèles sont viables, même si le Free Banking me paraît bien plus souple pour corriger les déséquilibres monétaires. Voir « 100 Percent Reserve Money: The Small Change Challenge ».
C’est d’ailleurs mal comprendre le concept et le prendre à l’envers. On n’adapte pas la monnaie aux besoins, ceci n’ayant pas de sens. Car la monnaie est un intermédiaire d’échange. La monnaie s’adapte toute seule. Avant, c’était des boeufs, ensuite, des pièces, et papiers, puis l’électronique (carte bancaire). Qu’une monnaie perd de sa valeur, elle sera alors moins utilisée (sauf cours légal). Comme pour n’importe quel produit sur un supermarché. D’où la nécessité d’abolir le monopole d’émission, et surtout, le cours légal. Car c’est ce dernier qui constitue le problème le plus grave. Voir Guido Hulsmann, The Ethics of Money Production, pp. 126, 132-133; et surtout, p.147, la plus importante.
>> « Le rapport est que croire que les prix vont s’ajuster à la baisse dans un système où les dettes sont fixées en nominal est complètement ridicule »
George Selgin, Less than Zero: The Case for a Falling Price Level in a Growing Economy (1997). Chapitre 3. Voir aussi, pages 25-29.
>> « Le rapport c’est aussi réaliser que laisser les prix s’effondrer, et donc les ménages faire défaut et s’appauvrir considérablement en termes réels, c’est faire payer à des innocent les erreurs d’une poignée de gens. »
Huerta de Soto, Money, Bank Credit, and Economic Cycles, page 451 :
Now, in the stage of credit tightening, this forced redistribution of income reverses in favor of those who in the expansionary stage were the first harmed, and thus people on a fixed income (savers, widows, orphans, and pensioners) will gain an advantage over those who most exploited the situation in the earlier stage.
Ce que décrit H de Soto n’est rien de plus que l’inversion de l’effet Cantillon, qui se déclenche en cas de sur-expansion monétaire, et qui tend à créer des inégalités en favorisant ceux qui obtiennent le crédit en premier (les riches), càd avant que les prix ne montent, alors que les pauvres tendent à recevoir cette monnaie fraîche (sous forme de paye/salaire) après la flambée des prix, vu que cette monnaie fraîche avait déjà servi, et donc, ayant fait monter les prix.
Ce qui monte le plus descend le plus, ceux qui gagnèrent le plus (durant le boom) perdront le plus (durant le bust). Dans la même page, fait intéressant, H de Soto nous dit que durant le boom, les entreprises tendent à distribuer plus de dividendes durant le boom, mais beaucoup moins durant le bust car ils tendent à accumuler des épargnes. C’est logique au vu des mal-investissements. Et page suivante :
The recovery will be characterized by a restoration of the relative price of the original means of production, i.e., by a decrease in the price of consumer goods and services. This reduction in the price of consumer goods and services will be greater, in relative terms, than the drop in wages, due to an increase in society’s general saving, which will again stimulate growth in the capital goods stages. This growth will be achievable, given that it will originate from a rise in voluntary saving.
>> « Oh, et un résumé du débat Murphy / Mosler »
Je le lirai, et je reviendrai.
M.H.
Merci de votre réponse. Je pense que vous ne tenez pas compte des explications que je vous ai fourni plus haut, et du coup vous répétez les mêmes erreurs.
« Quand les taux ne baissent pas en cas de sur-expansion de crédit, le boom devient possible car les ressources (de crédit) ne sont pas asséchées. » >> Les taux montent en cas de sur-expansion du crédit, tout simplement parce que les taux sont en partie basés sur les attentes d’inflation, et que s’il y a trop de crédit il va y avoir de l’inflation. Si ce mécanisme de régulation n’existe pas, c’est soit un échec du marché (j’en doute) soit un blocage étatique du marché (plus probable). De plus, vous continuez à voire le crédit comme une ventilation de ressources: c’est une fausse vision. Ce sont les crédits qui créent les dépôts, pas l’inverse. Vous n’avez pas l’air de l’intégrer dans votre raisonnement.
« Désolé, mais ce sont des âneries. » >> Pas plus que de croire que les entrepreneurs percoivent le crédit comme une épargne disponible, je l’ai déjà expliqué précédemment, le crédit n’est pas basé sur une épargne disponible, mais sur une estimation de l’avenir, ça change tout.
« lorsqu’ils considèrent un taux naturel de zéro, ils énoncent clairement l’idée des interventions gouvernementales, du genre, il y a une demande de monnaie étatique en raison de la taxation. D’abord, ce n’est pas nécessairement vrai, tout dépend du privilège accordé (ou non) de monopole d’émission, ou toute autre loi. » >> C’est le cas qui nous concerne. Tout autre cas de figure est inconnu depuis un siècle ou purement fictif, dans tous les cas pas quelque chose d’utilisable pour étudier le système actuel, encore moins la dernière crise.
« lorsque les autrichiens, eux, évoquent le taux naturel, c’est celui qui prévaut dans une économie libre, pas comme Mosler. » >> Idem, une économie libre qui n’existe pas et qui n’est pas prête d’exister. L’Etat est là pour rester, et ses interventions avec, il faut faire avec.
« Ce que je voulais signifier par là est le problème inhérent à la macro, qui ignore les fluctuations des prix relatifs. D’où l’erreur du raisonnement en termes globales. » >> C’est le propre des modèles que d’oublier certains détails, c’est pour ça qu’on les réévalue en permanence. Mais des variables comme le nombre de chômeurs ou le NGDP, ça c’est concret, et on peut l’étudier.
« Le rapport avec la Grèce, je cherche encore. » >> Simple, l’euro a imposé un taux de change fixe là où il n’en fallait surtout pas, et a voulu faire croire aux investisseur qu’un euro de dette grecque valait autant qu’un euro de dette allemande. Forcément ça ne dure pas, puisque le marché est politiquement rigidifié. Vu que la Grèce n’est pas souveraine monétairement, elle est tenu à l’équilibre budgétaire en espérant que la BCE assure un money supply suffisant, ce qu’elle n’a pas fait. Donc la Grèce s’est retrouvée au pied du mur, en pleine spirale déflationniste et en pleine trappe à liquidité. Charles Gave l’expliquait déjà ici: http://www.youtube.com/watch?v=Sn4izrORf5A
« Ce pays vivait à crédit sur le dos, si je puis dire, des autres pays européens. » >> Oui, précisément à cause de cette absurdité politique qu’est l’Euro.
« Parce que ce n’était pas évitable. » >> Infondé, amha.
« Comme j’ai dit, le boom a permis de créer des activités qui n’auraient jamais eu lieu sans crédit artificiel. » >> Encore une fois, votre distinction « crédit normal » vs « crédit artificiel » ne tient pas. Les banques accordent à des gens qu’elles jugent solvables, dans le cadre des réglementations en vigueur.
« Mais le fait qu’on empêche la baisse des salaires et prix, en revanche, est un problème pour ce qui concerne la reprise économique. » >> Répéter ne rend pas votre propos plus crédible, il n’y aura jamais de baisse des prix suffisante avec des dettes fixées en nominal, c’est soit le défaut soit la faillite, mais pas de baisse des prix à court-terme en dehors de la théorie.
« il est nécessaire de faciliter la réallocation de la main d’oeuvre et outils, machines, vers des activités moins intensives en capitales, càd, vers les stades inférieurs de la structure productive. » >> D’accord. Ce qui passe par des politiques d’augmentation du pouvoir d’achat des consommateurs. Donc baisse d’impôts et autres mesures contra-cycliques. Laisser les revenus baisser, c’est au contraire réduire la demande, et donc l’incitation pour les entreprises à développer les stades inférieurs de la production.
« C’est pourquoi la flexibilité est cruciale » >> Elle est important, mais elle ne sera jamais totale. La demande politique pour une certaine stabilité de l’emploi et des revenus tend à rigidifier le marché de l’emploi, c’est là encore une réalité avec laquelle il faut composer.
« les mécanismes de marché oeuvrent pour ramener les prix/salaires relatifs vers leurs points d’équilibre, le plus possible. » >> En théorie peut-être, en réalité on a vu que non, précisément en raison de la très forte rigidité à la baisse des prix.
