Le dilemme du tramway (ou « trolley problem » en anglais) est une expérience de pensée utilisée en éthique, en sciences cognitives et en neuroéthique qui a été décrite pour la première fois par la philosophe britannique Philippa Foot en 1967. Il vise à titiller notre côté utilitariste tout en testant nos valeurs morales.
L’exemple de base est surnommé « Spur » : un tramway hors de contrôle fonce vers cinq personnes attachées au chemin de fer. En actionnant une manette devant vous, vous pourriez rediriger le tram vers une autre piste où une seule personne est attachée, ce qui permettrait de sauver quatre vies. Le feriez-vous? Selon des sondages, 90% des gens le feraient. Mais que feraient-ils si cette personne était Barack Obama? Ou Bono? Ou Peyton Manning? Ou encore leur propre enfant? Et pour ceux qui ont répondu qu’ils ne redirigeraient pas le train, est-ce que leur réponse serait la même si au lieu de 5 personnes il y en avait 500?
Ce sont des question bien difficiles et embêtantes! Mais ces questions sont primordiales quant aux principes moraux autour desquels la société est organisée…
Spur :
Une solution possible émerge du principe de double-effet, de Saint-Thomas d’Aquin. L’action de la manette a deux effets : d’abord de sauver les cinq personnes (effet positif), puis de tuer la personne sur l’autre voie (effet négatif). Ce principe stipule que d’actionner la manette serait moralement acceptable dans la mesure où l’acte remplit certaines conditions :
- L’acte est de nature positive, ou au moins neutre.
- L’effet positif est intentionnel, alors que l’effet négatif ne l’est pas (même s’il est prévisible).
- L’effet positif découle directement de l’acte, et non de l’effet négatif.
- L’effet positif est plus important que l’effet négatif.
- Les circonstances sont suffisamment graves pour justifier l’effet négatif.
Autrement dit, actionner la manette est moralement permissible puisque l’intention n’est pas de tuer une personne, mais bien d’en sauver cinq. La mort du pauvre malheureux n’est qu’un dommage collatéral non-intentionnel de la bonne action.
En réponse à Foot, la philosophe Judith Jarvis Thomson a proposé une variante, celle de l’homme corpulent (communément appelé « fat man»). Dans ce scénario, vous devez pousser un homme corpulent en bas d’un pont sur la voie, pour que son corps arrête le tram avant qu’il ne frappe les cinq personnes attachées aux rails. Dans ce scénario, l’effet négatif est intentionnel et c’est de lui que découle l’effet positif. Même si le résultat net est le même – quatre vies sauvées – le principe du double-effet ne pardonne pas cette action. D’ailleurs, dans les sondages, 90% des gens ne pousseraient pas « fat man ».
Cependant, il est intéressant de noter que si on montre « fat man » aux gens avant « spur », le pourcentage de gens qui actionneraient la manette dans « spur » diminue! Comme si le scénario « fat man », vu son extrémisme, poussait les gens à visualiser les conséquences de leur choix et à délaisser l’utilitarisme par la suite. Par ailleurs, si on demande aux gens de faire tomber « fat man » en poussant un bouton qui fait ouvrir une trappe dans le plancher, ils sont plus enclins à le faire qu’en le poussant!
Fat man :
L’autre variante intéressante de Thomson est « Loop », dans laquelle l’homme corpulent est attaché aux rails dans une voie alternative, laquelle rejoint la voie principale juste avant les cinq personnes attachées. Dans ce cas, pour sauver ces cinq personnes, vous devez non-seulement actionner la manette pour rediriger le train dans la voie de contournement, mais en plus il est impératif que l’homme corpulent se fasse frapper par le tram pour l’arrêter, sinon le tram poursuivra sa route et tuera les cinq autres personnes. La différence avec « Spur » est que dans « Loop », on souhaite délibérément la mort de « fat man ».
