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Posts Tagged ‘Goldman Sachs’

Il ne fait aucun doute, les inégalités de richesse sont inhérentes au système capitaliste. Cependant, dans un véritable système de libre-marché, les inégalités ne seraient pas si grandes que certains pourraient le croire. J’ai souvent affirmé sur ce blogue que sur un véritable libre-marché, il y aurait beaucoup moins de grandes entreprises et moins de « super-riches ». Pourquoi? Parce que c’est grâce aux largesses de l’intervention étatique que les grandes entreprises et les super-riches atteignent leur statut. L’interventionnisme étatique engendre donc des inégalités qui ne résultent pas de l’aspect « méritocratique » du système capitalisme et qui sont donc indésirables pour la société.

Pour mieux illustrer cette dynamique, j’ai décidé d’analyser les cas de quelques uns des individus les plus riches de la terre selon le Palmarès de Forbes et de vous démontrer de quelle façon ils ont bénéficié de l’interventionnisme étatique pour arriver à leurs fins. Notez bien que je ne m’oppose pas du tout à l’existence de riches entrepreneurs, au contraire ceux-ci créent de la richesse et apportent beaucoup à la société. D’ailleurs, en fouillant un peu dans leurs histoires, on constate que la plupart sont de brillants entrepreneurs. Cependant, en grattant un peu, on réalise que c’est l’interventionnisme étatique qui les a fait passer de très riche à « super riche ».

Beaucoup d’entre eux ont commencé à partir de rien. Quant à ceux qui ont eu la chance d’hériter d’une entreprise, la plupart ont continué à faire de bons investissements et à prendre des risques, de façon à amener l’entreprise à un niveau supérieur. Peu d’entre eux sont des rentiers de capital hérité.

Les quelques exemples ci-bas ne sont que la pointe de l’iceberg. Il y a bien d’autres milliardaires qui ont bénéficié de favoritisme étatique et ceux énumérés ci-bas en ont bénéficié de bien d’autres manières que celles que je décris dans ces quelques lignes. Je note que beaucoup de milliardaires ont bénéficié du système bancaire inflationniste (notamment Carl Icahn et ses leveraged buyouts) et que plusieurs ont bénéficié de la règlementation excessive de certaines industries, qui favorise les grandes entreprises bien établies au détriment des nouveaux entrants et des petits concurrents.

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Il y a une quantité incroyable d’articles de blogues ou même de médias « mainstream » qui affirment que les spéculateurs de Wall Street font montez les prix des denrées alimentaires, ce qui engendre des famines dans le monde. Est-ce vrai?

Dans l’un de ces articles alarmistes (celui-ci), on référait à une vidéo très intéressante à cet égard. Il s’agit d’une entrevue présentée par l’émission « Democracy Now » avec Frederick Kaufman, de Harper’s Magazine, auteur d’un article sur le sujet.

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« The Tragedy of the Euro », Philipp Bagus, Ludwig Von Mises Institute, 2010, 149 pages.

Disponible gratuitement en pdf.

 Bagus débute par exposer les circonstances dans lesquelles la Zone Euro a été créée. Il présente deux visions distinctes de l’Union Européenne : la vision libérale classique et la vision socialiste.

Le Traité de Rome de 1957 fut un pas important vers la vision libérale, établissant quatre libertés de base : liberté de circulation des biens, liberté d’offre de services, liberté de mouvements de capitaux et liberté de migration. Ce traité mettait en quelque sorte fin à l’ère de national-socialisme qui avait prévalu dans la première moitié du siècle, avec les conséquences dévastatrices qu’on lui connaît. La vision libérale de l’Europe n’implique aucunement la création d’un « super-État » pan-européen. Cette vision souhaite plutôt la saine concurrence entre différents systèmes politiques. Dans une telle Europe, le capital bouge des pays où les salaires sont élevés (les faisant ainsi diminuer) vers les pays où les salaires sont bas (les faisant augmenter). À l’inverse, les travailleurs migrent des pays où les salaires sont bas vers ceux où les salaires sont plus élevés. Ces migrations du capital et des travailleurs sont orientées des pays où les impôts sont plus élevés vers ceux où les impôts sont moindres, assurant une certaine discipline fiscale de la part des gouvernements. Les monnaies sont aussi en concurrence dans ce système libéral; les monnaies moins solides voyant leur pouvoir d’achat diminuer.