« Si vous maintenez le stock monétaire en l’état par la création monétaire, vous continuez à désorienter la structure productive. » >> Ne pas le maintenir c’est laisser s’effondrer toute l’économie, avec des spillover incontrolable. Politiquement c’est innaceptable, et ça tombe bien parce que c’est évitable. De plus, la structure productive s’adapte plus vite que ce que les prix ne peuvent baisser donc c’est un moindre problème; de surcroit je rajouterai que les déboires des grosses entreprises établies, celles qui sont en mesure de faire de très gros investissement sur du long terme sont paradoxalement une facilitation de la destruction créatrice, on a vu bien des innovations de rupture apparaître pendant les crises et dépressions pour cette raison.
« Je ne suis pas sûr à quoi vous faites référence par « phénomène principalement monétaire ». » >> Le fait que le taux d’intérêt n’équilibre pas l’épargne et l’investissement, puisqu’on n’a jamais S=I (cela n’est vrai que dans la fictive ERE) mais n’est en réalité que la récompense pour renoncer à la liquidité pendant un certain temps.
Bob Murphy l’explique dans le CH.3 de sa thèse, ici p.127 https://files.nyu.edu/rpm213/public/files/Dissertation.pdf
« Concernant la 1ere moitié, il faudrait expliciter. » >> Dans le système monétaire actuel (par opposition aux régimes à taux fixe et convertibilité), ce sont les investissement qui font l’épargne et pas l’inverse.
« Concernant la 2ème partie, c’est erroné » >> cf http://www.coordinationproblem.org/2012/02/what-the-austrian-business-cycle-theory-can-and-cannot-explain.html
« Il n’est pas possible d’initier un boom sans crédit artificiel. » >> Again, c’est réduire tout le business cycle à des evènement purement monétaire, ce qui est n’est rien d’autre que du wishful thinking. Du crédit en surabondance qui n’est pas régulé peut déboucher sur une « bulle », très localisée ou pas, en effet, mais dire que tout boom ne vient que du crédit, c’est nier tout ce dont on a évoqué plus haut. Un simple example, si vous avez une économie entièrement construite sur du pétrole à 100$, et que du jour au lendemain ce prix chute à 2$, vous allez avoir un boom, et c’est indépendant du crédit. C’est d’ailleurs vrai pour toute révolution technologique majeure. Ce que l’ABCT étudie, c’est un cas particulier de boom non-durable causé par un trop plein de crédit, et c’est tout. On n’explique pas toute l’économie avec ça.
« Peu importe les conflits d’intérets chez les agences de notations (conflits générés par la SEC, tiens donc), les asymétries informationnelles, le mimétisme, les inégalités qui soit-disant auraient encouragé les pauvres à sur-consommer via le crédit, selon Rajan je-sais-plus-quoi. Ceci est sans importance sans le crédit artificiel. » >> C’est un bon résumé, en effet. Moi j’appelle ça vouloir plier les faits à la théorie. Le cycle du crédit joue un rôle, c’est certain, mais je ne pense pas que l’analyse que vous en faite soit pertinente ni complète.
« Je fatigue à répéter, mais le boom est possible seulement lorsque le prix du crédit n’augmente pas, et si l’expansion de certaines industries n’est pas compensée par une contraction dans d’autres. » >> Je vois ça, mais le répéter ad nauseam ne le rendra plus vrai. On peut très bien avoir une croissance générale dans l’économie sans que ce soit insoutenable, on l’a vu dans des tas de petits pays après la chute de l’URSS.
« Aucune de vos théories proposées à ma connaissance ne tient compte de cela. » >> Bien sur puisque ce n’est pas avéré de manière systématique. Les économistes ne sont pas débiles, si c’était indéniablement valable ça serait beaucoup plus largement accepté. Ca ne l’est pas.
« J’ai dit, si vous avez bien lu, que les entrepreneurs ne savent pas distinguer l’épargne réel et le crédit artificiel. » >> Il n’y a pas « d’épargne réelle » vs « épargne artificielle » si vous avez compris que c’est l’investissement qui crée l’épargne. C’est une dichotomie fallacieuse qui s’auto-justifie. Je ne pense pas que ça soit suffisamment solide pour convaincre.
» Mais que lorsque les taux reflètent réellement les préférences temporelles, » >> On a vu plus haut que les taux ne reflètent pas les préférences temporelles, mais la préférence de liquidité, un phénomène monétaire, c’est même la conclusion de la thèse de bob murphy linkée plus haut !
« mais ça ne veut pas dire que je sois d’accord avec le fait que le crédit créerait l’épargne. C’est tout faux. » >> C’est un fait, un constat, que vous ne soyez pas d’accord n’y change rien, c’est comme ça que fonctionne le système. Il n’y a strictement aucune autre limite que l’inflation au money supply, et donc aucune raison de le limiter artificiellement en dessous d’une économie à pleine capacité (plein emploi).
« le prêt n’est plus seulement dépendant des épargnes réelles, et que la partie des crédits déconnectée de ces épargnes correspond à un crédit artificiel. » >> Là je ne vous suis pas. Le prêt est partout et toujours déconnecté de l’épargne réelle, puisqu’on ne prête pas l’argent des déposants mais on émet une reconnaissance de dette. Les banques n’ont pas d’autres contraintes que leur capital social, il me semble que vous continuez de raisonner dans un modèle de 100% réserves où l’on prête effectivement l’épargne de quelqu’un d’autre, c’est à dire un modèle où un euro prêté signifie qu’il manque un euro à quelqu’un autre. Ce qui n’a rien à voir avec la réalité, et qui invalide la dichotomie entre « épargne réelle » et « crédit artificiel ».
« C’est un concept simple que ceux qui prêchent le dogme du « crédit faisant les dépôts » ne peuvent pas voir. » >> C’est un concept faux, surtout, le « crédit faisant les dépôts » étant un fait caractéristique du système monétaire, pas une vue de l’esprit.
« Cela est sensé être une condition suffisante pour réfuter l’ABCT ? » >> Pas pour la réfuter, juste pour montrer que si ça explique quelque chose, ce n’est au mieux qu’une petite partie du problème.
« Le crédit artificiel est autrement dit LE médiateur de tous ces autres facteurs participant au gonflement des bulles. » >> Toujours, le « crédit artificiel » n’est pas une construction valide. Ce ne sont pas les bas taux d’intérêt qui ont amené Clinton a pousser Fannie Mae à couvrir des prêts à risque en ’99. Ce ne sont pas les taux bas qui ont créé des régulations bancaires qui ont diminué la concurrence du secteur. Le mimétisme, c’est une prédisposition psychologique, aucun rapport avec les taux. Les taux bas ont participé, certes, mais n’expliquent clairement pas la totalité du processus. Plusieurs implications: le problème de taux est local, pas global; la cause de cette dysfonction locale est très probablement non-monétaire; et si une perte de confiance s’ensuit d’un tel épisode et contamine le reste de l’économie, il est injuste de faire payer à des innocents les erreurs d’une minorités. En supposant une croissance du NGDP constante, le secteur malade peut se réformer sans que ça n’affecte le pouvoir d’achat des membres des autres secteurs, évitant ainsi une déflation forcée sur des secteurs autrement sains. Il n’y a de plus aucune raison de laisser s’installer du chômage involontaire et un output globalement en dessous de son potentiel.
« aucun boom historique n’a eu lieu sans expansion de crédit ou monétaire. » >> L’augmentation de la masse monétaire, c’est précisément le caractère de la croissance, ça n’en fait pas une mauvaise chose, ni un phénomène insoutenable. N’oubliez pas que l’ABCT se concentre sur les boom « unsustainable », ce qui exclue la croissance – et donc les « booms » – sustainables, eux créé par une croissance en termes réels importante (hausse de la population ou révolution technologique qui faut augmenter la productivité). A ce sujet il est d’ailleurs important de regarder le long-terme: depuis l’apparition de la FED, le système monétaire a été celui qui vous pourfendez avec véhémence, et pourtant la croissance en termes réels a été la plus importante de toute l’histoire de l’humanité. De la même manière que les périodes de croissance aux siècles précédents étaient accompagnées de
découvertes de mines d’or ou d’extension du crédit privé, dans tous les cas d’augmentation du money supply. Ce qui compte, c’est la croissance en termes réels, et le plein emploi.
« Montrez moi juste théoriquement qu’il est possible d’engendrer une bulle sans crédit artificiel » >> Again, il n’y a pas de crédit « artificiel », chaque banque décide à qui prêter et pour quoi. Une bulle relève d’un mouvement de foule, facilité par la crédit, mais dont le crédit n’est pas l’initiateur. C’est un élément nécessaire mais pas suffisant.