Loop :
La moralité de l’utilitarisme…
En fait, votre réponse à ces énigmes dépendra certainement de l’ampleur de votre côté utilitariste. Le père de l’utilitarisme en philosophie est probablement Jeremy Bentham, qui vécu au 18e siècle. Ce dernier n’aurait pas hésité une fraction de seconde à pousser « fat man ». Pour lui, les dirigeants de la sociétés et les législateurs ne devraient être que des ingénieurs sociaux, faisant des calculs d’utilité visant à maximiser le bonheur collectif. Cette idéologie est fort dangereuse puisqu’elle fait fit des droits et libertés individuels.
En poussant l’homme corpulent, vous l’utilisez comme si c’était un objet, et non un être humain autonome. Le bien-être d’un individu ne peut être dissout dans une soupe géante de bien-être collectif; même si cela permettrait de sauver des vies et contribuerait au bien-être collectif, l’homme corpulent bénéficie de droits naturels qu’on ne peut enfreindre sans commettre de faute morale, dont notamment le droit inaliénable de ne pas être tué.
Une variante de “fat man” utilisée dans une étude de l’Université Harvard consiste à ce qu’un capitaine de l’armée vous approche et vous dise qu’il a capturé 20 rebelles alignés en peloton d’exécution et que si vous en tuez un seul à l’aide d’une carabine, les 19 autres seront libérés, alors que si vous refusez, les 20 rebelles seront tués par le capitaine lui-même. Appuyez-vous sur la gâchette?
Ma variante préférée est celle de la transplantation : dans un hôpital, cinq patients ont besoin d’un organe sinon ils mourront d’ici 24 heures : deux reins, deux poumons et un coeur. Dans la civière juste à côté, une personne est hospitalisée et inconsciente en raison d’un grave accident de moto. Devrait-on tuer cette personne pour donner ses organes aux 5 malades pour les sauver d’une mort certaine? Je vous rappelle qu’il y a présentement environ 100,000 personnes aux États-Unis qui sont sur des listes d’attente pour des dons d’organes…que répondraient-ils à cette question? Aux États-Unis seulement, 18 personnes meurent chaque jour en attente d’un don d’organe.
Ne pas agir?
Selon les réponses des gens dans les sondages, il semble pire de tuer quelqu’un que de ne pas sauver une vie. Laissez-moi vous illustrer cela par un exemple, celui de Marc et Denis, qui n’aiment plus leur femme respective au point de souhaiter leur mort. Alors que sa femme prend un bain, Marc décide de laisser tomber un séchoir à cheveux branché dans l’eau, ce qui la tue. De son côté, en se brossant les dents alors que sa femme prend un bain, Denis remarque qu’elle glisse, se cogne la tête et perd connaissance la tête sous l’eau; il ne lui porte pas secours, ce qui résulte en son décès. Quelle est la différence fondamentale entre les deux situations? Ne s’agit-il pas bel et bien de deux meurtres? Dans le cas de Marc, c’est un meurtre pas « commission » alors que dans le cas de Denis, c’est un meurtre pas « omission ». Les deux sont moralement inacceptables et comme le résultat est le même (la mort de l’épouse), l’ampleur de la faute est la même. Pourtant, l’intuition de la personne moyenne porterait à penser que le geste de Marc est plus grave que celui de Denis.
Dans nos dilemmes de tramways, pourrait-on dire que de ne pas pousser « fat man », causant la mort de cinq personnes par omission, est neutre ou pire que de le pousser, causant la mort d’une personne par commission? Si quelqu’un répond que de ne pas le pousser est moins grave, cette personne devrait aussi affirmer que Denis est moins coupable de meurtre que Marc…
Le tramway dans le vrai monde?
Les situations similaires au dilemme du tramway sont plutôt rare dans la vie de tous les jours, mais tout de même plus fréquentes qu’on ne pourrait le croire. Par exemple, pensez au Président Truman qui a ordonné les bombardements nucléaires du Japon pour, en théorie, épargner des milliers de vies de soldats Américains? (Je mentionnerais que le chiffre de 500,000 vies sauvées avancé par Truman était largement exagéré par plus de 10 fois, voir ceci, alors que le nombre de civils tués excède largement les 200,000).