En revanche, la vision socialiste de l’Europe était, à une certaine époque, défendue par les Jacques Delors et François Mitterrand de ce monde. Ceux-ci voulaient voir une Europe protectionniste et interventionniste, gérée par un État central. Ils désiraient un État-providence européen assurant la redistribution de la richesse au sein de l’Union, la règlementation uniforme des pays membres et l’harmonisation de la législation dans toute l’Europe, incluant les niveaux de taxation. Plusieurs personnages ont véhiculé cette vision de l’Europe dans le passé, incluant Charlemagne, Napoléon, Staline et Hitler.

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On me pose souvent la question suivante: puisque l’inflation est causée par la création de monnaie, cela implique-t-il que le prix du pétrole n’est pas inflationniste?

Autrement dit, est-ce qu’une augmentation du prix du pétrole peut faire monter les prix à la consommation indépendemment de la création de monnaie?

Il est clair qu’une augmentation du prix du pétrole fait augmenter directement et/ou indirectement les coûts de production et de distribution de la plupart des biens et services que l’on consomme. Mais qu’est-ce qui influence le prix du pétrole? À cet égard, je vous recommande de lire mon dossier en quatre parties sur le pétrole. La réponse est évidemment l’offre et la demande.

L’offre est influencée (outre le prix) par la géopolitique (e.g. OPEC), la météo (e.g. ouragans), la technologie (e.g. forage horizontal multi-étapes), les découvertes de gisements, l’État (e.g. royautés), la règlementation (e.g. contraintes environnementales), le coût des ressources (e.g. main d’oeuvre, acier), etc.

La demande dépend (outre le prix) des habitudes de vie de la population, du niveau d’activité économique, de la technologie (e.g. efficacité énergétique des voitures), de la météo (e.g. les gens conduisent plus quand il fait beau), etc.

Et la monnaie dans tout cela?

Lorsque de la nouvelle monnaie est crée et injectée dans l’économie, celle-ci va tôt ou tard faire monter les prix. Parfois ce seront les prix des actifs (actions, immobilier, etc), parfois ce seront les prix des biens de consommation. Le pétrole entre dans les deux catégories: c’est à la fois un bien de consommation et un actif dans lequel on peut investir. Lorsque le prix du pétrole montait vers $147, certains fonds de couverture (dont Goldman Sachs) avaient loué des cargos pétroliers amarrés dans des ports et remplis de pétrole qu’ils avaient acheté (avec de la dette créée ex nihilo), attendant que le prix monte pour vendre à profit.

La demande de pétrole – et donc le prix- est donc fortement influencée par la quantité de monnaie en circulation. Qu’elle soit créée par la banque centrale ou les banques commerciales, la nouvelle monnaie se retrouve inévitablement dans le système bancaire sous forme de dette. Durant les années 1960s, la masse monétaire des États-Unis a augmenté de 44%. Dans les années 1970s, elle a augmenté de 78%! Quel bien se vendait comme des petits pains chauds dans ces années et qu’on finançait presque toujours par un emprunt? L’automobile! Ce n’est pas un hasard que cette période ait été suivie d’une forte augmentation de la demande de pétrole aux États-Unis, et par conséquent du prix. Même si le choc pétrolier de 1973 a plutôt été causé par l’offre, le prix du pétrole avait commencé à augmenter bien avant et la montée s’est poursuivie par la suite, en raison de l’augmentation fulgurante de la demande. 

Les données montrent que la relation existe. Le premier graphique ci-bas montre le taux de croissance annuel de la masse monétaire (M2) des États-Unis. On peut y constater trois régimes:

  1. La première période (keynesienne) a duré 17 ans, M2 a augmenté de +9.3% par année en moyenne et le prix du pétrole de +9.8% par an.
  2. La deuxième période (Volker) a duré 10 ans, M2 a augmenté de +3.6% par année en moyenne et le prix du pétrole de +0.6% par an.
  3. La troisième période (Greenspan) a duré 12 ans, M2 a augmenté de +6.5% par année en moyenne et le prix du pétrole de +12.3% par an. C’est d’ailleurs cette période de forte croissance de M2 qui a mené à la bulle immobilière que nous avons traversé.

