En mai dernier, je me suis rendu à la conférence Bernstein à New York, pour y entendre les PDGs des plus grandes entreprises américaines, tels que Jamie Dimon, PDG de JP Morgan. Durant l’un des lunchs, j’ai pu entendre un excellent discours de Scott Galloway, entrepreneur en série, professeur de marketing au Stern Business School de l’Université de New York et auteur du best-seller « The Four ».
Ce livre traite des quatre géants américains de la technologie que sont Apple, Google, Facebook et Amazon. Ce qu’il ne dit pas dans le livre, mais affirme publiquement est qu’il pense que le gouvernement devrait forcer le démantèlement de ces géants en plusieurs entités, comme ce fut fait pour la Standard Oil au début du 20e siècle. Selon lui, ces firmes ont trop de pouvoir, étouffent la concurrence et leur expansion a résulté d’une faille du marché.
Du capital presque gratuit
En 2017, la valeur marchande du capital-action de ces quatres entreprises totalisait US$2.3 billion. Pour trois de ces entreprises, le coût de ce capital est extrêmement faible car elles peuvent se permettre de ne pas faire beaucoup de profits nets. Autrement dit, ces firmes ont le loisir de réinvestir tous leurs profits bruts dans l’expérience-client, de nouvelles lignes d’affaires, le développement de nouvelles technologies ou des marges déficitaires sur certains services.
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Hormis Apple, qui est la plus mature du groupe, ces entreprises ne retournent pas de capital à leurs actionnaires sous la forme de dividendes. En revanche, les entreprises traditionnelles oeuvrant dans les mêmes créneaux telles que WalMart, Macy’s, Kroger, Time Warner, Comcast, Omnicom, WPP, et même Microsoft, ont des actionnaires qui exigent des profits nets élevés et croissants, ainsi que des dividendes significatifs.
Les Quatre utilisent aussi ce capital pour faire des acquisitions à des prix exhorbitants. Quand Amazon a annoncé l’acquisition de Whole Foods, sa valeur marchande a augmenté davantage que le coût de la transaction, alors que la valeur en bourse des épiciers américains tels que Kroger a chuté massivement. C’est comme si Amazon avait acquit Whole Foods avec l’argent de ses concurrents! Voici ce qu’en disait le PDG de Whole Foods concernant cette transaction:
Here’s where I think we’re heading: People can get anything they want, at any time they want it, anywhere they want it, at a price that they’re willing to pay.
En juin dernier, Amazon a acheté l’entreprise PillPack pour $1 milliard. Le même jour, les actions de l’entreprise de pharmacies CVS ont chuté de 10%, soit près de $7 milliards de valeur! Amazon peut détruire ses concurrents rienqu’avec un communiqué de presse.
Les Quatre utilisent aussi ce capital pour investir dans des actifs « analogues », de la vieille économie, pour renforcir leur hégémonie. Amazon achète des avions cargo, des entrepôts et des camions-remorque. Google et Facebook bâtissent d’immenses centres de données et déposent des câble au fonds de l’océan. Google a des voitures qui arpentent toutes les rues du monde. Apple ouvre des magasins luxueux pour vendre ses produits.
Les concurrents de ces entreprises n’ont pas les moyens de faire de tels investissements car leur coût du capital est trop élevé (c’est-à-dire que leurs actionnaires exigent des profits).
Amazon dépense aussi beaucoup d’argent pour être le premier résultat de recherche sur Google. D’ailleurs, Amazon est le plus gros client publicitaire de Google. Pour la recherche de produits, Amazon obtient 55% des résultats de recherche initiaux.
Ces entreprises ont donc réussi un tour de force incroyable, c’est-à-dire de convaincre les investisseurs d’être inhabituellement patients et de leur fournir du capital sans exigence de rentabilité. Elles ont utilisé ce capital pour construire d’immenses douves infranchissables autour de leur royaume.