En effet, dans la vraie vie, les « jonctions-en-T » sont peu fréquentes. Il y a généralement plus de deux options et aussi plus d’incertitudes quant aux conséquences de nos décisions. Ceci dit, les dilemmes moraux similaires au « trolley problem » peuvent survenir.
Le 25 juillet 1884, le capitaine Tom Dudley a poignardé, tué et mangé un de ses subordonnés, mais ne fut condamné qu’à 6 mois de prison. Pourquoi? La victime était un marin inexpérimenté de 17 ans nommé Richard Parker (qui a peut-être inspiré le nom du tigre dans Histoire de Pi de Yann Martel?). Leur yacht, la Mignonette, a fait naufrage près du Cap-de-Bonne-Espérance un 5 juillet, et l’équipage s’est retrouvé dans un radeau de sauvetage. Au bout d’un certains temps, le jeune Parker serait tombé dans le coma, se mourant en raison de son manque d’eau et de nourriture. Dudley a décidé de le tuer vers le 24 juillet pour que les trois autres puissent le manger, ce qui leur sauva la vie. Ils furent retrouvés en mer le 29 juillet. Leur sentence initiale fut la peine de mort pour meurtre, qui fut réduite à 6 mois de prison par le Secrétaire d’État (la cour avait refusé la défense de « meurtre par nécessité » qui était pourtant supportée par l’opinion publique). Un tel meurtre était-il justifiable moralement, considérant que Richard Parker serait mort de toute manière?
En 2000, une femme nommée Rita Attard du Malte a donné naissance à des jumelles liées à la naissance. Les médecins ont déclaré que les jumelles allaient tous deux mourir à moins qu’une chirurgie ne soit effectuée, mais que la chirurgie allait tuer l’une des jumelles. Les parents ont refusé la chirurgie, mais un jugement de la cour l’imposa. La chirurgie eut donc lieu et comme prévu, la mort de l’une des jumelles permit à l’autre de vivre une vie normale. Était-ce une décision moralement acceptable?
Suite à l’ouragan Katrina qui a balayé la Nouvelle-Orléans en 2005, des membres de la US National Guard relataient qu’à certains moments, ils devaient choisir entre sauver une famille de deux personnes réfugiées sur un toit de maison et une famille de six sur le toit voisin.
Dans le même ordre d’idées, est-ce que la torture d’un criminel ou d’un terroriste pourrait être acceptable si cela permettrait de sauver des vies? Prenons l’exemple de l’enlèvement de Magnus Gäfgen, qui a kidnappé un bambin de 11 ans en échange d’une rançon, le tout survenu en Allemagne en 2002. La police l’a intercepté alors qui ramassait la rançon et, croyant que le petit était en danger, la police a menacé Gäfgen de torture s’il refusait de révéler où se trouvait l’enfant. Ce dernier céda, mais malheureusement l’enfant était déjà mort. Ce cas engendra tout un débat quant à la légalité de l’utilisation des menaces de torture par la police. Était-ce justifiable si cela avait pu sauver la vie d’un innocent garçon de 11 ans?
Conclusion
Quand Philippa Foot a introduit le dilemme du tramway, c’était pour intervenir dans un débat au sujet de l’avortement : peut-on éliminer une vie humaine au stade de fœtus simplement parce que cela fait l’affaire de la mère et de la société? Considérez l’exemple du violoniste proposé par Thomson dans son article « A Defence of Abortion ».
