Henry Kissinger a été Conseiller à la Sécurité Nationale et Secrétaire d’État sous les administrations des présidents Richard Nixon (1968) et Gerald Ford. C’est lui qui a introduit la « realpolitik » aux États-Unis, une stratégie favorisant le pragmatisme diplomatique à l’idéologie. Kissinger a été à l’oeuvre durant la Guerre Froide et a notamment négocié l’Accord de Paix de Paris, mettant fin à l’implication américaine dans la Guerre du Vietnam, ce qui lui vallu le Prix Nobel de la Paix en 1973. Né en Allemagne en 1923, il a fui la persécution Nazi en 1938 en immigrant aux États-Unis avec sa famille. Il a été conscrit dans l’armée en 1943 et sa capacité à parler l’Allemand fut fort utile durant la seconde guerre mondiale, ce qui lui permi de mériter une Étoile de Bronze. Il obtint son doctorat en sciences politiques à Harvard en 1954.
L’idée centrale du dernier livre de Kissinger, World Order, est que le monde aurait grand besoin d’un nouvel ordre mondial, à défaut de quoi le chaos géopolitique menace de s’installer. Les bénéfices d’un tel ordre sont la promotion du libre-échange, un système financial international stable, un mécanisme de résolution pacifique des litiges internationaux et des règles limitant l’ampleur des guerres lorsqu’elles surviennent.
Dans ses propres mots:
« Dans une ère de terrorisme suicidaire et de prolifération d’armes de destruction massive, la dérive vers des confrontation sectariennes entres régions doit être considérée comme une menace à la stabilité mondiale nécessitant un effort de coopération de toutes les puissances responsables, sous la forme d’une définition acceptable d’un ordre au moins régional. Si un tel ordre ne peut être établi, de vastes régions risquent de s’ouvrir à l’anarchie et à des formes d’extrémisme qui vont se répandre organiquement vers d’autres régions. »
Selon lui, aucun ordre mondial global n’a jamais vraiment existé, mais ce qui s’en est le plus rapproché est le Traité de Westphalie, qui concerna une vingtaine de nations d’Europe de l’Ouest il y a environ 4 siècles.
Lourdement éprouvés par la Guerre de 30 ans de 1618-48 et ses centaines de milliers de morts, les pays Européens ont alors décidé de conclure un pacte qui mettrait fin aux hostilités et maintiendrait la paix à long terme. Cet arrangement reconnaissait qu’il était impossible pour tous ces pays de s’entendre sur une idéologie ou des valeurs communes. Il leur fallait plutôt user de pragmatisme pour en arriver à un accord légitime visant un équilibre des pouvoirs.
On pourrait résumer les termes de cet accord en cinq principes (ici):
- Respect mutuel de l’intégrité territoriale et de la souveraineté.
- Non-agression mutuelle.
- Non-interférence mutuelle dans les affaires des autres.
- Égalité entre les pays.
- Co-existence pacifique en respect de la structure politique, des valeurs et de la religion de chacun des pays.
Ce traité ne permettait pas l’existence d’une autorité supranationale qui imposerait sa loi dans un pays pour des raisons idéologiques, géo-stratégiques, économiques ou encore religieuses (pensez à l’Union Européenne comme exemple d’une telle entité).
Le concept d’équilibre des pouvoirs est au coeur de cet accord. Ce concept implique que la sécurité nationale est mieux assurée quand la capacité militaire est distribuée de manière à ce qu’aucun pays ne puisse dominer tous les autres. Un exemple d’application de ce concept fut certainement l’Angleterre du 16e siècle, qui a agit de manière à préserver l’équilibre des forces entre l’Espagne et la France, de façon à ce qu’aucune des deux puissances ne puissent conquérir le continent en entier.
Les États-Unis ont changé la donne…
Les premières incursions américaines en politique étrangère furent une alliance avec la France, une guerre contre l’Angleterre en 1812, puis la fameuse « Doctrine Monroe » formalisée en 1850, dont l’objectif était d’empêcher les puissances de « l’ancien monde » (surtout l’Espagne) de conquérir les nouvelles nations indépendentes d’Amérique Latine.
Theodore Roosevelt y ajouta son corolaire en vertu duquel les États-Unis allaient jouer un rôle actif pour préserver la paix dans la région, incluant l’interventionnisme dans les affaires domestiques de ces pays, ce qui constitua l’une des premières phases de l’impérialisme américain. Il croyait que la neutralité et l’isolationnisme n’étaient pas une bonne stratégie pour préserver la paix mondiale. Kissinger affirme que Theodore Roosevelt serait pratiquement le premier et le dernier président américain à avoir appliqué les principes sous-jacents au Traité de Westphalie dans les relations diplomatiques.