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De mauvais incitatifs
Les PDGs des entreprises du Forbes500 empochent d’importantes rémunération. Leur bonification repose sur la croissance des bénéfices par action et le rendement de l’action. Cela fait en sorte que devant un projet d’investissement très risqué, mais qui pourrait avoir d’énormes retombées positives pour l’entreprise, le PDG va souvent dire non car en cas d’échec, il risque de perdre son emploi (et les dizaines de millions de rémunération qui vont avec). En conséquences, ces entreprises établies ne prennent jamais de gros risque pour innover.
De son côté, Jeff Bezos passes ses journées à chercher des projets d’investissements trop chers et trop risqués pour ses concurrents. En cas de succès, ces projets vont renforcir la dominance de son entreprise. En cas d’échec, les investisseurs lui accorderont un autre passe droit. Et il peut faire beaucoup de ces investissements car il n’a pas de dividende à payer et ses actionnaires n’exigent pas de rentabilité.
Les Quatre sont-ils si dominants?
En 2018, le gouvernement américain s’est opposé à la fusion entre AT&T et Time Warner, parce que cela créerait un joueur trop puissant, qui pourrait utiliser ses infrastructures de télécommunication pour favoriser son propre contenu au détriment de ses concurrents. On peut être en accord ou non avec cette vision des choses, mais cette justification est absolument risible lorsque placée dans le contexte des Quatre. AT&T et Time Warner auraient disposé de 136.5M abonnés en téléphonie et 25.1 millions abonnés à DirectTV. C’est de la petite bière à comparé aux Quatre…
De son côté, Apple peut diffuser les 40 millions de chansons et 2.2 millions d’applications de sa plateforme iTunes sur un milliard d’appareils iOS!
En publicité, Google et Facebook ont décimé leurs concurrents traditionnels que sont les agences de publicité, les journaux et réseaux de télévision. Leur capacité à adapter la publicité aux utilisateurs et de mieux les cibler fait que l’efficacité des publicités s’améliore constamment. En même temps, depuis plus de 5 ans, Google diminue ses tarifs par click d’environ 10% par année! Il est très difficile de concurrencer une firme qui baisses ses prix chaque année de manière si prononcée, en dépit d’une amélioration continue de la qualité du produit…
En 2016, Google avait une part de marché de 33% a niveau de la publicité digitale mondialement et une part encore plus élevée en Occident. Facebook se situait à 14%. Alphabet diffuse 3.25 milliards de vidéos YouTube par année, grâce à 1.2 billions de rercherches Google, et anime 2 milliards de téléphones Android.
De son côté, Facebook détient 6 des 10 applications les plus téléchargées, dont le top 5 en entier (WhatsApp, Messenger, Instagram, Facebook, FB Lite, Messenger Lite), les autres étant Wish, Snapchat, Subway Surfers et Spotify. Facebook a accès à 2.1 milliards d’utilisateurs actifs, dont 1.4 milliards sur leur smartphone.
Aux États-Unis, il y a plus de ménages abonnés à Amazon Prime que de gens qui ont un téléphone résidentiel, qui sont propriétaire d’une arme à feu, qui vont à l’église au moins une fois par mois et qui ont voté à l’élection de 2016, soit plus de 100 millions de membres.
Grâce à cet énorme réseau de distribution, Amazon a maintenant une part de marché de 44% dans le commerce en-ligne aux États-Unis. En plus de cela, Amazon est numéro un dans le marché du cloud avec une part de 33% et sera maintenant le deuxième plus grand producteur de contenu télévisuel (tout juste derrière Netflix). Ces deux entreprises produisent davantage de contenu que Disney, Fox, Universal et HBO réunis!
Avec leur capital quasi-gratuit, ces entreprises pourraient facilement détruire ce qu’il reste de la télé traditionnelle en acquérant les droits exclusifs d’événements sportifs tels que la Coupe du Monde de la FIFA, le Superbowl, les séries éliminatoires de la LNH, etc. Ils diffusent déjà des documentaires, des spectacles et des talk-shows.