Vous vous réveillez un matin dans un lit d’hôpital à côté d’un violoniste inconscient très célèbre. Il souffre d’une défaillance rénale qui pourrait être fatale. Ainsi, ses reins ont été connectés aux vôtres à votre insu ce qui fait en sorte que vos reins traitent son sang en plus du vôtre. Il mettra 9 mois à guérir, après quoi il pourra être débranché. Si vous le débranchez prématurément de votre corps, il mourra en quelques minutes. Seriez-vous alors criminellement responsable de sa mort? J’aurais tendance à dire que non : c’est la maladie qui tuera ce violoniste, pas moi. Ce que Thomson insinue est que dans le cas d’un avortement, la mort du fœtus résulte d’une « interruption de service » du côté de la mère lorsque ce dernier est extirpé de son utérus. Lors de l’avortement, la mort du bébé ne résulte pas d’un acte direct de la mère, mais plutôt de la fin de l’acte d’incuber le fœtus.
Ceci dit, l’autre application de ce dilemme éthique concerne la légitimité de l’interventionnisme étatique. Le gouvernement a-t-il la légitimité d’enfreindre les droits de propriété privés dans la poursuite du bien-être collectif de la société? Autrement dit, le gouvernement peut-il moralement actionner la manette ou encore pousser l’homme corpulent de façon à maximiser les gains et minimiser les pertes de la collectivité? A-t-il le droit d’utiliser la force pour diminuer le bien-être d’un individu contre son gré de manière à augmenter le bien-être total de la société?
Si vous répondez non à ces questions (ce qui est mon cas), cela signifie-t-il que vous n’agiriez pas dans les dilemmes du tramway et que vous laisseriez les cinq personnes crever?
Ma façon de résoudre les dilemmes de tramways est de me mettre à la place du pauvre bougre qui doit mourir pour sauver les cinq personnes. Serais-je prêt à sacrifier ma vie pour sauver cinq inconnus? Ma réponse est non : ma vie a plus de valeur à mes yeux que cinq vies d’inconnus (peut-être parce que je ne suis pas religieux et presque athée). Ainsi, je me sens pas en droit d’imposer à un autre un sacrifice que je ne serais même pas prêt à faire moi-même. Par ailleurs, dans le cas de « fat man », si ce dernier voulait vraiment se sacrifier pour devenir un héros, il aurait la possibilité de le faire de son plein gré. J’estime ne pas avoir la légitimité de le forcer à le faire. Est-ce que Jeremy Bentham se serait lancé sur la voie sans hésiter pour sauver cinq vies? Peut-être bien, mais on peut en douter…
En revanche, dans le cas du peloton d’exécution mentionné ci-haut, je tirerais volontiers sur une personne au hasard pour en sauver 19, car si j’étais moi-même l’un de ces 20 prisonniers, je souhaiterais que le tireur tue l’un d’entre nous pour sauver les autres, car une chance de 5% de mourir est moins élevée que de 100% dans l’autre cas. Mais en aucun cas je ne forcerais une personne à mourir pour donner ses organes. Dans le même ordre d’idées, Harry Truman est un criminel de guerre et Tom Dudley un meurtrier.
Article connexe : https://minarchiste.wordpress.com/2013/11/28/est-ce-que-limpot-et-la-redistribution-sont-moralement-justifiables-la-vision-de-john-rawls/
Pour approfondir le sujet, je vous recommande cet excellent livre :
“Would You Kill the Fat Man?: The Trolley Problem and What Your Answer Tells Us about Right and Wrong”, par David Edmonds.
Excellent article et j’ajoute, au risque de paraître thuriféraire, comme d’habitude.
J’ai cela dit 2 questions:
1) Imaginez que vous êtes menacé de mort par des voyons, et vous n’avez d’autre alternative pour survivre que d’utiliser une bombe qui tuera vos assaillants mais aussi des gens innocents qui ne pouvaient rien faire pour vous aider. Peut-on actionner la bombe et considéré qu’il s’agit un dommage collatéral du fait de l’action positive qu’est la garantie de votre survie?
2) Au sujet de l’avortement je ne suis pas sûr d’avoir bien compris. Donc en fait une femme peut faire à tout moment un avortement (ou du moins avant que le foetus soit devenu un être > PS: j’ignore le terme exact, je crois juste savoir qu’après un certain laps de temps durant la grossesse on considère que le foetus n’est plus une « chose », mais un être à « proprement » parlé) car l’on part du principe que son corps a été « occupé » sans son consentement?