Un exemple de cette application fut le Traité de Portsmouth, négocié par Roosevelt en 1905 pour mettre fin au conflit russo-japonais. Plutôt que de favoriser son semblable idéologique (qui était à l’époque la Russie) et d’infliger des pertes au Japon, il a plutôt cherché l’équilibre entre ces deux puissances, en s’assurant de limiter l’expansion du Japon tout en prévenant l’effondrement de la Russie. Ces deux puissances allaient conséquemment se modérer l’une et l’autre, préservant la paix. Cette médiation lui vallut d’ailleurs le Prix Nobel de la Paix.
Plus tard, lorsque le Japon commença à se faire plus menaçant, plutôt que d’adopter une stratégie agressive envers ce pays, Roosevelt a plutôt choisi d’organiser une croisière mondiale de la marine militaire américaine constituée d’une flotte de 16 navires de guerre peints en blanc en signe de paix (la « Great White Fleet« ). Cela allait rappeler aux Japonais de manière pacifique que les États-Unis avaient les moyens de leurs ambitions en ce qui concernait leur volonté à préserver l’équilibre des pouvoirs mondiaux; dans l’esprit du proverbe préféré de Roosevelt: “speak softly and carry a big stick.”
Les choses changèrent sous Woodrow Wilson, qui proclama que les États-Unis devaient en quelque sorte répandre la liberté et la démocratie avant tout. Cette théorie veut que si un pays est démocratique, il risque moins de devenir un agresseur et de sombrer dans une guerre totale. Cette perspective fut motivée par le début de la première guerre mondiale, laquelle résultait d’un dérapage de relations diplomatiques et d’alliances.
Wilson promulga donc une nouvelle vision de l’ordre mondial rejetant les principes de Westphalie, laquelle allait demeurer l’épine dorsale de la politique étrangère américaine jusqu’à nos jours. La vision américaine de l’ordre mondial implique que les principes et valeurs américaines (liberté et démocratie) sont applicables au monde entier de manière universelle, sans compromis et surtout sans égard à l’équilibre des pouvoirs.
Pourtant, comme l’indique Kissinger, les pays qui sont entrés en guerre en 1914 avaient toutes des institutions démocratiques ayant plus ou moins d’influence, même l’Allemagne dont le parlement était élu par suffrage universel.
Néanmoins, le Traité de Versailles et la Ligue des Nations, deux résultats de la vision wilsonnienne de l’ordre mondial, allait s’avérer d’énormes échecs. La Ligue des Nations par exemple, fut fondée sur des principes moraux plutôt que sur l’équilibre des puissances, une bien fragile fondation… Cette entité allait s’avérer complètement impuissante face au démembrement de la Tchécoslovaquie, à l’attaque italienne en Éthiopie, à la dérogation au Traité de Locarno par l’Allemagne et à l’invasion japonaise de la Chine. Selon Kissinger, l’OTAN arbore aujourd’hui les mêmes faiblesses.
Depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, en quête de cette nouvelle vision « idéaliste » de l’ordre mondial, les États-Unis ont participé à cinq guerres auxquelles le public a graduellement tourné le dos, au point où lors de trois d’entre elles, les États-Unis ont dû se résoudre à un retrait inconditionnel et unilatéral. Kissinger insinue que ces échecs montrent l’impossibilité d’imposer le système occidental à ces nations par la force.
Pessimiste quant à l’avenir…
Kissinger est inquiet concernant le futur de l’ordre mondial. D’un côté, la Chine rejète le rôle qui lui a été attribué par un système international auquel elle n’accorde pas de légitimité. De l’autre, les États-Unis sont affaiblis et sont réticents à assurer l’équilibre des puissances de manière à ce que les forces géopolitiques ne dérapent pas. Il craint que ce « power vaccum » ne mène au chaos.
La solution qui lui apparaît évidente serait un retour aux principes du Traité de Westphalie, qui a assuré la paix en Europe pendant si longtemps, même si cela implique de tolérer des régimes que nous n’approuvons pas.
Selon Kissinger, les menaces contemporaires à l’ordre mondial sont les groupes non-étatiques (comme ISIS ou Al Quaida par exemple) et les cyber-attaques. Ces deux types de menaces changent radicalement la manière avec laquelle les relations diplomatiques doivent être gérées et l’ordre mondial maintenu.