Selon Scott Galloway, le prochain terrain de bataille technologique sera à travers les appareils d’intelligence artificielle vocaux, où Amazon a déjà 71% de part de marché avec Alexa et Google Home a presque tout le reste. Selon lui, Amazon utilisera Alexa pour favoriser les marques maison de Amazon, ce qui lui permettra de capturer une plus grande part des marges de commerce au détail. Il est donc probable que les marques maison d’Amazon feront très mal aux fabricants de produits de consommation courants comme les piles et le détergent à lessive (lesquels se réconfortent présentement du fait que leurs ventes sont bonnes sur Amazon, mais cela est probablement un répit temporaire).
Pourquoi les démanteler?
Galloway ne souhaite pas démanteler ces géants parce qu’ils détruisent des emplois dans plein de domaines. Selon lui, le capitalisme a besoin d’entreprises innovatrices qui détruisent des emplois et font plus avec moins de manière à enrichir la société (la destruction créatrice).
Les Quatre ne paient pratiquement pas d’impôts (du moins avant la réforme fiscale américaine), mais cela n’est pas quelque chose que Galloway leur reproche. Toutes les entreprises cherchent à minimiser leur assiette fiscale. Si les règles permettent des échapatoires, c’est au gouvernement de les changer.
Il ne pense pas non plus que leurs agissements immoraux justifient de les démanteler; comme par exemple les « fake news » diffusées par Facebook et Google, l’interférence politique Russe facilitée par Facebook, le refus d’Apple de déverrouiller les téléphones de terroristes ayant commis un attentat, l’utilisation sournoise des résultats de recherche de Google pour favoriser ses clients publicitaires. C’est encore une fois au gouvernement à les punir convenablement pour leurs délits et à exiger d’eux qu’ils corrigent le tir.
Selon lui, il faut les démanteler car nous sommes des capitalistes et que ces quatre entreprises étouffent la concurrence nécessaire au bon fonctionnement du système. Selon lui, une entreprise comme Google n’aurait pas pu émerger si Microsoft n’avait pas fait face aux autorités règlementaires il y a presque deux décennies. Microsoft aurait avalé Google bien avant que moteur de recherche ne devienne dominant, ou aurait utilisé Windows pour favoriser Bing! à la place.
Un nouvel éco-système
Il y a des années, Microsoft s’est fait taper sur les doigts parce que son fureteur Explorer était inclus dans Windows, ce qui a détruit les concurrents tels que Netscape. En ce sens, les Quatre commettent le même délit, c’est-à-dire d’intégrer leurs plateformes de manière à en extraire des synergies et tenir les concurrents hors de leur écosystème. Voici ce que Scott Galloway ferait s’il était en charge des autorités anti-monopoles.
Apple devrait se départir d’iTunes.
Facebook devrait vendre Instagram et WhatsApp.
Alphabet devrait vendre YouTube.
Amazon devrait vendre ses opérations de cloud et ses opérations de divertissement (Amazon Video et Music).
Conclusion
Personnellement, je ne suis pas en accord avec la proposition de démanteler ces entreprises. Certes, elles essaient tant que possible de contrer la concurrence avec beaucoup de succès, mais elles ne se comportent pas comme des monopolistes auprès des consommateurs. Au contraire, ces entreprises se sont taillé une place de choix dans l’économie en offrant des produits et services moins chers que ceux de leurs concurrents, et souvent même gratuits, et dont la qualité s’améliore. Plus vous utilisez Google, plus il devient meilleur et plus le coût par clic diminue.
Jusqu’à maintenant, on ne peut pas vraiment relever de comportement monopolistique de leur part. Ceci dit, il existe bien peu de challengers potentiels à ces quatre entreprises. Comme réseau social, SnapChat ne fait pas le poids et ce n’est qu’une question de temps avant que Facebook le fasse disparaître pour de bon en intégrant les mêmes fonctionnalités à ses plateformes. Inutile de parler de Twitter, qui est en déclin notoire.