« D’abord, vous dites que les crédits font les dépôts (qui, bien sur, serviront de base pour des crédits supplémentaires), et maintenant, que la politique monétaire ne peut pas forcer la création de crédit ? Je ne vous suis pas. Bien sûr que la banque centrale force le crédit, tout comme elle peut le restreindre. » >> La banque centrale ne contrôle pas l’opérationnel des banques. Même si elle leur offre des conditions de refinancement complaisante, les banques ne prêteront rien s’il n’y a pas de demande pour du crédit en face. Donc non la politique monétaire ne peut pas forcer les banques à accorder des crédits si personne ne vient en demander, c’est une évidence. C’est d’ailleurs bien pour ça que la politique monétaire montre des limites, dans une trappe à liquidité elle ne fonctionne plus. Par contre elle peut restreindre le crédit, oui, ça elle sait faire. Mais le forcer,
c’est catégoriquement impossible, précisément à cause de l’endogénéité de la monnaie.
La fin de votre réponse retombe malheureusement dans les écueils évoqués plus haut, dans le système monétaire actuel ce sont bien les crédits qui créent les dépôts, et l’investissement qui crée l’épargne, ne vous en déplaise. Je ne dis pas que c’est bien, je dis juste que c’est comme ça. Refuser de le reconnaître et se réfugier dans des conceptions fictive ne fait pas avancer le débat.
Bien à vous.
@Jean-Philippe
Pour revenir à nos moutons, je vous invite à lire l’article suivant, de la NY Fed qui explique bien en quoi ma vision des choses est adéquate.
La clé est que présentement et depuis la crise (Octobre 2008), nous sommes dans un cas d’exception car la Fed paie des intérêts sur les réserves, chose inhabituelle (et insoutenable). Les banques n’ont donc pas d’incitatif à prêter les réserves. L’argent dort donc à la Fed. Mais en temps normal, les banques prêtent de façon à minimiser leurs réserves excédentaires. Donc normalement si la Fed injecte des réserves dans le système, elle fait augmenter l’offre de crédit. Et quand l’offre augmente, le prix baisse (i.e. le taux d’intérêt).
À la page 4, dernier paragraphe : « Si la Banque A ne se fait payer aucun intérêt sur ses réserves excédentaires par la banque centrale, elle cherchera à prêter ces réserves excédentaires ou à acheter des titres à court terme. Ces activités mettront une pression à la baisse sur les taux d’intérêt. »
Cliquer pour accéder à sr380.pdf
Comment éviter l’inflation dans cette situation si l’économie reprend de la vigueur? En augmentant le taux payé sur les réserves! Mais ce faisant, la Fed crée encore plus de réserves…ce qui équivaut à pelleter le problème en avant…
Concernant l’article de la Fed que vous avez cité plus haut, il faut être conscient qu’en effet, les activités de prêts des banques ne changent pas la quantité totale de réserves dans le système. Elles changent cependant la composition entre réserves requises et réserves excédentaires pouvant être utilisées pour les prêts.
Donc, il est bien entendu que si la Fed augmente les réserves par sa politique monétaire, mais qu’elle paie le taux du marché sur les réserves, elles ne fera pas augmenter l’offre de crédit, donc cette injection de réserves n’aura pas d’impact sur les taux d’intérêt ni sur l’inflation.
Minarchiste
Les réserves bancaires ne sortent jamais du réseau interbancaire, c’est à dire de la FED en fait (puisque les prêts interbancaires sont en fait des compensations au niveau des comptes des banques auprès de la FED). Ces réserves ne circulent jamais, et ne circuleront jamais, dans l’économie réelle, par construction (ce sont des réserves, pas du crédit).
Ce ne sont pas les banques qui décident du crédit, elles ne font que réagir à la demande du secteur privé. La politiques monétaire peut donc empêcher les banques de prêter, mais pas les forcer.
L’inflation n’est que la conséquence d’un money supply supérieur à la production maximale de l’économie, ce n’est donc pas un risque en période demande privée déprimée et de fort chômage. Le problème que cette politique soulève est double : 1/ ces interventions discrétionnaires modifient trop les comportements des marchés qui en deviennent dépendants (cf le Greenspan put, etc) et 2/ Les mécanismes de transmissions sont inopérants puisqu’ils échouent à acheminer la liquidité là où elle devraient aller, à savoir dans les poches du citoyen moyen.
Jean-Philippe:
« Les taux montent en cas de sur-expansion du crédit, tout simplement parce que les taux sont en partie basés sur les attentes d’inflation, et que s’il y a trop de crédit il va y avoir de l’inflation. »
Il n’y a pas d’inflation dans un système bancaire libéré du cours légal. Et aussi, les autrichiens le savent. H de Soto et Rothbard en ont touché un mot. Mais cette situation prévaut uniquement dans la ‘phase descendante’ du boom, précisément lorsque les banques réagissent en conséquence des fluctuations à la hausse des prix suite à l’expansion initiale de crédit, atténuant ainsi le boom. La phase ascendante correspondant à la montée des quantité de prêts, avant le début des malinvestissements.
« Pas plus que de croire que les entrepreneurs percoivent le crédit comme une épargne disponible »
Vous répétez l’argument auquel j’avais répondu précédemment.
« le crédit n’est pas basé sur une épargne disponible, mais sur une estimation de l’avenir »
Je veux ouvrir une banque, je n’ai aucun épargnant. Je crée 10 000 euros fictifs et les prête. C’est mon estimation sur l’avenir. Cela vous convient ?
Mais ceci mis à part, j’avais dit qu’une partie du crédit est fictive car supérieure à la quantité qui aurait prévalu si les banques prêtent uniquement ce que les individus sacrifient en consommation présente. Vous ne daignez toujours pas y répondre.
« C’est le cas qui nous concerne. »
Comme d’habitude vous éludez totalement mes remarques. Vous avez commis une énorme erreur et refusez de l’admettre. Celle de confondre la notion d’intérêt naturel chez les autrichiens et celle employée par Mosler de me proposer une critique risible du fait que vous attaquez un homme de paille. Le taux naturel ‘autrichien’ est un concept utile car il explique comment le système bancaire opère sans la présente réglementation. Vous dites que ces réflexions ne sont pas utiles pour étudier le réel. C’est là votre erreur, comme je l’ai dit encore dans mes 1ers posts. Etudier le réel, c’est comparer les modèles 1) où la réglementation est opérante, et 2) inopérante. Vous négligez 2) donc vous ne pouvez pas analyser avec clarté 1).
« C’est le propre des modèles que d’oublier certains détails, c’est pour ça qu’on les réévalue en permanence. »
Non, vous êtes à côté de la plaque. Il n’y a pourtant rien de difficile à comprendre quand je dis et redis que la macro-économie néglige systématiquement les déséquilibres provenant des distorsions dans les prix relatifs. Ce défaut est ici purement intrinsèque à la macro, pas aux modèles en tant que tel.
« Charles Gave l’expliquait déjà ici »
En gros, c’est : 1) différences de compétitivité entre pays, 2) excédents commerciaux allemands. Son blabla est curieux, même hilarant, surtout pour un libéral. Dommage que vous n’ayez pas lu le chap. 4 de Tragedy of The Euro, ou par exemple, ceci : « Without the acceptance of Greek bonds by the ECB as collateral for its loans, Greece would have had to pay much higher interest rates. In fact, the Greek government has been bailed out or supported by the rest of the EMU in a tragedy of the commons for a long time. » … « The costs of the Greek deficits were partially shifted to other countries of the EMU. The ECB created new Euros, accepting Greek government bonds as collateral. Greek debts were thus monetized. The Greek government spent the money it received from the bonds sale to win and increase support among its population. When prices started to rise in Greece, money flew to other countries, bidding up prices in the rest of the EMU. In other member states, people saw their buying costs climbing faster than their incomes. » (p.94).
« Les banques accordent à des gens qu’elles jugent solvables, dans le cadre des réglementations en vigueur. »
Aïe. Non, vous n’y êtes pas. Ce que je dis est : « If it were not for the elasticity of bank credit, which has often been regarded as such a good thing, the boom in security values could not last for any length of time. In the absence of inflationary credit the funds available for lending to the public for security purchases would soon be exhausted. » Dans : Money, Bank Credit, and Economic Cycles (p.462).