Conclusion
Les libertariens ont des opinions partagées quant à la politique étrangère approriée, et particulièrement en ce qui concerne les États-Unis, que certains considèrent comme la « police du monde ». Certains préconisent un interventionnisme militaire restreint, alors que d’autres, comme Ron Paul, sont en faveur d’un non-interventionnisme total.
Il est possible de concilier cette dernière vision avec les principes de Westphalie préconisés par Kissinger, à l’exception du fait que Ron Paul refuserait même de conclure un tel traité, voire même de maintenir un coûteux réseau d’ambassades et de consulats à l’aide desquels la diplomatie est conduite.
Ron Paul rappelle que les Pères Fondateurs tels que Washington et Jefferson favorisaient une politique étrangère prescrivant aux États-Unis de se tenir hors des affaires internes des autres nations ainsi que des alliances stratégiques contraignantes. Il rappelle aussi que c’est le Congrès qui a le pouvoir de déclarer une guerre, pas le Président.
Selon Ron Paul, des pays comme la Corée du Sud, le Japon et plusieurs pays européens sont suffisamment riches et développés pour se défendre eux-mêmes. Ils n’ont pas besoin de présence américain en leur sol, laquelle incite ces pays à ne pas prendre leur défense en main et à se fier sur les contribuables américains. Quant à la menace terroriste en provenance des pays Islamiques, ces attaques ont tué beaucoup moins d’Américains que les réactions allergiques aux arachides ces 10 dernières années…et les 10 précédentes aussi. Cette menace est donc fortement exagérée.
Il faut aussi se souvenir que, curieusement, Kissinger a soutenu les interventions militaires en Irak. En quoi cela était-il en ligne avec les principes de Westphalie? Kissinger a bien du mal à l’expliquer… Et que dire du rôle joué par les États-Unis et Kissinger lors du coup d’État au Chili en 1973 (ici)? Il semble qu’à ce moment, la victoire idéologique était plus importante que le principe de non-interférence.
Personnellement, je préconise une politique étrangère neutre et non-interventionniste et une force militaire centrée sur la défense des frontières. Pas d’ONU, pas d’OTAN, pas d’ambassades ni de consulats, pas de bases en sol étranger, pas de sanctions économiques, pas de douanes.
Notez que la dernière édition du magazine Reason comporte une section spéciale de cinq articles sur le sujet de l’interventionnisme militaire américain du point de vue libertarien, incluant des entrevues avec Ron et Rand Paul.
Articles connexes:
https://minarchiste.wordpress.com/2014/09/26/quest-ce-quun-pays/
https://minarchiste.wordpress.com/2013/04/26/les-grandes-guerres-collectivistes-du-20e-siecle/
Critiques du livre:
http://www.telegraph.co.uk/culture/books/11092958/Henry-Kissingers-World-Order-review.html
Ce Monsieur Kissinger essaie sans doute de se peindre plus vertueux qu’il ne l’est en réalité. J’avais remarqué quelque chose de tel dans son livre the White House Years. Vous faites bien d’aborder l’épisode Allende/Pinochet, c’est peu reluisant. C’est la première fois que je laisse un commentaire sur votre blog, et je souhaite vous féliciter c’est phénoménal le travail que vous y avez consacré, les dossiers sont fouillés, c’est bien rédigé et on y apprend énormément.
Bravo et merci, je souhaite tout lire maintenant…. In Vino Veritas!
@Richard Sagala
Merci pour le commentaire.
Cet article était le 430e de l’histoire du blogue, vous aurez donc pas mal de lecture à faire durant la période des fêtes!
Au plaisir.
En effet, la stabilité mondiale se dégrade à une vitesse grand V.
Est-ce que ça s’est rétabli ?
« Et que dire du rôle joué par les États-Unis et Kissinger lors du coup d’État au Chili en 1973 » Je trouve absurde de reprocher aux usa d’avoir soutenu Pinochet. Allende était soutenu par l’URSS et voulait créer une dictature du prolétariat. Il est normal que les USA ait soutenu Pinochet. Ne pas le soutenir aurait été idiot. Le choix n’était pas entre la démocratie et une dictature militaire mais entre une dictature du prolétariat et une dictature militaire. Pour moi, le choix est vite fait. Le principal responsable du coup d’état c’est ALlende lui même qui a mené une politique sectaire et antidémocratique. De plus, il ne faut pas exagérer le rôle des USA. Sans les USA, le coup d’état aurait été fait et aurait réussi. Rappelons que c’est le parlement chilien qui a appelé à l’armée à intervenir contre Allende. Les USA n’ont pas provoqué le coup d’état, ils ont juste aidé Pinochet. Mais il ne faut pas exagérer l’influence des usa dans ce coup d’état.