Pendant combien de temps Spotify pourra résister à la pression d’Amazon Prime Music et d’Apple Music, en plus de YouTube? Au moins Netflix arrive à se démarquer en investissant massivement dans son contenu original, mais sa rentabilité est faible.
Malgré son acquisition de Jet.Com, Wal Mart est encore bien loin de pouvoir reprendre des parts de marché d’Amazon, même si à ce jour, WalMart a mieux résisté que bien d’autres détaillants à la tempête amazonienne.
Uber a une plateforme globale, mais elle ne détient pas d’actifs tangibles et son produit n’est pas différencié (comparativement à Lyft ou aux nouvelles applications des compagnies de taxis). De plus, sa réputation est mauvaise, ce qui lui attire les foudres des régulateurs et en fait une entreprise mal aimée.
AirBnB a du potentiel, mais encore une fois elle ne dispose pas d’actifs tangibles lui permettant de contrôler l’expérience-client, mais à tout le moins elle a réussi à établir une masse critique dans les marchés cruciaux, une chose difficile à reproduire. Elle fait par contre face à une règlementation grandissante.
Microsoft a quant à elle pu se réinventer en développant Azure, le principal concurrent d’Amazon dans le cloud. Windows et Office demeurent des plateformes dominantes. L’acquisition de LinkedIn a donné à Microsoft un réseau social unique et de grande qualité. Le problème de Microsoft est son coût du capital trop élevé, l’empêchant de faire des investissements à haut risque.
Mais qui sait, peut-être que le prochain rival des Quatre n’existe pas encore. Est-ce que l’écosystème actuel permettra son émergence ou sera-t-il bloqué par la domination des Quatre comme l’anticipe Galloway?
Quid de l’exemple du démantèlement de AT&T (Bell) en Baby Bells ?
Le monopole d’AT&T avait été créé de toutes pièces par le gouvernement.
Voir ceci:
https://mises.org/library/myth-natural-monopoly
Once AT&T’s initial patents expired in 1893, dozens of competitors sprung up. « By the end of 1894 over 80 new independent competitors had already grabbed 5 percent of total market share … after the turn of the century, over 3,000 competitors existed.55 In some states there were over 200 telephone companies operating simultaneously. By 1907, AT&T’s competitors had captured 51 percent of the telephone market and prices were being driven sharply down by the competition. Moreover, there was no evidence of economies of scale, and entry barriers were obviously almost nonexistent, contrary to the standard account of the theory of natural monopoly as applied to the telephone industry.56
The eventual creation of the telephone monopoly was the result of a conspiracy between AT&T and politicians who wanted to offer « universal telephone service » as a pork-barrel entitlement to their constituents. Politicians began denouncing competition as « duplicative, » « destructive, » and « wasteful, » and various economists were paid to attend congressional hearings in which they somberly declared telephony a natural monopoly. « There is nothing to be gained by competition in the local telephone business, » one congressional hearing concluded.57
The crusade to create a monopolistic telephone industry by government fiat finally succeeded when the federal government used World War I as an excuse to nationalize the industry in 1918. AT&T still operated its phone system, but it was controlled by a government commission headed by the postmaster general. Like so many other instances of government regulation, AT&T quickly « captured » the regulators and used the regulatory apparatus to eliminate its competitors. « By 1925 not only had virtually every state established strict rate regulation guidelines, but local telephone competition was either discouraged or explicitly prohibited within many of those jurisdictions. »
ces temps-ci les Baby Bells grossissent, grossissent . . .
« En 2018, le gouvernement américain s’est opposé à la fusion entre AT&T et Time Warner » enfin finalement cette fusion a été autorisé par la justice et donc elle a été faite:
https://www.ledevoir.com/economie/530144/un-juge-americain-autorise-sans-condition-la-fusion-entre-at-t-et-time-warner
(Ceci dit, le gouvernement a fait appel. Ce qui signifie que la justice en appel pourrait défaire la fusion).