« il n’y aura jamais de baisse des prix suffisante avec des dettes fixées en nominal »
Expliquez donc.
« (la flexibilité) est important, mais elle ne sera jamais totale. »
Bien sûr, puisque l’inactivité est également utile, ce faisant, elle peut être délibéré, volontaire. Et pourtant, ce n’est pas nécessairement un problème, loin de là.
http://www.economicthought.net/blog/?p=2799
« Laisser les revenus baisser, c’est au contraire réduire la demande, et donc l’incitation pour les entreprises à développer les stades inférieurs de la production. »
J’avais dit que les entreprises tendent à réduire les coûts durant ces périodes de crises. Vous négligez aussi que pour consommer, il faut déjà éponger les dettes. Il n’y a rien d’anormal qu’il y ait une baisse de demande par ailleurs, sauf si vous considérez que le niveau de consommation était à son niveau « normal » durant le boom. Au contraire, cette consommation était basée sur la dette. Encore une négligeance, est ce que je disais déjà ici, à propos des salaires/prix relatifs comme explicatif du chômage.
Peut-être déjà cité, mais j’avais un article sur le stimulus keynésien, ici. Le problème vient quand vous stimulez la consommation via la création monétaire, car cela détruira davantage d’industries dans les stades de production supérieurs car les ressources tendent à se diriger là où est localisé l’argent. Il n’est d’ailleurs pas clair qu’il y ait une spirale négative dans la consommation, vu que les prix diminuant avec les salaires, les individus vont constater assez vite cette accumulation de monnaie.
Bien que je n’ignore pas que les données ne déterminent pas le sens de causalité et ne permet aucune inférence, je suis d’accord avec Hazlitt pour dire que les données peuvent réfuter (mais jamais confirmer) une théorie. Si par exemple, la théorie keynésienne prédit que la déflation est vecteur de crise puis dépression, un lien empirique doit pouvoir être établi. Pourtant, ça n’a pas l’air d’être le cas. Lire « Deflation and Depression: Is There an Empirical Link? ».
http://www.nber.org/papers/w10268.pdf?new_window=1
« Le fait que le taux d’intérêt n’équilibre pas l’épargne et l’investissement »
George Selgin, The Theory of Free Banking : « Are adjustments in the supply of loanable funds, meant to preserve monetary equilibrium, also consistent with the equality of voluntary savings and investment? The answer is yes, they are. The aggregate demand to hold balances of inside money is a reflection of the public’s willingness to supply loanable funds through the banks whose liabilities are held. To hold inside money is to engage in voluntary saving. As George Clayton notes, whoever elects to hold bank liabilities received in exchange for goods or services “is abstaining from the consumption of goods and services to which he is entitled. Such saving by holding money embraces not merely the hoarding of money for fairly long periods by particular individuals but also the collective effect of the holding of money for quite short periods by a succession of individuals.” (p.50). Voir également « Prices and the Demand for Money », section Price Discoordination and Entrepreneurship.
http://www.economicthought.net/blog/?p=166
« cf coordinationproblem.org …. »
Mais pourquoi donc aller me citer un article dont vous n’avez absolument rien compris ? Horwitz dit simplement que l’ABCT explique pourquoi le boom de crédit est unsoutenable. Mais l’ABCT n’a jamais tenu à expliquer pourquoi il y a un boom dans l’immobilier année X, et pourquoi il y a un boom dans le chemin de fer année Y. C’est pourquoi Horwitz écrit « Explaining the unique features of booms and why busts are more or less deep or more or less long, however, requires that we bring other theories into the story to complement the ABCT. » : il veut juste dire que l’ABCT explique « pourquoi il y a un boom » et non pas « pourquoi il y a un boom immobilier » parce que le second est un « unique feature » même si leur point commun est le boom monétaire. C’est exactement comme je disais : le boom du crédit rend possible les booms sans pour autant prédire le genre auquel nous serons confrontés. Horwitz a écrit cet article non pour attaquer l’ABCT mais pour réfuter les interprétations maladroites, comme celles que vous faites justement. D’où mon incompréhension quand vous citez un article pour vous réfuter vous-même.
« mais dire que tout boom ne vient que du crédit, c’est nier tout ce dont on a évoqué plus haut »
Preuve que vous ne lisez pas bien. Je me cite : « Le crédit artificiel est autrement dit LE médiateur de tous ces autres facteurs participant au gonflement des bulles. » N’est-ce pas ?
« Un simple example, si vous avez une économie entièrement construite sur du pétrole à 100$, et que du jour au lendemain ce prix chute à 2$, vous allez avoir un boom, et c’est indépendant du crédit. »
Dois-je encore me répéter ? Allons-y : « Le propre des booms, c’est que tout augmente et croît en même temps, bien qu’à rythme différent. ». Donc dans le cas présent, une chute relative des prix et profits dans un secteur donné s’accompagnera par un contre-mouvement dans d’autres pans de l’économie.
« On peut très bien avoir une croissance générale dans l’économie sans que ce soit insoutenable »
Une croissance soutenable sans épargne ? Non. Car c’est elle qui soutient la consommation future. C’est le seul modèle de croissance durable, i.e., sans crise.
« les taux ne reflètent pas les préférences temporelles, mais la préférence de liquidité, un phénomène monétaire, c’est même la conclusion de la thèse de bob murphy linkée plus haut ! »
Vraiment ? En quoi Murphy « Interest is … the price of borrowing money or … the exchange rate of present versus future money units. » est-il incohérent avec ce que je dis ? C’est l’interprétation autrichienne des taux d’intérêts. Les prix présents versus prix futurs, ou le « prix du temps ». Il n’y a rien de nouveau pour moi.
Je peux aussi me ranger de l’avis de Selgin : « While changes in the interest rate may represent a departure of the market rate from an unchanging natural or equilibrium rate due to a disequilibrium money supply, they may also represent changes in the natural or equilibrium rate of interest itself. » … « For example, if the demand for money increases primarily at the expense of the demand for present commodities, the equilibrium rate of interest falls. Finally, if the demand for money increases primarily at the expense of the demand for bonds, there may be no change in the equilibrium rate of interest. » (The Theory of Free Banking, pp.87-88).
De toutes façons, le taux d’intérêt n’est pas le concept clé de l’ABCT et des allongements ou amincissements des structures productives. Voir Guido Hulsmann :
The structure of production reconsidered
H de Soto et Rothbard disaient eux aussi que le boom n’est pas nécessairement suivi ou accompagné d’une chute des taux d’intérêts, étant influencés par également d’autres facteurs, mais que les taux actuels seront plus bas que ceux qui auraient prévalu sans expansion monétaire. L v Mises disait dans Human Action, que « If a bank does not expand circulation credit by issuing additional fiduciary media (either in the form of banknotes or in the form of deposit currency), it cannot generate a boom even if it lowers the amount of interest charged below the rate of the unhampered market. It merely makes a gift to debtors. The inference to be drawn from the monetary cycle theory by those who want to prevent the recurrence of booms and of the subsequent depressions is not that the banks should not lower the rate of interest, but that they should abstain from credit expansion. » ce qui importe donc est l’expansion monétaire en tant que telle. Ou la sur-expansion, si l’on accepte la théorie du Free Banking.
« il me semble que vous continuez de raisonner dans un modèle de 100% réserves où l’on prête effectivement l’épargne de quelqu’un d’autre »
Là, vous le faites vraiment exprès… j’avais dit que mon raisonnement est valable pour le 100% réserve mais aussi pour le free banking à réserve fractionnaire. Visiblement, vous ne saisissez pas la nuance entre la réserve fractionnaire à banque centrale et celle à banque libre, malgré les fois où je vous ai indiqué mes premiers posts. Là, par exemple.
« les « booms » – sustainables, eux créé par une croissance en termes réels importante (hausse de la population ou révolution technologique qui faut augmenter la productivité) »
Vous ne mentionnez même pas le rôle de l’épargne. Un concept clé pourtant. Et hausse de la population, je vois pas ce que ça vient faire ici.
« depuis l’apparition de la FED, le système monétaire a été celui qui vous pourfendez avec véhémence, et pourtant la croissance en termes réels a été la plus importante de toute l’histoire de l’humanité. »
De 1, ne jamais croire que les données historiques valident les théories. Elles ne servent à rien sans interprétation juste, et il serait idiot d’inférer directement de ces données le sens de la causalité. De 2, lisez ceci : Has the Fed been a failure?. Un excellent document qui pourfend la Fed.