Merci d’avance et continuez votre excellent travail!
@André
Pour votre première question, je n’actionnerais pas la bombe. Je ne crois pas que ce soit moralement acceptable en vertu du principe de non-agression.
Pour votre deuxième question, je ne suis malheureusement pas un expert en la matière, donc je m’abstiendrai d’en dire plus. Je voulais simplement souligner que le dilemme du tramway a des implications concernant le débat sur l’avortement.
Très intéressant (comme d’habitude).
Au sujet de la bombe atomique, c’est d’autant plus vrai (que Truman est un criminel de guerre) qu’il lui suffisait de ne pas réclamer une reddition inconditionnelle.
Toujours aussi intéressant vos articles, et surtout vos questions.
« Le gouvernement a-t-il la légitimité d’enfreindre les droits de propriété privés dans la poursuite du bien-être collectif de la société? »
On ne peut pas appliquer le dilemme du tramway à un gouvernement. C’est à cause de la nature subjective de toute organisation humaine, de tout gouvernement, entreprise, club, tribu, famille…
L’idée est qu’une organisation humaine devrait idéalement toujours agir de manière neutre et non-violente. Quand vient le temps d’agresser (ou de favoriser), deux situations sont à distinguer. 1- Le groupe agit par rapport à un groupe ou un individu externe à lui-même. 2- Le groupe agit sur un sous-groupe ou un individu interne à lui-même.
Le cas 2 doit être limité par la règle d’or des organisations: quand une organisation humaine interagit de manière non neutre avec une de ses composantes (un sous-groupe ou un individu), il faut alors cesser de considérer l’organisation humaine comme un ensemble et plutôt aller vers le cas 1 où un sous-groupe interagit avec un autre sous-groupe.
Donc quand un joueur voit deux coéquipiers en position de marquer, il choisira de faire une passe en fonction de ses préférences personnelles et non dans l’esprit d’équipe.
Dans le dilemme du tramway, un père de famille qui devait choisir entre laisser 1 enfant mourir pour sauver 5 autres de ses enfants ne choisirait de laisser son enfant mourir qu’en fonction de l’utilité personnelle qu’il vit de sa famille. S’il aime tous ses enfants de manière égale, il est difficile d’envisager qu’il laisse filer le tramway tout droit par pure conviction morale.
Le dilemme du tramway où il faut choisir entre 1 inconnu et 5 inconnus est d’abord tronqué. Dès que l’observateur prend conscience de la scène, il peut perçevoir que la personne attachée seule est une femme et que les 5 sont des hommes, introduisant immédiatement une potentielle variable de préférence complètement personnelle à la personne. Les préférences peuvent également s’exprimer sur l’âge, la tenue vestimentaire… peut-être que l’intensité des cris désespérés de la personne attachée seule inciteront l’observateur à sacrifier les 5 qui sont anesthésiés.
Pour être neutre, il faut soit être dépourvu de préférences personnelles, soit être dépourvu d’information qui éveille une préférence, ou soit être contraint à la neutralité par un observateur tiers. Un tiers surveillant, un Dieu-juge à qui on ne peut rien cacher, capable de lire les pensées et de juger de manière ultime pourrait effectivement contraindre l’observateur à étouffer ses désirs et préférences et à agir de manière neutre.
C’est là que l’organisation humaine trouve son essence: le partage d’information et la transparence forment un Dieu-Juge collectif qui assure la neutralité de ceux qui contrôlent l’État.
On observe que l’État créé des défaillances de gouvernement, sombre dans le capitalisme de connivences et agresse sa propre population quand un sous-groupe de la population réussit à prendre le contrôle de la confidentialité des affaires publiques. La lutte des classes n’est plus une affaire de bourgeoisie, c’est une affaire d’information, de connivences et d’ignorance.
Petite question concernant votre conclusion.