Le chili était au bord de la guerre civile (manifestations, greves,….) à cause de la politique sectaire et antidémocratique d’Allende.Quelques mois avant la chute d’Allende, le sénateur communiste Volodia Teitelboim pronostiquait entre 500.000 et un million de morts en cas de guerre civile. l’armée a fait le coup d’état à cause de l’infiltration de mouvements d’extrême gauche dans l’armée. Sans Pinochet, il y aurait eu une guerre civile
dans la vie, il faut assumer les conséquences de ces actes. le 4 mai 1973, l’opposition au gouvernement d’Allende a raté de peu la majorité des deux tiers à la chambre (qui lui aurait permis de passer outre les vetos présidentiels) et au sénat (qui lui aurait permis de destituer le président) car il y a eu des fraudes massives organisé par allende. si allende avait respecté le processus démocratique, il n’y aurait pas eu de coup d’état.
lisez « Pinochet, l’autre vérité » de Philippe Chesnay. la majorité des vctimes du régime de pinochet furent les chefs de la gauche, des gens qui avaient pour but de créer une dictature du prolétariat.
Lisez l’historien Pierre Vayssière spécialiste de l’amérique latine. notamment son livre « Le Chili d’Allende et de Pinochet dans la presse française : Passions politiques, informations et désinformation, 1970-2005″ qui montre l’opération de manipulation médiatique orchestré par la gauche francaise.
lisez La face cachée d’Allende: antisémitisme et eugénisme de Victor Farias, un intellectuel juif qui a aussi écrit Heidegger et le nazisme. il est aussi l’auteur d’autres ouvrages :Les nazis au Chili et La gauche chilienne: 1969-1973. le point de départ de ce livre est le refus du gouvernement d’allende d’extrader l’ex SS-Standartenführer, Walther Rauff. le célèbre « chasseur de nazi », Simon Wiesenthal était convaincu que Salvador Allende, avait délibérément protégé le responsable nazi et il a demandé des années plus tard à son ami, Victor Farias d’enquêter. la thèse de doctarat défendu par alllende Hygiène mentale et délinquance montre à quel point il était raciste et eugéniste. en tant que Ministre de la Salubrité, il se charga de présenter le projet de Loi de stérilisation des aliénés applaudi par les racistes qui est quasiment la meme chose que la Loi sur la protection de la descendance contre les maladies héréditaires du régime nazi. le fondateur du Parti socialiste chilien, Mamaduke Grove, était régulièrement « payé » par le Ministère des Affaires Etrangères nazi et que les ministres socialistes du gouvernement du Front Populaire étaient également directement « soudoyés » par l’ambassade nazi de Santiago. En 1956, Allende était-il actionnaire et directeur général de l’une des plus grandes sociétés anonymes du Chili, la Société Pelegrino Cariola.
Allende n’était pas un démocrate ( il a gracié les militants du Mouvement de la Gauche Révolutionnaire (MIR) ainsi que d’autres membres de groupes d’extrême-gauche qui avaient été emprisonnés pour faits de terrorisme qui ont repris leur activité terroriste en toute impunité, rachet des actions de la Compagnie manufacturière de Papiers et de Cartons, entreprise clé car seule productrice de papier pour les journaux, fermeture de stations de radios de l’opposition, tentative de fermeture du journal El Mercurio, la nationalisation de la maison d’édition Zig-Zag, attaques contre les journaux d’opposition El Mercurio, La Segunda, Tribuna, Mañana, etc, interdiction faite aux chaînes de télévision de l’Université catholique, Canal 13 et Canal 4, et celle de l’Université du Chili, Canal 9, assassinats politiques (Edmundo Pérez Zujovic,….). le 26 mai 1973, la Cour suprême s’adressa à Allende pour dénoncer l’intromission de l’exécutif dans le judiciaire et pointer une rupture de l’ordre judiciaire ; Allende répondra le 12 juin en déclarant que le gouvernement ne pouvait faire appliquer les décisions de justice « de manière indiscriminée » et qu’il revenait à l’exécutif de juger de l’opportunité ou non de leur application ; le 25 juin, la Cour suprême répliquera en dénonçant l’arbitraire politique du gouvernement d’Unité populaire qui réduisait à néant les droits des justiciables. le 4 mai 1973, l’opposition au gouvernement d’Allende remporta les élections législatives avec 55,6% des suffrages (87 députés et 30 sénateurs) contre 44,1% pour l’Unité populaire (63 députés et 20 sénateurs) ; l’opposition rata de peu la majorité des deux tiers à la chambre (qui lui aurait permis de passer outre les vetos présidentiels) et au sénat (qui lui aurait permis de destituer le président) ; un rapport réalisé