« De la même manière que les périodes de croissance aux siècles précédents étaient accompagnées de découvertes de mines d’or ou d’extension du crédit privé »
Idem. « Accompagné » ne signifie pas « causé ». Il est important de saisir la nuance.
« Une bulle relève d’un mouvement de foule, facilité par la crédit, mais dont le crédit n’est pas l’initiateur. C’est un élément nécessaire mais pas suffisant. »
Ceci, auquel j’avais pourtant déjà répondu, est donc votre réponse à ma demande : « Montrez moi juste théoriquement qu’il est possible d’engendrer une bulle sans crédit artificiel ». Théoriquement, vous n’avez rien démontré et encore moins développé sur l’hypothèse risible comme quoi tous les prix peuvent monter simultanément sans expansion monétaire, donc pour moi vous perdez par défaut.
« Mais le forcer, c’est catégoriquement impossible, précisément à cause de l’endogénéité de la monnaie. »
S’il fallait traduire par « le crédit est le produit de la demande privée », c’est comme je l’ai dit. Vous n’êtes pas capable de différencier la réserve fractionnaire à banque libre versus banque centrale. Dans le 2nd cas, il y a un déséquilibre monétaire venant du fait que les montants de crédit sont disproportionnés par rapport à l’épargne. Bien sur que si la banque centrale possède un fort contrôle.
« l’investissement qui crée l’épargne, ne vous en déplaise »
Comme d’habitude, c’est une affirmation, pas un développement, ni même une réponse à mon commentaire.
MH
Je viens de voir votre réponse, rapidement :
« Il n’y a pas d’inflation dans un système bancaire libéré du cours légal. »
>> Tous les systèmes monétaires ont connu de l’inflation, et c’est bien logique, la croissance en crée. De plus, même si l’on peut argumenter que la stabilité des prix soit un objectif souhaitable, il faut d’abord se demander si on n’a pas des problèmes plus importants que qques % d’inflation. Et la réponse est oui.
« « Pas plus que de croire que les entrepreneurs perçoivent le crédit comme une épargne disponible » Vous répétez l’argument auquel j’avais répondu précédemment »
>>Ce n’était pas tant une réponse qu’une répétition du dogme expliquant que les prévisions entrepreneuriale seraient, selon vos propres termes « en correspondance, en ligne, avec la quantité d’épargne future ». Cette affirmation est infondée, d’autant plus que « l’épargne future » est une variable qui évolue avec la dépense publique, et avec la création monétaire due aux réserves fractionnaires : ce que vous semblez considérer comme fixe ou prévisible ne l’est pas, et ne le sera jamais.
« j’avais dit qu’une partie du crédit est fictive car supérieure à la quantité qui aurait prévalu si les banques prêtent uniquement ce que les individus sacrifient en consommation présente. »
>> Sauf que 1/ l’épargne n’est pas uniquement due au sacrifice de la consommation présente. Plus précisément, S = I + (G-T+X-M), le déficit public ajoute à l’épargne, à volonté, donc votre modèle est incomplet ; et 2/ les banques ne prêtent pas ce que les individus sacrifient en consommation présente, via le système des réserves fractionnaires. Nous ne sommes pas dans un système de troc monétisé, quand une banque prête 1€ il ne manque pas 1€ quelque part, ailleurs dans l’économie. Votre modèle rêvé, c’est celui du 100% réserves avec étalon-or : le nombre d’unité de compte dans l’économie est fixe ; or ce n’est pas le cas depuis 500 ans, et ça ne sera plus jamais le cas non plus.
« Le taux naturel ‘autrichien’ est un concept utile car il explique comment le système bancaire opère sans la présente réglementation. »
>> Ce qui fournit donc des explications purement spéculatives, basées sur des postulats invérifiables et des liens de causes à conséquence pour le moins critiquables mais que vous voulez faire accepter comme vérité indéniable, vous excuserez donc si ni moi, ni la grosse majorité des économistes, n’accordons pas beaucoup de valeur à un tel exercice. De plus il n’y a pas « un » taux naturel, mais autant que de biens et de services, cf les doutes de Bob Murphy à ce sujet : http://consultingbyrpm.com/blog/2013/02/i-am-officially-in-the-twilight-zone-callahan-and-glasner-on-sraffa-hayek.html
« Il n’y a pourtant rien de difficile à comprendre quand je dis et redis que la macro-économie néglige systématiquement les déséquilibres provenant des distorsions dans les prix relatifs. Ce défaut est ici purement intrinsèque à la macro, pas aux modèles en tant que tel. »
>> Et donc votre conclusion c’est qu’il faut arrêter de réfléchir sur la macro ? Mesurer le taux de chômage, c’est inutile ? S’il y a des distorsions, c’est peut-être parce que la nouvelle monnaie n’arrive pas uniformément dans l’économie, ce qui est un problème technique et/ou politique, pas économique. La macro est là pour rester, et heureusement.
« Ce que je dis est : « If it were not for the elasticity of bank credit, which has often been regarded as such a good thing, the boom in security values could not last for any length of time. In the absence of inflationary credit the funds available for lending to the public for security purchases would soon be exhausted. » Dans : Money, Bank Credit, and Economic Cycles (p.462). »
>> Oui, et c’est bien ce qui rend une bonne partie de votre analyse caduque : lorsque une banque vous prête X €, elle ne les prend pas à quelqu’un d’autre, et personne ne retrouve avec X€ en moins sur son compte. C’est le fonctionnement normal du crédit, et les crédits ne mangent pas les réserves d’autrui. A moins que vous soyez en train d’expliquer que le crédit bancaire (que le même euro puisse apparaitre sur deux comptes en même temps), invention des marchés libres, soit une fraude comme le pensait (à tort) Rothbard et doive être interdit ?
« « il n’y aura jamais de baisse des prix suffisante avec des dettes fixées en nominal » Expliquez donc. » >> Ce n’est rien d’autre que la classique « déflation par la dette » décrit par Fisher dans le cas des années 30, et puis reprise par Minsky plus récemment.
« Bien sûr, puisque l’inactivité est également utile, ce faisant, elle peut être délibéré, volontaire. Et pourtant, ce n’est pas nécessairement un problème, loin de là. http://www.economicthought.net/blog/?p=2799 » >> Oui elle peut être volontaire, mais dans un cadre récessionniste c’est un cas extrêmement minoritaire. 10% de chômage, ce n’est pas volontaire, ça ne le sera jamais, et ça ne sera jamais ni moralement ni politiquement acceptable.
« Vous négligez aussi que pour consommer, il faut déjà éponger les dettes. Il n’y a rien d’anormal qu’il y ait une baisse de demande par ailleurs, sauf si vous considérez que le niveau de consommation était à son niveau « normal » durant le boom. Au contraire, cette consommation était basée sur la dette. »
>> Mais nous sommes d’accord, et d’ailleurs vous êtes même en phase avec Keynes sur ce point. Cependant il y a une très grosse différence entre une légère baisse de la consommation et un mouvement massif de deleveraging qui engendre du chômage de masse. Ce qui rend les dépressions si graves, c’est précisément que les faillites s’étendent bien au-delà des seuls secteurs où l’on a pu voir ce que vous appelleriez des malinvestissements. Dans notre économie très complexe, un domino qui s’effondre peut en entrainer beaucoup d’autres, eux pourtant très vertueux et bien gérés – et ce n’est pas acceptable ni « mérité ».
« Peut-être déjà cité, mais j’avais un article sur le stimulus keynésien, ici. »
>> J’ai lu, et je vois toujours le même problème de fond : 1/ vous me prenez pour un keynésien ce que je ne suis pas et 2/ Le fait que la dépense publique affecte certains secteurs plutôt que d’autres et un choix, rien de plus, autrement dit on peut très bien imaginer d’autres mécanismes de transmission non discrétionnaires, et ce problème disparait. Un exemple : http://marketmonetarist.com/2012/11/11/patri-friedman-on-market-monetarism/
« Le problème vient quand vous stimulez la consommation via la création monétaire, car cela détruira davantage d’industries dans les stades de production supérieurs car les ressources tendent à se diriger là où est localisé l’argent. »
>> C’est un point intéressant, avez-vous des données empiriques pour l’étayer ? J’aurais toutefois tendance à penser que s’il y a trop forte baisse de la production dans les stades supérieurs, les prix monteront. Sinon, cf le point juste au dessus.