En Europe, il y a une haine anti GAFA. C’est particulièrement vrai en France. J’ai l’impression que l’Europe est jalouse que les GAFA soient américaines et qu’il n’y ait pas d’entreprises européennes de ce genre. J’entends beaucoup de discours en Europe qu’il faut lutter contre leur monopole mais dès qu’on creuse on voit que ces discours cachent un protectionnisme. L’antitrust a bon dos et sert à masquer le protectionnisme. Le vrai reproche de ceux qui critiquent les GAFA n’est pas tant leur monopole que ces entreprises soient américaines.
En France, Qwant mène une campagne de lobbying anti Google. Sous prétexte de dire que Google est en monopole, cette entreprise veut obtenir des privilèges; C’est pas de la faute de Google si Qwant est un moteur de recherche merdique (je connais des gens qui l’ont utilisé avant de le virer).
La mentalité européenne est vraiment pitoyable au lieu de se questionner sur pourquoi il n’y a pas d’entreprises comme les GAFA en Europe, de pourquoi l’Europe a raté la révolution numérique on préfère sombrer dans la jalouisie (Oh les GAFA sont méchantes, elles sont en monopoles, c’est honteux).
C’est sûr qu’avec toutes les réglementations que l’on a en Europe, on est pas prêt d’avoir de telles entreprises. L’Europe ne favorise pas du tout l’innovation; Enfin, la vision européenne de l’innovation c’est l’innovation financé par l’argent public mais c’est pas du tout cela les GAFA.
D’ailleurs, c’est pas pour rien que beaucoup de francais qui créent des inventions le font à l’étranger. Le matraquage fiscal, l’ultra réglementation,….rendent impossible en France le développement d’entreprises comme GAFA.
La France est un pays de start ups mais contrairement aux USA, celles ci restent des start ups. Le seul moyen pour se développer c’est de quitter la France.
La France a décidé de mettre une taxe anti GAFA. Sans surprise, taxer le chiffre d’affaires des GAFA n’est pas un bon moyen d’imposer leur profit: https://taj-strategie.fr/content/uploads/2019/03/ccia-dst-economic-analysis-vf.pdf La taxe devrait être supportée par les consommateurs.
Outre cela, cette taxe ne va en rien pénaliser les GAFA mais par contre cela va nuire à Criteo. Comment détruire les entreprises francaises.
Aujourd’hui; l’Union européenne mène une campagne anti GAFA car l’Europe est incapable d’avoir de telles entreprises. En septembre, le parlement européen a voté une réforme des droits d’auteur qui est un scandale. En gros, cette réforme est là pour avantager les rentiers (maisons de production) et permet la censure du net. Après, les dirigeants de l’UE vont faire des beaux discours sur le fait qu’il faut favoriser l’innovation. Mais leurs actes montrent qu’ils font le contraire: ils font des réglementations qui nuisent à l’innovation et avantagent des parasites.
L’Union Européenne de manière générale va trop loin en matière de droit à la concurrence. L’intention de lutter contre les monopoles étaient louables mais quand on voit en pratique jusqu’où ils vont, il y a clairement des abus.
ET LES MONOPOLES D’ÉTAT ?
Google qui fait 4,7 milliards en 2018 sur le dos de la presse? Ce chiffre, c’est n’importe quoi. https://www.niemanlab.org/2019/06/that-4-7-billion-number-for-how-much-money-google-makes-off-the-news-industry-its-imaginary/
Pourtant, il est largement relayé par les journalistes. Cela illustre de la haine des GAFA chez certains. Les GAFA servent de boucs émissaires
Un autre danger qui est de plus en plus reproché est leur pouvoir de censure et de manipulation. Google peut carrément décider du résultat d’une élection.
En moins de 24h par exemple Alex Jones (je ne le connais pas et ne sait pas s’il est aussi pire que les médias disent, ce n’est pas le propos) fut viré de toutes les plates-formes en même temps.
