Les autres volets de cette série d’articles sont :
Diagnostic pauvreté : 1- Le Bangladesh.
Diagnostic Pauvreté: 2- Le Chili.
L’évolution économique de la Suède.
Diagnostic Pauvreté 4 : La Libéralisation de la Nouvelle Zélande.
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Le « cirque » de U2 est récemment passé par Montréal avec ses deux immenses concerts extérieurs ayant attiré plus de 160,000 personnes. J’étais bien content de ne pas avoir eu à payer mes billets à $275 l’unité car d’où j’étais, Bono avait l’air d’un Lilliputien! Je préfère les concerts plus intimes où l’on peut voir plus clairement d’où proviennent les sons que l’on entend et où les sièges sont plus confortables et…immobiles (lorsque les gens sautaient, mon banc oscillait avec une amplitude d’environ 20 centimètres!).
Néanmoins, je réfléchissais sans cesse à tous ces plaidoyers de Bono pour augmenter l’aide aux pays pauvres, lui qui évite de payer la totalité de ses impôts en Irlande grâce à une pirouette fiscale (voir ceci). Bono et ses acolytes sont peut-être bien intentionnés, mais dans la pratique, ils ont tort. Non seulement l’aide internationale aux pays pauvres n’améliorent pas leur sort, elle a même un effet négatif sur le développement de ces pays.
L’aide internationale aux pays du Tiers-monde a totalisé plus de $600 milliards en 50 ans. De telles dépenses auraient dû conduire à des améliorations dans le développement, mais ont en réalité seulement servi à enraciner le système corrompu dont les politiques entravent le développement. En Afrique, le revenu moyen par personne est d’environ 11% inférieur à ce qu’il était en 1960. Beaucoup de pays sont sorti de la misère au cours des dernières décennies (les Tigres Asiatiques, les pays de l’ancien bloc soviétique, le Chili, etc), non pas grâce à de l’aide internationale, au FMI et à la Banque Mondiale, mais bien parce qu’ils ont libéralisé leur économie et réduit le poids de l’État sur la société.
La taille de l’État en Afrique est oppressante et favorise la corruption à tous les niveaux de l’échelle de la fonction publique. Les dirigeants africains ont été en mesure de siphonner près de 150 milliards de dollars par an à leur population. Au cours des dernières décennies, pour chaque dollar donné à l’Afrique en aide, 80 cents ont été volés par des dirigeants corrompus et transférés dans leurs comptes à l’extérieur du pays. L’argent qui reste sert à maintenir le statu quo; à garder la population en laisse et en situation de dépendance. Ces gouvernements ont, par le fait même, une incitation à faire perdurer la misère pour justifier toujours davantage d’aide, et donc plus de revenus pour eux. Il est donc contreproductif de pelleter de l’argent dans ces pays sans changer le système radicalement.
Par exemple, en 2005, 80% de la dette du Ghana a été annulée par des pays riches à qui elle était due. Le but était de donner au pays un nouveau départ et une plus grande indépendance pour concentrer les ressources financières sur les priorités de développement plutôt que sur le service de la dette. Plutôt que d’en profiter pour remettre son économie sur pieds, le Ghana a préférer en profiter pour emprunter 750 millions de dollars sur les marchés financiers internationaux en 2007, qui ont ensuite été dilapidés de part et d’autre de façon à favoriser la réélection du parti au pouvoir. Déterminé à récupérer des votes, le gouvernement a approuvé un déficit de plus de 20% du PIB du pays, ce qui remis le pays dans une situation financière précaire.
Dans ces pays sous-développés, les actifs économiques sont souvent conservés entre les mains de l’État, conduisant à des monopoles, à la stagnation et à encore plus de corruption. Les biens et services offerts par ces entreprises sont souvent trop dispendieux, de mauvaise qualité et en pénurie car le capital de ces entreprises est extorqué par la classe politique plutôt que d’être investi dans l’amélioration des infrastructures de production. Les entrepreneurs privés sont découragés face à ces entreprises nationalisées. Il est donc impossible d’y développer une économie dynamique.
D’autre part, l’aide accordée à ces pays est administrée par des organisations qui ne sont pas tenues responsables des résultats de leurs actions. Comme toute bureaucratie, elles existent en maximisant la taille de leur budget. Les employés de ces groupes n’ont donc un certain intérêt à maintenir ces pays dans une situation de dépendance, puisque sans elle ces groupes ne serviraient à rien. Chaque échec est accompagné d’une demande d’aide additionnelle, permettant d’assurer la pérennité de ce modèle déficient.
Ensuite, les pays donateurs ne donnent pas par pur altruisme, ils avancent leurs intérêts stratégiques et économiques. L’aide fournie implique souvent que le pays récipiendaire achète en contrepartie au donateur, à un prix généralement plus élevé que le marché. Il est opportuniste pour les pays développés de soutenir ces dirigeants corrompus car cette situation permet aux grandes puissances de plus facilement négocier leur accès aux ressources fabuleuses de l’Afrique plutôt que devoir faire face à une vraie démocratie qui poserait ses conditions. Autant maintenir au pouvoir un gouvernant amadoué par l’aide et d’approuver la tenue d’élections arrangées de façon à garder bonne conscience. C’est ce qui se produisait dans les pays arabes qui se sont récemment révoltés.