« Il n’est d’ailleurs pas clair qu’il y ait une spirale négative dans la consommation, vu que les prix diminuant avec les salaires, les individus vont constater assez vite cette accumulation de monnaie. » >> Diminution des prix que l’on n’observe pas dans la réalité, la dernière crise a bien montré que les prix ne baissent pas, tout simplement parce que les dettes sont fixées en nominal, c’est précisément la situation de déflation par la dette de Fisher et Minsky. Il n’y aurait d’ailleurs pas de « crise » si les prix pouvaient s’adapter à la baisse rapidement et sans rigidité, ni de chômage qui persiste des années après.
« Le crédit artificiel est autrement dit LE médiateur de tous ces autres facteurs participant au gonflement des bulles. » >> Cela ne nous avance en rien. Le problème est que les effets néfastes liés à l’explosion d’une bulle ne restent pas cantonnés dans le secteur concerné, et peuvent venir heurter des secteurs et des individus qui n’ont rien fait de mal. Guido Zimmerman en parle dans ce court papier : https://mises.org/journals/qjae/pdf/qjae6_4_7.pdf
« Allons-y : « Le propre des booms, c’est que tout augmente et croît en même temps, bien qu’à rythme différent. ». Donc dans le cas présent, une chute relative des prix et profits dans un secteur donné s’accompagnera par un contre-mouvement dans d’autres pans de l’économie. » >> Je ne vois pas pourquoi. La quantité de monnaie en circulation n’est jamais fixe, il n’y a pas de vases communiquant qui expliquerait un tel phénomène.
«Une croissance soutenable sans épargne ? Non. Car c’est elle qui soutient la consommation future. C’est le seul modèle de croissance durable, i.e., sans crise. »
>> Désolé mais ça c’est du wishful thinking, et je ne vois pas de données empiriques qui viendrait soutenir cette assertion.
« C’est l’interprétation autrichienne des taux d’intérêts. Les prix présents versus prix futurs, ou le « prix du temps ». Il n’y a rien de nouveau pour moi. » >> Il faut aller plus loin que ça, une des découvertes fondamentales de ces dernières décennies, c’est justement que le modèle des « loanable funds » est incomplet pour décrire les taux d’intérêt, et qu’il faut y ajouter la préférence de liquidité.
“ ce qui importe donc est l’expansion monétaire en tant que telle. Ou la sur-expansion, si l’on accepte la théorie du Free Banking. » >> Oui, c’est l’idée de Rothbard comme quoi l’émission de crédit bancaire est une fraude. Idée fausse s’il en est. Quant au free-banking, bien que j’aimerais bien le voir exister de nouveau, je suis réaliste.
« Vous ne mentionnez même pas le rôle de l’épargne. Un concept clé pourtant. »
>> Une révolution technologique découle le plus souvent de recherches financées par de l’épargne, c’était donc implicite. A propos de l’épargne : http://www.forbes.com/sites/pascalemmanuelgobry/2012/10/17/weisenthals-law-and-why-economic-pundits-biggest-mantra-is-wrong/
« Et hausse de la population, je vois pas ce que ça vient faire ici. » Ceteris paribus, la croissance en découle.
« Lisez ceci : Has the Fed been a failure?. Un excellent document qui pourfend la Fed. » >> Je connais bien, et j’y vois au contraire un bon argumentaire pour du NGDP targeting.
« Montrez moi juste théoriquement qu’il est possible d’engendrer une bulle sans crédit artificiel »
>> Il n’y a pas de crédit « artificiel » versus « pas artificiel ». Ou alors vous n’avez pas compris ce qu’était le crédit. Votre question est donc absurde. Qu’une banque ou autre acteur alloue des capitaux à des fins non-rentables n’a rien à avoir avec la nature du crédit, c’est juste un comportement humain qui tombe dans l’erreur.
Théoriquement, vous n’avez rien démontré et encore moins développé sur l’hypothèse risible comme quoi tous les prix peuvent monter simultanément sans expansion monétaire, donc pour moi vous perdez par défaut.
>> Mais l’expansion monétaire est un phénomène normal de tout marché libre si vous avez compris l’endogénéité de la monnaie ! 97% de la monnaie est du crédit bancaire, s’il y a croissance, on emprunte globalement plus que ce que l’on ne rembourse, avec ou sans banque centrale d’ailleurs, et la masse monétaire augmente, c’est comme ça que fonctionnent les banques !
J’essaierai de dégager du temps pour creuser les autres points.
BàV
Merci pour cet article clair et bien détaillé, j’ai récemment découvert votre site et il est très intéressant !
Quel article passionnant ! Ce n’est pas si simple pour les banques de fabriquer de l’argent, du moins c’est ce que je viens d’apprendre 😉 Merci pour ce super blog et article.
Denise
Jean-Philippe…..
>> « les prévisions entrepreneuriale seraient, … « en correspondance, en ligne, avec la quantité d’épargne future ». Cette affirmation est infondée, d’autant plus que « l’épargne future » est une variable qui évolue avec la dépense publique »
J’avais développé toute l’argumentation, ce dont vous ne faites toujours pas. Concernant l’épargne qui serait liée à la dépense publique, idem. Aucune argumentation. Sauf si vous me montrez que la dépense publique fait varier la préférence temporelle, nous ne serons jamais d’accord. La dépense publique ne fait pas varier la préférence temporelle pour la même raison que la création monétaire ne l’affecte pas (voir plus bas). Au lieu de ça, la dépense publique altère les types de production/investissements/dépenses, pénalisant X en subventionnant Y. Voir l’explication détaillé de Huerta de Soto, pages 408-409, contre ce sophisme.
>> « Votre modèle rêvé, c’est celui du 100% réserves avec étalon-or »
Vous avez la mémoire courte. Pour le reste du paragraphe, voir plus bas.
>> « De plus il n’y a pas « un » taux naturel, mais autant que de biens et de services »
Précisément ce que j’ai dit.
>> « Mesurer le taux de chômage, c’est inutile ? »
Non. Et les économistes autrichiens ne disent pas le contraire. Mais ils insistent sur les distortions au niveau micro, ce que la majorité des économistes ne font pas.
>> « Oui, et c’est bien ce qui rend une bonne partie de votre analyse caduque : lorsque une banque vous prête X €, elle ne les prend pas à quelqu’un d’autre, et personne ne retrouve avec X€ en moins sur son compte. »
Vous avez besoin de faire un effort de (re)lecture. La phrase de Fritz Machlup dit ni plus ni moins que si les banques ont des fonds limités, le résultat inévitable est la hausse du prix du crédit lorsque la demande augmente. Cela fera immédiatement cesser les commencements de formation de bulles. Si vous pensez, en outre, que le crédit fait l’épargne, lisez plus bas, la distinction entre épargne réelle et fictive. Et même, d’ailleurs, Machlup réfléchissait certainement dans une optique d’économie sans crédit artificiel, vu qu’il semble être partisan du 100% reserve. Votre remarque ne tient donc pas.
>> « Ce n’est rien d’autre que la classique « déflation par la dette » décrit par Fisher dans le cas des années 30 »
Ni une réponse, ni un argument. Je vous avais demandé d’expliquer pourquoi les prix doivent nécessairement continuer à tomber, même disons, infiniment ? Rothbard expliqua en quoi l’argument des spirales déflationnistes est un canard boiteux. Les gens doivent se nourrir, et ont des dépenses à faire, de nature incompressible. La spirale devra s’arrêter lorsque les gens ont épongé les dettes. Mais surtout, si les attentes des individus (et entrepreneurs inclus) concernant la déflation sont exaggérées, cela même n’est pas préjudiciable, puisque l’épargne va remonter plus rapidement à des niveaux nécessaires pour ‘relancer’ proprement l’économie vers la bonne direction, via des taux d’intérêts moins chers. De même, si les taux de salaires baissent plus vite que les prix, cela stimulera l’emploi et l’activité. Tout ce qui est nécessaire pour faciliter le désendettement.
Vous, en revanche, préférerez mettre l’accent sur le fardeau accélérant des dettes en période de déflation. Voici Rothbard, dans AGD, page 51 :
It has often been maintained that a failing price level injures business firms because it aggravates the burden of fixed monetary debt. However, the creditors of a firm are just as much its owners as are the equity shareholders. The equity shareholders have less equity in the business to the extent of its debts. Bond-holders (long-term creditors) are just different types of owners, very much as preferred and common stock holders exercise their ownership rights differently. Creditors save money and invest it in an enterprise, just as do stockholders. Therefore, no change in price level by itself helps or hampers a business; creditor–owners and debtor–owners may simply divide their gains (or losses) in different proportions. These are mere intra-owner controversies.