par des professeurs de la faculté de droit de l’Université catholique et présenté le 18 juillet fera état de fraudes électorales de la part du gouvernement. Ceux-ci attiraient l’attention sur le fait que 750.000 nouveaux électeurs avaient été inscrits depuis les élections municipales de 1971 alors qu’ils n’auraient dû être normalement que 500.000. Le rapport décrivait également les énormes disparités dans les augmentations de nouveaux électeurs selon les circonscriptions. Il signalait par ailleurs des cas de fraudes avérés à Santiago ou Coquimbo (carnets d’électeurs ne correspondant pas aux personnes ayant voté, centaines d’électeurs inscrits le dernier jour au même domicile, etc.) Le rapport concluait : « lors des élections parlementaires de mars a eu lieu une fraude électorale de grandes proportions, qui concerne entre 200.000 et 300.000 votes illégaux ». le 23 aout 1973, la Chambre des députés approuva, par 81 voix contre 47, un projet d’accord présenté la veille accusant le gouvernement d’Allende d’avoir violé la légalité, de viser à s’emparer de la totalité du pouvoir afin d’instaurer un système totalitaire, en opposition absolue avec la constitution chilienne ; dans cet accord, les parlementaires chiliens demandaient au président de la République, mais aussi aux forces armées et aux carabiniers de mettre fin aux agissements illégaux du gouvernement d’Unité populaire qui mettent en péril l’ordre constitutionnel et légal du pays.
llende n’était un rien un modéré son but était une dictature du prolétariat, c’était un fervent marxiste. « Notre stratégie écarte de fait la voie électorale comme méthode pour atteindre notre objectif de prise du pouvoir. » « Nous affirmons que c’est un faux dilemme que de se poser la question si nous devons prendre la ‘voie électorale’ ou la ‘voie insurrectionnelle’. » (21e congrès général du Parti socialiste, Linares, 1965) « Le Parti socialiste, comme organisation marxiste-léniniste, pose la prise du pouvoir comme objectif stratégique à atteindre […] pour instaurer un État révolutionnaire […] » ; « La violence révolutionnaire est inévitable et légitime. […] Elle constitue l’unique chemin qui mène à la prise du pouvoir politique et économique, et à sa défense et renforcement » ; « « Seule la destruction de l’appareil bureaucratique et militaire de l’État bourgeois peut consolider la révolution socialiste » ; « Les formes pacifiques ou légales de lutte (revendicatrices, idéologiques, électorales, etc.) ne conduisent pas par elles-mêmes au pouvoir. Le Parti socialiste les considère comme des instruments limités d’action, intégrés au processus politique qui nous emmène à la lutte armée. » (22e congrès général du Parti socialiste, Chillán, 1967). en 1972, le sous-secrétaire général du parti socialiste, Adonis Sepúlveda Acuña rappelait que l’insurrection révolutionnaire restait bien l’objectif final des socialistes chiliens : « Notre stratégie met, de fait, de côté la voie électorale comme méthode pour atteindre notre objectif de prise du pouvoir. » « […] s’il s’agit de répondre à la question de savoir s’il est possible de conquérir le pouvoir par la voie électoral, c’est-à-dire l’instauration d’un gouvernement ouvrier qui exproprie les moyens de production de la bourgeoisie, pour organiser une société socialiste, sans aucun doute possible, aussi bien l’histoire du mouvement ouvrier que les principes marxistes indiquent clairement que cela n’est pas possible et qu’une politique de cet ordre ne sert seulement qu’à semer de fausses illusions auprès des travailleurs. » « Le parti a un objectif, et pour l’atteindre il devra employer les méthodes et les moyens que la lutte révolutionnaire rendra nécessaires. L’insurrection devra être déclenchée quand la direction du mouvement populaire sentira que le processus social qu’elle a elle-même lancé aura atteint sa maturité et qu’elle se prépare à être l’accoucheuse de la révolution. »
S’offusquer de l’intervention de la cia au Chili est ridicule quand on connaît l’intervention de L’URSS et de Cuba dans ce pays sous allende. Allende était aidé par l’urss et Cuba. Il y avait des milices cubaines qui aidait allende. Normal que la cia intervienne. C’est plus que légitime. La cia n’a pas déclenché le coup d’état elle a juste aidé pinochet. Le coup d’état aurait réussi sans l’aide américaine. Ce qui a déclenché le coup d’état c’est la déclaration du parlement Chilien qui a demandé à l’armée d’intervenir contre allende en raison de son attitude dictatoriale. La majorité des parlementaires chiliens travaillaient pour la cia ????