Celui fait peur s’il suffit de donner un coup de fil a 4 où 5 CEO pour faire disparaître quelqu’un. La difficulté de légiférer offrait un certain niveau de protection qui n’existe plus.
C’est un autre angle d’attaque contre les GAFAM qui gagne de la traction.
La censure privée est un problème largement sous estimé par une bonne partie des libéraux qui répètent que ce n’est pas un problème tant que ça ne vient pas du gouvernement. Sauf que les auteurs libéraux classiques étaient très clairs sur le fait que, non seulement la question de la liberté d’expression ne pouvait se limiter à la censure d’État, mais qu’en fait c’était même loin d’être l’obstacle le plus préoccupant à la liberté d’expression. (Tocqueville dans De la démocratie en Amérique sur l’uniformité de pensée dans une démocratie et Mill dans On Liberty.)
La censure privée est tout aussi condamnable que la censure d’état. Prétendre que seule la censure d’état est un problème c’est non seulement nier la réalité mais c’est aussi méconnaître les classiques libéraux qui eux avaient bien compris la menace de la censure privée et de la réprobation sociale.
Un extrait de Tocqueville sur la menace du conformisme social: .https://pbs.twimg.com/media/Dq2SauoX4AAcnp2.jpg
Si l’on ne s’intéresse qu’au résultat sur la qualité du débat et la liberté d’opinion, la réprobation sociale peut être encore bien plus efficace que la censure d’État, même accompagnée de violence.
Les libéraux qui ne voient pas le problème à la censure pratiquée par les GAFA font vraiment une grave erreur. Vu la puissance des réseaux sociaux, les laisser pratiquer la censure c’est vraiment très dangereux pour la liberté d’expression. A noter que les états ont incité les réseaux sociaux (notamment Twitter) à censurer. Résultat: aujourd’hui ceux ci censurent bien plus qu’avant. Et beaucoup de ce qu’ils censurent n’est en rien justifié. Sur Twitter, certains lancent des attaquent en règle contre leurs adversaires (le signaler massivement) résultat ceux ci se retrouvent avec leurs comptes suspendus alors que c’est absolument pas justifié.
L’état n’a pas à démanteler ces entreprises par contre, il doit arrêter de leur donner des avantages fiscaux. Amazon a recu des avantages fiscaux de la part de New York et la Virgine.C’est un scandale car cela donne un avantage à Amazon par rapport aux entreprises concurrentes qui ne recoivent pas un tel avantage fiscale
https://promarket.org/subsidies-amazon-unamerican/?fbclid=IwAR2cAfKtZKaKqB8U_pxyeLvDCGOAyJy26h-IyrAC_eFnP6UtXFAIsX1ZxL8
C’est l’état qui fausse la concurrence en donnant des avantages fiscaux à certaines entreprises. Alors qu’il arrête cette pratique s’il veut préserver la concurrence
Un thread intéressant sur le fonctionnement de Facebook et les GAFA: https://threadreaderapp.com/thread/1088827739547881473.html?refreshed=yes
« de Facebook et les GAFA » Je voulais dire: de Facebook et les données personnelles
Une contribution intéressante sur le fonctionnement et l’enjeu de la régulation de l’industrie du Big data.
No, Data Is Not the New Oil: https://www.wired.com/story/no-data-is-not-the-new-oil/
Un article intéressant à lire sur le sujet https://www.ft.com/content/481cc624-8b58-11e9-a1c1-51bf8f989972?segmentid=acee4131-99c2-09d3-a635-873e61754ec6
Je me permets de mettre une traduction en francais des passages les plus intéressants selon moi:
« Il est tentant de voir Google, Amazon, Facebook et Apple comme des écosystèmes autonomes, ou des jardins clos de murs, qui ne se font pas concurrence. Sans surprise, ils ne sont pas d’accord, d’autant plus que ces entreprises qui changent de forme s’éloignent de leurs modèles d’affaires initiaux et cherchent de nouveaux domaines, tels que la santé, les services financiers et les voitures autonomes. En ce moment, Apple et Google se disputent les smartphones. Amazon et Google s’affrontent dans la recherche de produits. Facebook et Google – et de plus en plus Amazon – contestent le marché de la publicité.