Le même Rothbard, dans MES, page 1007 :
It is true that deflation takes from one group and gives to another, as does inflation. Yet not only does credit contraction speed recovery and counteract the distortions of the boom, but it also, in a broad sense, takes away from the original coercive gainers and benefits the original coerced losers. While this will certainly not be true in every case, in the broad sense much the same groups will benefit and lose, but in reverse order from that of the redistributive effects of credit expansion. Fixed-income groups, widows and orphans, will gain, and businesses and owners of original factors previously reaping gains from inflation will lose. The longer the inflation has continued, of course, the less the same individuals will be compensated.
Notez que c’est le même argument sorti par H de Soto, cité par moi-même précédemment. Ou peut-être préférez vous Guido Hülsmann (Deflation & Liberty, p. 26) :
Yet from this correct observation, Fisher jumped to the fallacious statement that “the liquidation defeats itself.” Let us emphasize again that bankruptcies — irrespective of how many individuals are involved — do not affect the real wealth of the nation, and in particular that they do not prevent the successful continuation of production. The point is that other people will run the firms and own the houses — people who at the time the deflation set in were out of debt and had cash in their hands to buy firms and real estate. These new owners can run the firms profitably at the much lower level of selling prices because they bought the stock, and will buy other factors of production, at lower prices too.
In short, the true crux of deflation is that it does not hide the redistribution going hand in hand with changes in the quantity of money. It entails visible misery for many people, to the benefit of equally visible winners. This starkly contrasts with inflation, which creates anonymous winners at the expense of anonymous losers. Both deflation and inflation are, from the point of view we have so far espoused, zero-sum games. But inflation is a secret rip-off and thus the perfect vehicle for the exploitation of a population through its (false) elites, whereas deflation means open redistribution through bankruptcy according to the law.
Ou, en français, du même auteur, vous avez ceci :
http://blog.turgot.org/index.php?post/Hulsmann-d%C3%A9flation
>> « Oui elle peut être volontaire, mais dans un cadre récessionniste c’est un cas extrêmement minoritaire. »
En principe, selon les autrichiens, le chômage n’est pas involontaire dans une économie libre (J’ai compilé ici les arguments de divers auteurs). Elle l’est lorsque les interventions gouvernementales sont présentes, donc quand vous considérez vos 10% de chômage, vous ne semblez pas pour autant prendre ce facteur en compte.
Ceci étant, ce n’est pas exactement le point crucial de l’article ni du livre de W.H. Hutt. La théorie de Hutt évoque notamment le fait que le privé gère pour ce qu’il considère être le mieux son capital. Le fait donc qu’il soit inutilisé s’explique par le fait que dans cet état de non-utilisation, il soit encore utile, ou du moins, c’est dans cet état là que le capitaliste considère son capital comme lui étant le plus utile, ou profitable, dans la situation présente. Quand vous exigez que ces machines soit utilisées via des politiques de relance budgétaire aux projets hasardeux, ou même via la simple création monétaire, le résultat est la mauvaise utilisation du capital. Ce qu’il arrivera de la sous-efficience de son utilisation est que la production serait moindre (et moins durable) que ce qu’il en aurait été sans intervention publique de quelle nature que ce soit.
Aussi, de par sa nature de capital non-utilisé, le capitaliste s’assure d’avoir une assurance sur le futur. En d’autres termes, la forme non-utilisée du capital réduit l’incertitude. Dites vous que cela est considéré comme une sorte d’épargne.
>> « Cependant il y a une très grosse différence entre une légère baisse de la consommation et un mouvement massif de deleveraging qui engendre du chômage de masse »
Evidemment. Mais la flexibilité et un abaissement du salaire minimum aide grandement à assouplir les effets de crise. Par exemple, Regulatory Expenditures, Economic Growth and Jobs: An Empirical Study.
George Reisman aussi, dans Capitalism: A Treatise on Economics (p. 587), est intéressant :
Any greater debt burden on wage earners as a whole is not imposed by a fall in wage rates, which, in eliminating unemployment, at most serves to increase the debt burden of some wage earners while reducing that of others, but by a fall in the aggregate demand for labor, which, of course, is also what precipitates mass unemployment. A fall in the aggregate demand for labor means a reduction in the total of the wages paid in the economic system, and, in the face of a given magnitude of debts on the part of wage earners, necessarily makes the repayment of those debts more difficult. Thus, the actual damage to the ability of wage earners as a group to pay their debts is done before the fall in wage rates. It is the result of a financial contraction.
The fall in wage rates, as I say, at most merely redistributes the greater debt burden. And, as I have shown, in the process it actually improves the economic situation of the wage earners to whom the debt burden is transferred, by virtue of bringing about full employment and thus the elimination of the burden imposed on these workers of having to support the unemployed, while at the same time reducing the prices these workers must pay. And then, of course, following the fall in wage rates and prices, with the passage of time and the replacement of expiring debt contracts with new ones made in accordance with the lower level of prices, the greater debt burden is eliminated altogether. In addition, the greater division of labor and resumption of capital accumulation or more rapid capital accumulation that goes with full employment in a free market operates progressively to raise the productivity of labor and real wages. In sum, when unemployment exists, a fall in wage rates is a necessary and benevolent phenomenon that eliminates the unemployment and operates to raise the general standard of living.
>> « Ce qui rend les dépressions si graves, c’est précisément que les faillites s’étendent bien au-delà des seuls secteurs où l’on a pu voir ce que vous appelleriez des malinvestissements. »
Sauf que vous n’en n’expliquez pas le processus ni les raisons. La ‘globalité’ ou ‘généralité’ de la crise est que les discoordinations temporelles ont nécessairement affecté tout le monde. Ne l’avais-je pas dit ? Lorsque vous, entrepreneur, investissez plus que de raison, et découvrez plus tard que la demande n’est pas aussi élevée que vous l’avez prévu, puisque personne ne s’est décidé à épargner plus, la contrepartie est que vous essaierez de diminuer vos coûts de production, par exemple, en diminuant la force de travail ou le salaire individuel. La réaction en chaîne, bien sûr, est que les gens épargneront davantage, et plus encore certainement si une partie avait consommé à crédit durant la phase d’expansion. Tout le monde se retrouve plus ou moins affecté, à degré divers. Et c’est ça qui est significatif, un détail que vous ignorez tout à fait. Certains secteurs sont plus touchés que d’autres, ce que la théorie autrichienne prédit.
S’il est bien possible que d’autres facteurs notamment psychologiques agissent précisément dans la phase de récession, ce dont les autrichiens n’ignorent pas et savent incorporer dans leurs théories, contrairement aux idées reçues, ces facteurs ont certainement beaucoup à voir avec les dettes.
>> « 1/ vous me prenez pour un keynésien ce que je ne suis pas et 2/ Le fait que la dépense publique affecte certains secteurs plutôt que d’autres et un choix, rien de plus, autrement dit on peut très bien imaginer d’autres mécanismes de transmission non discrétionnaires »
Bien sûr que non. La raison de cet article est qu’il (ou je) explique ce qui pourrait se passer en cas de stimulus fiscal impliquant création monétaire, même si par principe normalement, la relance budgétaire ne prédit pas de création monétaire. Or, votre idée est celle de la création monétaire, mais comme je l’ai expliqué alors, cette monnaie fraîche encourageant la consommation relativement à l’épargne, continuerait à distordre la structure productive puisque la reprise peut difficilement se faire sans amélioration dans le niveau de prospérité. Or ceci n’est possible que si la structure productive s’allonge ou au moins ne rétrécit pas. Donc il est nécessaire d’encourager l’épargne. Stimuler la consommation via création monétaire, étant une politique basée sur les résultats de court terme, implique moins de possibilité d’investissements futurs.