Une autre raison pour laquelle l’aide internationale est vouée à l’échec est qu’elle se base sur la planification centrale. Les organisations qui déploient l’aide croient connaître les besoins locaux et se croient capables de coordonner les multiples projets, tout en évaluant les causes des succès et des échecs. L’échec monumental de la planification centrale dans l’histoire de l’humanité devrait leur avoir enseigné que ce système est voué à l’échec et que le marché demeure le meilleur mécanisme d’allocation des ressources.
L’une des différences entre les Tigres Asiatiques, le Chili et les pays d’Afrique est que les premiers ont embrassé le commerce international alors que les derniers sont demeurés relativement fermés à la mondialisation, par peur d’y perdre au change en raison de leur faible compétitivité. Ce fut une erreur! Comme le souligne Emmanuel Martin :
« arguer que la mondialisation exploite l’Afrique suppose qu’une partie considérable des capitaux internationaux s’y jettent pour «profiter» du continent. Or, que révèlent les chiffres? La Conférence des Nations Unies sur le Commerce et le Développement indique que le stock d’investissements directs étrangers (IDE) dans toute l’Afrique en 2008 équivaut à… 3,42% des IDE dans le monde : presque moitié moins que la destination France à elle seule! Si ces chiffres indiquent quelque chose, c’est que l’investissement international ne se dirige pas assez vers l’Afrique. L’Afrique n’est en réalité pas véritablement mondialisée. »
En Afrique sub-saharienne, lancer une entreprise officiellement coûte 100 % du revenu annuel par habitant alors qu’un permis de construire coûte presque 2,000% du revenu par habitant. En Côte d’Ivoire, il faudra attendre près de deux ans pour avoir ce permis. Voilà pourquoi la plupart des gens entreprenants sont forcés d’évoluer sur les marchés informels. Il est donc compréhensible qu’en Afrique la mondialisation ne profite pour l’instant qu’aux riches et aux grandes entreprises car dans un tel système, il n’y a que les grosses entreprises, souvent internationales, qui sont capables de défrayer de tels coûts.
Ceci étant dit, ce problème est largement augmenté par les pays riches, qui maintiennent encore aujourd’hui d’importantes barrières protectionnistes, surtout au niveau de l’agriculture, une industrie primordiale en Afrique. Ces subventions, tarifs et quotas font baisser les prix des produits agraires sur les marchés mondiaux et nuisent aux producteurs africains. Selon Oxfam, les subventions aux agriculteurs américains ont menés à plus de $300 millions en pertes de revenus pour les producteurs sub-sahariens (2001-2002).
Conclusion :
Comme le mentionne William Easterly :
« La libre-entreprise a été le moyen expérimenté avec succès partout ailleurs pour sortir de la pauvreté et ce serait condescendant de suggérer que cela ne puisse pas marcher en Afrique. »
Ce dont les pays africains ont besoin est l’instauration d’un cadre institutionnel d’État de droit ainsi que d’une meilleure définition et protection des droits de propriété. Ils ont besoin d’entreprises florissantes qui fournissent des emplois et créent de la richesse. Ils ont besoin d’une plus grande liberté économique.
Comme le disait le Président de l’Ouganda durant sa rencontre avec le Président Bush en 2003 :
« Je ne veux pas d’aide, je veux du commerce. L’aide ne peut pas transformer les sociétés. »
Plutôt que de leur expédier de l’argent sous pleins de conditions, nous devrions plutôt abaisser nos barrières protectionnistes et laisser la liberté faire son chemin.
Pour des lectures complémentaires:
http://www.contrepoints.org/2011/07/15/35042-afrique-sortir-de-la-dependance-a-laide
http://www.unmondelibre.org/Cudjoe_aide_gouvernance_060711
http://www.contrepoints.org/2010/09/13/617-la-mondialisation-ennemie-de-l%e2%80%99afrique
Le président de l’Ouganda a tout compris. Les pays de l’Occident sont « riches » parce qu’ils n’ont jamais été aidés que par eux-mêmes, ont tous fait leur révolution, et ont tous pris leur destin en main. L’aide internationale (et la dette qui va) avec est un colonialisme déguisé, un terrorisme des idées et des libertés, des économies et des autonomies. Je ne suis pas pour appeler l’aide de l’assistanat, car c’est ne rien comprendre au fait que ça leur coûte bien plus à long terme, et sur de multiples plans, que ça ne leur apporte à court terme dans les assiettes. Ça peut sembler cruel, mais un peuple libre et fort, c’est un peuple qui n’en peut plus, n’attend plus d’aide de nulle part, et se mobilise de désespoir en nation. Voici le secret des pays développés. La famine, c’est odieux à voir et à vivre, mais 3 grains de riz donnés n’apprennent pas à un peuple à en faire pousser et à s’approprier les terres et les moyens à ses puissants pour se faire …. Personne n’a donné de farine aux parisiennes affamées en 1789 … aujourd’hui, ces estomacs douloureux, nous leur devons notre statut de pays « dits » riches.