Le taux de désabonnement concurrentiel dans le secteur des technologies est également frappant alors que les innovateurs inventent des pièges à souris de mieux en mieux. Le rythme du changement est tel que les monopoles technologiques abusifs durent rarement longtemps avant de devenir obsolètes. Nous ne nous inquiétons pas beaucoup des positions dominantes sur le marché des ordinateurs centraux. Seules quatre des dix plus importantes sociétés cotées en bourse au monde en 2010 figurent sur cette liste aujourd’hui.(…..)
Plus généralement, les régulateurs devront faire face à la nature changeante de la concurrence elle-même sur les marchés riches en données. Dans quelle mesure le fonctionnement même du marché a-t-il été reconfiguré par les flux de données de Big Tech?
Le BCG Henderson Institute affirme que le principal atout concurrentiel actuel est le « taux d’apprentissage ». Ici, les grandes entreprises technologiques ont un avantage intrinsèque important, étant donné qu’elles possèdent d’énormes ensembles de données propriétaires et les outils algorithmiques les plus intelligents.
Concevoir une réponse réglementaire cohérente à ces défis multidimensionnels incommodera l’esprit. Nous devons nous demander à quel préjudice spécifique nous essayons de remédier et comment les régulateurs peuvent s’assurer qu’ils n’augmentent pas les coûts de conformité par inadvertance.
Une intervention peut encore être justifiée dans plusieurs domaines. Mais tant que ces deux questions ne seront pas clairement résolues, il vaudra peut-être mieux ne rien faire. »
Voici un autre exemple d’un produit Big Tech qui s’effondre malgré l’accès aux données, au réseau d’utilisateurs et à l’argent qui, selon certains, permettent aux grandes entreprises de «tirer parti» de leur avantage concurrentiel pour dominer d’autres marchés. https://techcrunch.com/2020/07/01/lasso-facebook-tiktok-shut-down/?guccounter=1&guce_referrer=aHR0cHM6Ly90LmNvL0xwS21ObnpJRFE_YW1wPTE&guce_referrer_sig=AQAAAC6HBTybbzOGCY7QVBwJP62LuBCmGyK5g_F4QAiqP7t8Nrsq16aL3pW-q0rw_1k-SyQG3OjxOS15oyQ5TsYjCXptg9b-q6g7vnUGwNycXvBAuMu7T_OI6rZSCVcTFgvxOnMsCcCGD5qoE_xBD6X_xs21IplDom6SbfVLrP699hkS
Honnêtement quand on voit le rapport du comité judiciaire de la chambre des représentants sur la question antitrust c’est complètement ridicule :
https://web.archive.org/web/20201006235138/https://threadreaderapp.com/thread/1313596295580393472.html
Cela illustre juste d’une méconnaissance totale de ce secteur et des questions antitrusts.
Alors oui on peut faire des reproches aux GAFA ce qui est inquiétant c’est que l’immense majorité des cas ces reproches sont complètement pétés.
En gros on peut les résumer à »je n’aime pas les GAFA car ils sont trop puissants » sans aller plus loin. Ils ne regardent pas si les GAFA font réellement de l’abus de pouvoir et font des pratiques anticoncurrentielles.
J’avais vu l’audition de Zuckerberg par le sénat américain c’était juste pathétique. Les sénateurs ne connaissaient juste rien au fonctionnement d’internet. Je veux dire ils ne connaissaient même pas la base.
Et les journalistes c’est pas mieux. On voit clairement qu’ils crachent sur les GAFA pour cracher sur eux.
La principale raison de refuser le démantèlement/ l’ingérence du gouvernement américain sur la question c’est vraiment quand on voit l’ignorance des législateurs américains. Franchement s’ils font une loi cela ne fait aucun doute qu’elle nuira aux consommateurs et à ce secteur de l’économie tellement ces gens montrent une totale ignorance sur le sujet.