Vous objecterez bien sûr puisque selon vous, c’est le gouvernement qui crée les épargnes. Comme Hazlitt ironisait sur Keynes, une simple écriture comptable ajoute de l’épargne pour la simple raison que quelqu’un doit au final se retrouver avec ce papier en main. C’est une épargne fictive, et vous ne comprendrez jamais ce concept, à moins qu’un jour vous puissiez faire la différence entre « épargne » et « épargne par sacrifice de consommation ». C’est ce dernier dont il s’agit quand les autrichiens évoquent l’épargne, or je ne crois en aucune façon que les keynésiens ou que ce soit les chartalistes aient compris le concept. Donc quand ces derniers invoquent l’idée que c’est l’investissement (ou le crédit) en lui-même qui crée l’épargne, ils sont dans le faux. Ce crédit artificiel, comme expliqué par H de Soto dans son livre phare, favorise les investissements productifs sans laisser diminuer le niveau de consommation.
Mais si vous comprenez cela, alors vous devriez comprendre pourquoi la création monétaire ne permettra pas une reprise durable. Cela n’aura pour effet finalement que de reporter à plus tard les effets de la crise, mais avec encore davantage d’ampleur, dû à l’accumulation des malinvestissements.
>> « C’est un point intéressant, avez-vous des données empiriques pour l’étayer ? J’aurais toutefois tendance à penser que s’il y a trop forte baisse de la production dans les stades supérieurs, les prix monteront. »
Pas que je sache. De mémoire, c’est soit un argument dont j’ai repris de H de Soto, soit un argument de mon propre cru. Quoi qu’il en soit, les prix ne monteront pas, vu que la réduction de production se fait parce que nombre d’investissements durant la phase d’expansion ne sont aujourd’hui plus rentables du tout. La bulle a fait investir davantage dans le produit Y, mais comme la folie du crédit s’est calmée, il n’y a plus nécessité ou besoin du produit Y. Tout le matériel qui a nécessité, participé à l’élaboration du produit Y, doit être ré-utilisé à d’autres fins, plutôt vers ceux dont la demande actuelle est la plus forte.
Aussi, et plus important, vu que les crédits en phase de récession sont largement très limités, les possibilités d’expansion également. Les entreprises de détail par exemple vont limiter leurs investissements au maximum, et n’achèteront pas plus de machines et autres gros outils de travail, durant le temps que ça prendra pour les épargnes de s’accumuler, les crédits plus accessibles ce faisant, permettant ainsi des investissements sur une base durable et raisonnable. Sinon, du fait des crédits artificiels, la consommation va augmenter alors que les individus n’épargnent pas davantage. Lorsque les gens épargnent en restreignant la consommation, il y a possibilité d’expansion des industries aux stades supérieurs.
>> « Diminution des prix que l’on n’observe pas dans la réalité, la dernière crise a bien montré que les prix ne baissent pas, tout simplement parce que les dettes sont fixées en nominal »
Je note surtout que l’on fait tout pour éviter une déflation à la 1930s.
>> « Le problème est que les effets néfastes liés à l’explosion d’une bulle ne restent pas cantonnés dans le secteur concerné, et peuvent venir heurter des secteurs et des individus qui n’ont rien fait de mal. »
Déjà parlé. Mais jamais répondu.
>> « La quantité de monnaie en circulation n’est jamais fixe »
Mais cela change quoi ? Durant le boom, il y a illusion sur le fait que tout le monde semble prospérer en même temps; il n’y a pas de hausse et baisse relative de part et d’autres dans les profits, à savoir que l’entreprise X connait une expansion au détriment de Y. Vous connaissez l’inflation relative ? C’est un terme utilisé par les autrichiens pour dénoter la possibilité d’un boom même lorsque l’inflation n’est pas énorme. Il suffit que les prix soient stables via le crédit artificiel au lieu de déclins séculaires dûs aux gains de productivité. En temps normal de toutes façons, il devrait y avoir ce genre de baisses de prix séculaires. En principe, la richesse globale devrait augmenter, mais sans pour autant être l’oeuvre d’une expansion artificiellement dopée par le crédit.
>> « Désolé mais ça c’est du wishful thinking »
Non c’est un raisonnement dont j’ai expliqué 100 fois la logique et dont vous continuez à ignorer. Relire. Il y a obligation d’une cassure quand les entrepreneurs estiment une demande future qui n’existera pas. Je redis, j’ai toujours pas votre réponse argumenté.
>> « le modèle des « loanable funds » est incomplet pour décrire les taux d’intérêt, et qu’il faut y ajouter la préférence de liquidité. »
Ce n’est pas un argument construit et développé. Peu importe, la demande de monnaie, vous devriez savoir, n’est pas liée nécessairement à la préférence temporelle. Il peut parfois y avoir hausse de demande de monnaie (sous forme de thésaurisation; ou dans le modèle Free Banking à la Selgin une détention de billets pour durée plus prolongée, ce qui a le même effet qu’une épargne consistant à sacrifier sa consommation présente) provenant soit d’une baisse de 1) consommation ou 2) d’investissement, le dernier cas pouvant signifier réduction des actifs financiers et dénotant ainsi un changement dans la forme de votre monnaie détenue à la main ou thésaurisée. Dès lors votre argument tombe à l’eau. Car seul 1) fait impliquer un changement de préférence temporelle. Mais Huerta de Soto parle mieux que moi, et comme c’est mon péché mignon de citer les gens, allons-y encore :
( … Indeed first he asserts that the interest rate is determined by the demand for money or liquidity preference, and then he states that the latter in turn depends on the former.) Another considerable shortcoming of Keynesian doctrine is the assumption that economic agents first decide how much to consume and then, from the amount they have decided to save, they determine what portion they will use to increase their cash balances and then what portion they will invest. Nevertheless economic agents simultaneously decide how much they will allot to all three possibilities: consumption, investment and the increase of cash balances. Hence if there is a rise in the amount of money each economic agent hoards, the additional amount could come from any of the following: (a) funds previously allocated for consumption; (b) funds previously allocated for investment; or (c) any combination of the above. It is obvious that in case (a) the interest rate will fall; in case (b) it will rise; and in case (c) it may remain constant. Therefore no direct relationship exists between liquidity preference or demand for money and the interest rate.
Je note que c’était aussi l’argument de Rothbard dans MES et AGD (ch.2).
>> « A propos de l’épargne »
Lu les 3 pages. Comment dire, j’arrive pas à voir si c’est une critique, ou bien quoi… ?
>> « j’y vois au contraire un bon argumentaire pour du NGDP targeting. »
Vous avez du mal à argumenter. C’est curieux d’autant que les free bankers ne recommendent pas les banques centrales, mais plutôt leur abolition, si c’était votre doute. L’explication est aux chapitres 7 et 8 de The Theory of Free Banking (lien, ou en français, ch7, ch8) essentiellement due à la non coordination des politiques monétaires.
>> « Il n’y a pas de crédit « artificiel » versus « pas artificiel ». Ou alors vous n’avez pas compris ce qu’était le crédit. Votre question est donc absurde. »
Je comprends le crédit. Vous ne comprenez pas l’économie autrichienne. Vous ne répondez même pas à la question qui n’avait rien avoir avec un tel débat sémantique réservé aux petits capricieux (dont je ne suis pas). Si ça ne vous plait pas, on reformule la question : « Montrez moi qu’on peut engendrer une bulle avec un montant de crédit reflétant l’horizon temporelle des agents économiques ». Cela revient à dire la même chose de toute façon…
>> « Mais l’expansion monétaire est un phénomène normal de tout marché libre si vous avez compris l’endogénéité de la monnaie ! »
Je répète. Encore. Une fois. Vraiment. C’est. Fatigant. Bref, ce fut un de mes 1ers commentaires. Voir ici. Le crédit dans le système actuel a beau être fractionnaire, il n’est pas coordonné avec le désir des individus à reporter, sacrifier la consommation présente, ce pourquoi les taux de marché divergent des taux naturels, c-à-d les taux prévalent sous l’absence d’intervention (1000ème fois). Votre argument d’endogénéité ne s’applique pas présentement. Je l’ai compris dès la toute première fois. Mais vous n’avez pas encore (et peut-etre jamais…) fait la distinction entre la création monétaire actuelle et celle sous le Free Banking. Comme je l’ai dit dans mes 1ers coms, vous ne pouvez pas comprendre cette distinction si vous partez de l’idée que le Free banking, car appartenant au passé, il n’y a nul besoin d’étudier ce sujet. Vous pouvez relire mes tous 1ers coms.
Merci pour cette article, j’ai eu un document similaire au concours Sciences Po et grâce à vous je l’ai compris ! Merci encore continuez comme ça
Cet article*
Je vous remercie pour ce document car il m’a aide dans mes travaux de recherche et mes devoirs encore une fois merci et felicitations!!!!