Les dons, pour faire du développement économique, n’ont jamais montré aucune efficacité.
J’écoutais tout juste ce matin à la radio, Luck Mervil qui racontait qu’en Haïti, le nouveau Président Martelly a demandé aux gestionnaires des dons internationaux d’arrêter d’utiliser du nouvel argent, mais de trouver où sont passé les 4G$ déjà dépensé. Sur les 10 milliards de $ promis, 4G$ on déjà été dépensé et rien, en gros, n’a été fait pour la population. L’argent, M. Martelly lui-même le soupçonne, a probablement été dilapidé dans les poches de fonctionnaires de tout acabit et de profiteurs, privés ou publics, de cette manne (le Président n’a probablement pas dit ça comme ça).
J’ai travaillé, en début de carrière, comme économiste, en tant qu’analyste externe pour RioTinto. Nous avions a corriger un plan d’investissment construit par RT, investissement de 9G$ au Cameroune. Or, le Cameroune n’a pas de ministère des finances indépendant, mais c’est l’OCDE qui supervise le ministère, voire qui gère la quasi-tutelle. RT avait fait un plan d’analyse où il exagérait un peu (je suis très poli) les retombées économiques. J’ai dû retravailler (j’étais loin d’être seul sur ce mandat, nous étions une équipe) le plan avant qu’il soit finalement accepter par RT, l’OCDE et le gouvernement du Cameroune.
L’idée derrière tout ça est que, RT ne voulait pas payer d’impôt, pas une cenne. Avec rasion d’ailleurs. En contre-partie RT fesait ce que moi je considère comme le seul véritable outil de développement économique, au lieu de bourrer les poches des fonctionnaires et des politiciens verreux, RT construisait les infrastructures routières, électrique et portuaire, et permettait aux citoyen d’utiliser les routes comme bon leur semblaient, une partie du port réservée aux entreprises autres que RT et, comme les barrages étaient loin de l’aluminerie, RT permettait aux villages bordant la rivière et les lignes de transmission, d’utiliser une partie de cette énergie, bref, RT électrifiait certains villages.
Donc, où je veux en venir, c’est qu’il y a moyen de faire du développement économique, lorsque l’on part presque de zéro, mais qu’il faut court-circuiter les organisations corrompues en offrant des externalités positives de grandes qualités aux citoyens.
Au final le Cameroune se ramasse avec un projet d’aluminerie de 800 000 tonnes par année (Alouette fait quelque chose comme 275 000 tonnes par année), deux barrages sur le fleuve Sagana (1900 MW), des kilomètres de route pavée et de ligne de haut-voltage, et, au final, des travailleurs locaux formés, des fournisseurs locaux, bref une expertise de développement durable.
Les dons liés à l’aide international ne font que créer la dépendance. Évidement, lors de catastrophe, les dons ne sont que des moyens lors d’évènements exceptionelles, pour aider immédiatement. Le Tsunami au Japon, ou le très gros en Indonésie à Noël, ou encore la famine dans la corne de l’Afrique, mais les dons récurrents ne sont que la création d’un cercle vicieux de non-développement.
Cliquer pour accéder à Doc6-EBD-Etude_Impacts_Projet_RTA_VF.pdf
@Verredebiere
Très intéressant ton exemple.
Ça illustre parfaitement mon point.
Complément d’information: ce qu’un Africain en pense…
Cela rejoint l’avis d’d’Angus Deaton (qui a recu le prix nobel d’économie pour ses travaux sur la pauvreté) dans « La Grande évasion ». Pour lui, l’aide au développement est totalement inefficace à l’exception de l’aide médicale
Un article parlant de son livre « La Grande évasion »: https://blog.francetvinfo.fr/classe-eco/2015/10/12/angus-deaton-prix-nobel-deconomie-2015-la-grande-evasion.html
Les États-Unis ont dépensé 50% de plus dans la reconstruction de l’Afghanistan et l’Irak que dans la totalité du plan Marshall. Les résultats sont décevants.
https://www.cfr.org/blog/it-takes-more-money-make-marshall-plan
L’aide au développement est un échec: toute la littérature académique le montre.
Cliquer pour accéder à cj23n2-2.pdf
Et: http://www2.gcc.edu/dept/econ/ASSC/Papers2006/Law_Curott.pdf
En 1960, le revenu moyen sud-coréen était de 1,102 dollars. Au Ghana? 1,053 dollars. En 2015, le revenu moyen coréen a atteint 25, 022 dollars tandis que celui du Ghana était de 1,696 dollars. Pourtant, le Ghana a reçu beaucoup plus d’aide au développement par habitant que la Corée du sud de 1960 à 2015.
https://humanprogress.org/article.php?p=261