Dans le cas du peloton d’exécution, vous dites que vous tireriez sur une personne au hasard. Et selon votre raisonnement concernant le fat man, si le capitaine désignait le prisonnier à abattre pour sauver les autres, alors là vous préféreriez ne pas l’exécuter et les laisser tous mourir.
C’est une approche intéressante que de refuser de faire des choix. C’est comme si on laissait toutes les responsabilités morales au destin.
Alors si dans le cas du peloton d’exécution, le pauvre prisonnier qui allait se faire fusiller était tiré au sort avec un partage inégal des probabilités, disons 1 chance sur 40 pour 19 prisonniers et 21 chances sur 40 pour le dernier, accepteriez-vous aussi de « tirer au hasard »?
Selon toute logique, il faudrait accepter uniquement si le seuil de probabilité était parfaitement égalitaire.
Mais si le pauvre prisonnier qui allait se faire fusiller était tiré au sort avec un partage presque égal des probabilités, disons 0.9999 chance sur 20 pour 19 prisonniers et 1.0001 chances sur 20 pour le dernier, accepteriez-vous aussi de « tirer au hasard »?
À partir de quel seuil d’inégalité probabiliste accepteriez-vous de tirer au hasard?
Une chose qui nous rend humain, c’est qu’on a pas le choix de faire des choix.
@rlaroche
« si le capitaine désignait le prisonnier à abattre pour sauver les autres, alors là vous préféreriez ne pas l’exécuter et les laisser tous mourir. »
C’est une bonne question. Si le capitaine choisit au hasard, je pense que je tirerais.
Mais si le capitaine me demandait de tuer une personne en particulier, est-ce que je le ferais pour sauver 19 vies? Autrement dit, s’il y avait 19 personnes sur la voie de gauche du tramway, est-ce que j’actionnerais la manette?
En supposant que l’individu est attaché fermement et baillonné (donc il ne peut pas m’exprimer son désir)…
C’est difficile de répondre. Honnêtement, je ne prétend pas détenir la vérité sur le sujet, car il n’y en a pas.
Je pense que je ne tirerais pas. Ce serait accorder une certaine légitimité au jeu meurtrier auquel le capitaine me fait jouer. C’est lui le tueur, pas moi. Et en plus, il y a toujours un risque qu’il tue tout le monde quand même en se moquant de moi…
Au cinéma, dans ce genre de situation, le héros hésite…et puis c’est habituellement à ce moment que quelque chose survient et change la donne!
Honnêtement, j’essayerais de tuer le capitaine, par n’importe quel moyen, même si ça signifie ma probable mort.
En fait c’est un peu comme une prise d’otage dans un avion. Si le pilote ne décolle pas on tue des otages.
Pour moi la solution est simple, si le pilote décolle risque la mort de tout le monde plus des dommages collatéraux et aucune aide possible, alors il peut tuer autant d’otage qu’il veut on ne décolle pas.
Dans le passé il y a eu des cas de décollage pendant une prise d’otage, aujourd’hui ne crois que ça serait tout simplement impensable.
Votre article me rappelle énormément le jeu « Papers, please » de Lucas Pope, où le joueur incarne un douanier dans un régime autoritaire devant choisir un comportement professionnel en fonction de ses prérogatives afin de concilier sa vie professionnelle et personnelle. Cela nécessite de faire des choix moraux.
http://papersplea.se/
Bon matin,
Dans la vraie vie les principes et les relations inter-personnelles jouent beaucoup sur les décisions prises.
Ce n’est pas anodin que le jeune mousse dans le récit soit qualifié de marin inexpérimenté.
Je suis toujours surpris dans les films quand pour sauver seulement le héros on sacrifie 10 fois plus de personnes « anonymes ». Et bien souvent tout ce petit monde boit une petite coupe pour fêter ça.
J’ai revu le film Black Hawk dernièrement qui retrace un fait réel : le sauvetage de 2 pilotes d’hélicoptères s’étant crashés lors d’une intervention à Mogadiscio au nom des Nations Unies.