De nos jours, la croissance de la demande de pétrole provient essentiellement des pays émergents (voir le second graphique ci-bas). Si on prend la Chine, le pays le plus important derrière cette croissance notamment grâce à son accès grandissant à l’automobile (et au crédit), on peut constater (voir troisième graphique ci-bas) que la croissance de sa masse monétaire est phénoménale: ce n’est certainement pas une coïncidence! Il n’est pas surprenant non plus que les pays où la croissance de la demande de pétrole est forte sont aussi ceux avec des taux d’inflation parmis les plus élevés, même si le prix payé à la pompe y est contrôlé par l’État (Vénézuela, Russie, Iran, Inde, etc). J’affirmerais même que la récente montée du pétrole de $40 à $80 est fortement reliée à l’augmentation de la masse monétaire Chinoise (et mondiale).

Conclusion:

Le schéma suivant illustre bien le processus par lequel le pétrole contribue à l’inflation. La création de monnaie permet l’endettement, ce qui génère de l’activité économique « artificielle ». Cette activité économique fait augmenter la demande de pétrole puisqu’il est lui-même un bien de consommation et parce qu’il est un intrant direct ou indirect dans à peu près tous les biens et services. Cela fait monter les prix en général, dont celui du pétrole, ce à quoi les spéculateurs contribuent, financés par de la dette abordable grâce à la création de monnaie. Résultat: de l’inflation!

Donc oui le pétrole est inflationniste, mais ce n’est pas indépendant de la croissance de la masse monétaire. On pourrait dire qu’étant donné sa position centrale dans la structure de consommation et de production des économies développées, le pétrole agit comme un convoyeur de la politique monétaire (et donc de la création de monnaie).

Notez que le prix du pétrole (qui frôle les $85 ces jours-ci) est présentement limité par deux éléments: 1) la capacité de production excédentaire de l’OPEP et 2) le niveau élevé des inventaires. Voir graphiques ci-dessous:

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Le document de 1,408 pages soumis au Sénat américain par le démocrate Chris Dodd comporte des failles très graves qui font en sorte d’augmenter le risque de crise financière (plutôt que de le réduire) et qui démontrent que les politiciens n’ont rien compris à la crise que nous venons de traverser.

La nouvelle réglementation propose la formation d’un “Financial Stability Oversight Council” dont la tâche consistera à identifier les institutions qui sont “too-big-to-fail” pour qu’elles soient sujettes à une règlementation plus sévère.

En désignant quelles banques qui sont jugées trop importantes pour ne pas êtres sauvées, cette mesure aura des effets non-désirables. Ces firmes jouiront d’une garantie implicite de l’État, ce qui leur permettra de prendre des risques démesurés. Elles se retrouveront en quelque sorte dans la même situation que Fannie May et Freddie Mac.

D’autre part, la loi permettra au gouvernement de saisir les actifs d’une banque qu’il juge en position financière précaire. Elle permettra à la FDIC d’avancer les fonds nécessaires à rembourser les créditeurs de l’institution en détresse; autrement dit on rendra permanent le mécanisme qui a permis de renflouer AIG pour qu’elle puisse rembourser $13 milliards à Goldman Sachs. Pour ce faire, la FDIC bénéficierait d’une ligne de crédit octroyée par le Trésor Américain, rien de moins!

La nouvelle réglementation prévoyait aussi la création d’un fonds de $50 milliards prélevé auprès des banques et visant à financer un éventuel sauvetage (plutôt que par les contribuables). Évidemment, les banques auraient repassé ces frais à leurs consommateurs sous forme de hausses de prix ou de nouveaux frais et comme ce sont des dépenses, elles auraient été déductibles d’impôts. Cette mesure étant trop stupide, elle sera apparemment retirée du projet de loi puisqu’elle aurait fortement encouragé la prise de risque.

Autre mesure stupide : en cas de crise de liquidité, le FDIC pourrait garantir les créances de toutes les banques (pas seulement celles qui sont en détresse). Ainsi, les banques ne craindront plus les crises de liquidité, ce qui leur permettra de prendre des risques encore plus démesurés.