« L’expérience du docteur Allende a échoué parce que sa coalition d’Unité Populaire, dominée par les socialistes et les communistes, a tout fait pour installer au Chili un système socialiste radical auquel était farouchement opposée plus de la moitié de la population. Il avait été élu en 1970 avec seulement 36,3% des voix, à peine 39.000 votes de plus que son concurrent conservateur arrivé en deuxième place. Lors des élections législatives du début de cette année, l’Unité Populaire n’a seulement obtenu que 44%. Pourtant, en dépit d’un parlement dominé par l’opposition, souvent en méprisant les tribunaux et face au chaos économique et à une inflation qui faisait rage, le régime a continué de « réquisitionner » des entreprises, grandes et petites. Ces actions ont polarisé le Chili comme jamais auparavant, provoquant une opposition tous azimuts, non seulement de la part du riche ou d’une frange fasciste, mais bien de la classe moyenne qui représente la moitié de la population et qui se voyait affronter sa propre destruction. Si le docteur Allende avait progressé de manière plus réfléchie, s’il avait fait une pause pour consolider après la nationalisation des industries de base du Chili et posé des limites raisonnables à son programme socialiste, il aurait probablement terminé son mandat avec de grandes chances de succès. » new york times
L’étude des chiffres macro-économiques illustrent l’ampleur du désastre économique provoqué par la gestion du gouvernement Allende : baisse du PIB qui se retrouve en 1973 pratiquement au même niveau que 1970 (-1,21% en 1972 et -5,57% en 1973) ; indice des salaires réels chutant de 45% durant la même période ; pouvoir d’achat chutant de 10% d’octobre 1970 à avril 1973 sur base des prix alimentaires ; investissement brut dégringolant à 15% du PIB contre une moyenne de plus de 21% entre 1965 et 1970. Dans le même temps, les dépenses publiques passeront de 13% du PIB en 1970 à 53% en 1973 avec un déficit budgétaire sautant de 39% des recettes de l’État en 1970 à 115% en 1973 (de 2,7% du PIB en 1970 à 24,7% en 1973). De leur côté, les entreprises publiques cumuleront plus d’un milliard de dollars de pertes.
Les déséquilibres économiques provoqueront l’explosion des importations qui s’envoleront de 956 millions de dollars en 1970 à près de 1,5 milliard en 1973, alors que la valeur des exportations stagne (sauf en 1973, grâce à un boom du prix du cuivre sur les marchés internationaux). La balance commerciale excédentaire de 155,9 millions de dollars en 1970 devint déficitaire de 16,3 millions en 1971, 253,4 millions en 1972 et 138,3 millions en 1973. Parallèlement, la dette extérieure augmentera de 500 millions de dollars entre 1970 et 1973. Le tout encadré par de rigides barrières douanières qui interdisaient l’entrée de pas moins de 300 produits au Chili et des tarifs douaniers pouvant grimper jusqu’à 750%, avec une moyenne de 105% en 1973. De même, on comptera pas moins de 15 taux de change différents, avec un ratio entre le plus bas et le plus élevé excédant les 8.000% !
Plus dramatique encore : le déchaînement de l’inflation et l’établissement d’un plafonnement des prix qui, au lieu de juguler l’augmentation des prix, créera des ruptures dans l’approvisionnement et conduira à l’hyperinflation. De 28% en 1971 à 606% en septembre 1973. Avec une monnaie chilienne qui sera dévaluée de près de 1.000% face au dollar. Cette situation laissera les commerces désapprovisionnés et donnera naissance aux interminables queues devant les magasins, typiques de tout pays socialiste qui se respecte. La majorité des biens de première nécessité ne se trouvant plus qu’au marché noir. Le pays restera finalement sans réserves, ne serait-ce que pour importer les denrées les plus élémentaires. Le 6 septembre 1973, le gouvernement Allende annonçait que les réserves de farine ne pouvaient couvrir que quelques jours.