Bilan : 19 morts. Là on considère quand même que c’est une catastrophe.
D’un autre coté on entend souvent dire qu’on ne laisse personne derrière au nom de la solidarité et de l’esprit de groupe… personne de vivant il faudrait préciser.
@gameover
Effectivement, cela m’a fait décrocher de plusieurs films et séries, comme par exemple Prison Breaks, où des dizaines d’innocents périssent juste pour sauver la vie de Lincoln, vers la troisième saison on commence à s’en balancer royalement de ce satané Lincoln!
Ta variante préférée !
Intéressant le titre de l’article du Figaro de ce jour :
« La victime de Nantes a sauvé six vies. »
Le tueur aussi alors ?
Nul doute que ce point planera en pointillé pendant le procès aux assises. C’est involontaire certes, mais regardons le résultat.
http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2014/12/26/01016-20141226ARTFIG00038-la-victime-de-nantes-a-sauve-six-vies.php
@gameover
Très intéressant en effet.
Les utilitaristes n’auraient d’autre choix que d’applaudir le tueur!
Et si on regardait ce dilemne d’un autre point de vue? D’abord je précise que je changerai de voies dans chaque situtation et que je pousserai le gros bonhomme.
Imaginez que vous ne savez pas sur quel voie se dirige le wagon, ou alors qu’il ya autant de personnes sur les deux voies. Changeriez-vous de voie? Personnellement je le ferais, car je suis pour le changement, j’aime l’audace et les risques.
Par défaut le wagon se dirigeait sur une voie, c’est donc le hasard qui décide et est maitre de la situation. Si la personne ne fait rien, elle approuve donc le choix du hasard. Cela ne change donc rien si la personne est présente ou pas (qu’elle soit dans le wagon à ne rien faire ou autre part où elle ne peut pas influencer sur la situation, le wagon écrasera la ou les mêmes personnes). Mais dans ce cas, à quoi sert la personne? Elle n’influe pas sur la situation donc elle laisse le hasard decider à sa place.
Je pense qu’il faut changer ce qu’il y a à changer. Si une personne est présente, autant qu’elle change quelque chose. Il y a un proverbe qui dit « la seule chose qu’on rate, c’est celle qu’on ne tente pas ». De plus, tous les changements sont positifs, car les négatifs nous apprendront au moins quelque chose. Quand quelque chose change, on s’y habitue, et nombreux sont ceux qui regrettent de n’avoir rien fait alors qu’ils auraient pu faire quelque chose. On dit rarement « je regrette d’avoir fait ci ou ça » car au moins on ne le fera plus.
À la naissance de l’univers, où il n’y avait encore que le cosmos, tout suivait les lois de l’univers et tout était prévisible. Mais la vie est née, et la vie apporte de la vie :). Vous êtes probablement heureux de vivre, car le destin est imprévisible et demain sera sans doute meilleur! Quel serait l’intérêt de vivre si vous connaisseriez chaque détail de votre futur?
Pour en revenir à notre dilemne, je changerais la chose à changer dans chaque situation, car si je n’étais pas présent, le hasard fera son histoire, mais si je suis présent, ce n’est surement pas pour que le hasard écrive encore l’histoire à ma place! Je suis là et je veux changer la situation de départ mise en place par le hasard, car j’ai sans cesse le sentiment que tout changement sera productif et que ne rien faire, c’est en effet ne rien faire et laisser l’histoire continuer, alors qu’on AURAIT PU changer quelque chose, et je déteste me rappeler que J’AURAIS PU changer tout ca.
@Bo njour
L’étude de la physique quantique démontre qu’il y a en fait énormément de hasard dans le fonctionnement de l’univers. Contrairement à ce qu’Einstein pensait, Dieu joue bel et bien aux dés avec l’univers! Il y a beaucoup d’incertitude au niveau sub-atomique.
D’ailleurs, c’est probablement une fluctuation quantique aléatoire qui a causé le big bang.