Par ailleurs, la nouvelle loi obligerait tous les produits dérivés à être transigés sur des marchés publics; on bannirait ainsi les transactions « over-the-counter » qui permettent beaucoup de plus de flexibilité au niveau de la gestion des risques. C’est le genre d’arrangement que AIG avait avec Goldman Sachs. Si le gouvernement est défavorable aux dérivés OTC, il n’avait qu’à laisser AIG faire faillite. Ça aurait été suffisant pour convaincre les agents financiers d’être prudents avec ces produits. Au contraire, le gouvernement préfère l’approche liberticide « one-size-fits-all » et jette le bébé avec l’eau du bain. Ainsi, si un contrat n’est pas bien transigé sur les marchés publics, certaines entreprises seront incapables de couvrir leurs risques financiers.

Finalement, il est selon moi aberrant que cette réforme ne touche pas à Freddie Mac et Fannie Mae, qui ont pourtant été au cœur de la bulle immobilière et de la crise financière et qui ont nécessité $125 millards en fonds publics dans le cadre du bailout. En fait, tout ce qui a été fait à leur égard a été d’éliminer le plafond de bailout que ces institutions peuvent recevoir!

Conclusion :

Il est fort louable de vouloir éviter les bailouts dans le futur, mais il faut faire en sorte que la nouvelle réglementation n’ait pas d’effets non-anticipés qui aient comme impact d’augmenter le risque de crise financière.

Comme je l’ai démontré dans un billet récent, ceux qui accusent la dérèglementation du système bancaire pour la récente crise financière ont tout faux. Et si on étudie les circonstances qui ont mené à cette crise, il y a une chose évidente qu’on peut observer : les bailouts causent les crises financières.

Au cours des 25 dernières années, il y a eu – entre autres – le bailout de Continental Illinois, le Resolution Trust de la crise des S&L et le sauvetage de Long-Term Capital Management (LTCM). Ces interventions étatiques ont eu comme effet de créer un risque moral important sur les marchés financiers. Elles ont donné l’impression aux acteurs des marchés financiers que, quoi qu’il arrive, l’État et la Federal Reserve seront là pour sauver les banques. Le résultat inévitable de cela a été la prise de risques démesurés et l’utilisation excessive du levier financier.

Une véritable réforme du système financier ferait en sorte d’énoncer clairement que dorénavant, le gouvernement n’interviendrait plus pour sauver qui que ce soit avec l’argent des contribuables et rendrait les bailouts inconstitutionnels. Dans ces circonstances, les banques n’auraient pas le choix de réduire le niveau de risque qu’elles prennent, à défaut de faire fuir leurs investisseurs.

De plus, il faudrait réduire les pouvoirs de la Federal Reserve, de façon à lui empêcher d’exercer le fameux « Greenspan put »Lorsqu’on parle de « Greenspan put », cela signifie qu’en cas de débâcle boursière ou financière, les investisseurs s’attendent à ce que la banque centrale intervienne. À cet égard, on peut citer le crash de 1987, la première guerre du Golfe, la crise mexicaine, la crise asiatique, la crise de LTCM, le crash techno de 2001, les attaques du 11 septembre 2001 et la crise financière de 2007/2008.

Cette attente conditionne un comportement irresponsable de la part des banques et des autres acteurs des marchés financiers, qui savent qu’en cas de crise, ils seront sauvés et que la liquidité sera maintenue. Ce comportement irresponsable amplifie aussi les crises financières.

En terminant, ai-je besoin de vous spécifier que Fannie Mae (tout comme Freddie Mac) bénéficie de plusieurs privilèges de la part du gouvernement américain. Exemption de l’impôt, garantie implicite du gouvernement et passe-droits au niveau de la règlementation, entre autres. Pour préserver ces avantages, cette entreprise a dépensé $170 millions en lobbying entre 1998 et 2007 et $19.3 millions en contributions électorales entre 1990 et 2007. Les deux plus grosses contributions électorales de cette entreprises à la dernière élection ont été à Chris Dodd (en charge du Senate Banking Committee et qui a déclaré en juillet 2008 qu’il n’y avait aucun problème avec Freddie et Fannie), et à Barrack Obama en seconde place. Le sénateur Dodd est d’ailleurs celui qui a reçu la plus grande contribution de la part de Countrywide Financial, un leader dans le domaine des hypothèques sub-prime. D’autre part, l’assureur AIG, qui a bénéficié d’un important bailout, a été une source importante de dons pour la dernière campagne électorale, dont les principaux bénéficiaires ont été Barrack Obama et Chris Dodd. Pour plus de détails, voir ceci.