Vu l’ignorance total des politiciens américains mieux vaut qu’ils n’interviennent pas.
Google, Facebook, Amazon investissent dans le développement des technologies du futur. Ils peuvent se le permettre car ils sont puissants et riches. En cas de démantèlement, il n’y aura plus cela. Il n’y aura plus d’entreprises visionnaires pour investir bcp d’argent dans des technologies futuristes.
En tout cas plus à ce niveau.
Une dernière chose : démanteler les GAFA c’est permettre aux grandes entreprises chinoises de se développer à l’international.
Démanteler les GAFA profitera à la Chine.
Car cela affaiblira les entreprises américaines capable de rivaliser avec les entreprises technologiques chinoises
Un article intéressant sur la pratique anticoncurrentielle d’Amazon: https://www.yalelawjournal.org/note/amazons-antitrust-paradox
Noter que cet article est lui-même critiquable mais il est intéressant
Amazon est souvent considéré comme ayant un monopole sur la commerce en ligne mais en réalité, c’est faux: https://www.ben-evans.com/benedictevans/2019/12/amazons-market-share19
En comptant les chiffres, Amazon détient environ 35% du commerce électronique américain. Mais, il est également en concurrence avec les détaillants physiques – il est en concurrence avec Macy’s, Walmart et Barnes & Noble. Sur cette base, la part de marché réelle d’Amazon sur son marché cible réel est plus proche de 6% (c’est 2/3 de la taille de Walmart)
Un article en complément: https://www.ben-evans.com/benedictevans/2020/10/31/market-definitions-and-tech-monopolies
« Les avocats d’Amazon soutiendraient, tout à fait raisonnablement, qu’Amazon est en concurrence avec Walmart, Costco, Macy’s et Safeway – qu’il est en concurrence avec d’autres grands détaillants, pas seulement des détaillants « en ligne ». En effet, de nombreuses personnes qui plaident le plus fermement en faveur d’une intervention antitrust contre Amazon le font parce qu’elle est en concurrence avec la vente au détail physique – parce qu’elles s’inquiètent de ce qu’Amazon fera non seulement à Costco mais aux magasins de leur quartier. »
L’avantage concurrentiel d’Amazon réside dans sa capacité supérieure d’exécution à grande échelle. Les avantages qu’Amazon retire de la gestion d’un marché est mineur par rapport à sa capacité à mettre des idées sur le marché et à fournir un service exceptionnel.
Un exemple: Amazon compte un million d’employés de plus et en a embauché 250000 en un trimestre pour faire face à la demande croissante de leurs services en raison du COVID.
La capacité logistique de gérer autant de nouveaux employés est en elle-même extrêmement impressionnante. https://www.cbsnews.com/news/amazon-1-million-employees/
Un article vraiment très intéressant sur le démantèlement des géants de l’Internet : https://www.ben-evans.com/benedictevans/2020/8/10/would-breaking-up-big-tech-work
Spoiler : c’est vraiment une mauvaise idée de démanteler les géants d’Internet
» Selon lui, une entreprise comme Google n’aurait pas pu émerger si Microsoft n’avait pas fait face aux autorités règlementaires il y a presque deux décennies. Microsoft aurait avalé Google bien avant que moteur de recherche ne devienne dominant » cette affirmation est franchement très contestable.
Sur le sujet il faut lire ceci : https://www.ben-evans.com/benedictevans/2020/01/01/microsoft-monopoly-and-dominance
Oracle est un fer de lance dans la volonté antitrust à l’encontre de Google: https://www.techdirt.com/articles/20201224/11072345946/when-you-cant-innovate-you-litigate-oracle-gleefully-takes-credit-attacks-section-230-google.shtml
Comme Oracle est à la traine sur l’innovation, ils utilisent les armes juridiques pour obtenir des faveurs politiques