 

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Énormément de gens, incluant la chancellière d’Allemagne Angela Merkel et le président Français Nicholas Sarkozy, se soulèvent contre les credit-default swaps (CDSs) et proposent de limiter l’ampleur de ces titres.

Un CDS typique est relié à un titre de dette. L’acheteur du CDS cherche à se protéger contre un défaut de paiement sur cette dette. Ce dernier verse des primes au vendeur pour une période donnée. Si l’émetteur entre en défaut de paiement sur le titre de dette en question, le vendeur du CDS doit verser une somme à l’acheteur. Si rien ne se produit jusqu’à l’expiration du CDS, le vendeur ne paie rien et n’aura qu’encaissé les primes.

Vous comprendrez que plus l’émetteur est dans une situation précaire, plus le risque de défaut sera élevé et donc la valeur de cette assurance augmentera. C’est ce qui s’est produit avec la Grèce récemment (voir graphique). Ainsi, le prix des CDS est fréquemment utilisé par les investisseurs obligataires pour évaluer le risque de défaut d’un émetteur. Lorsque le risque de défaut augmente, le taux d’intérêt exigé est plus élevé. Cela peut accentuer les problèmes financiers de l’émetteur en réduisant son accès à du financement abordable. Ainsi, plusieurs observateurs accusent les CDSs d’avoir contribué à la crise financière et à la débâcle de la Grèce.

Lorsque vous détenez une obligation d’une corporation ou d’un pays, il peut faire beaucoup de sens de vouloir s’assurer contre un défaut de paiement. Cependant, ce qui semble surtout choquer les anti-CDSs sont ceux qui sont « naked », c’est-à-dire qui ne détiennent pas le titre de dette sous-jacent et qui ne font que spéculer sur le défaut de l’émetteur. Selon The Economist, il y aurait $9 milliards de CDSs sur les obligations grecques, alors que le pays a émis pour $400 milliards de dette en tout.

On indique généralement trois problèmes avec les naked-CDSs:

1) Lorsque l’émetteur éprouve des problèmes, la hausse du prix des CDS le signale au marché ce qui met l’émetteur dans une situation précaire. Ça a été le cas pour les banques américaines durant la crise financière et pour le Grèce il y a quelques semaines.

Je pense au contraire que les CDS agissent comme une source utile d’information. Il y a toujours deux parties dans un CDS, l’une pense qu’il y a un risque de défaut significatif alors que l’autre pense que ce risque est surévalué. Une hausse du prix du CDS indique qu’il y a davantage de gens qui pense que le risque est élevé. Les banques américaines détenaient des tas de titres « toxiques » durant la crise. La Grèce a généré un déficit budgétaire équivalent à 12.7% de son PIB en 2009. Il est légitime que les investisseurs obligataires exigent un taux d’intérêt plus élevé sur la dette de ces émetteurs étant donné leur situation financière médiocre. Les CDS ne sont que les messagers, pas la cause de ces problèmes. De toute façon, il n’est pas démontré que les CDS aient réellement un impact sur les taux obligataires de l’émetteur. Ils ont plutôt tendance à bouger ensemble simplement parce que les deux sont affectés par la situation financière de l’émetteur.

2) Lorsqu’un défaut survient, il peut arriver que le vendeur du CDS ne puisse pas verser la somme promise et qu’il devienne lui-même en faillite. Cela peut causer des problèmes « systémiques » sur les marchés financiers. C’est ce qui est arrivé avec AIG, qui a été sauvée par le gouvernement américain.

Dans le cas d’un CDS transigé sur un marché public, cela n’est pas un problème puisqu’une maison de compensation centrale s’occupe d’agir en tant que contrepartie. Les problèmes surviennent lorsqu’il s’agit de CDS gré-à-gré (over-the-counter ou OTC). Il incombe alors à l’acheteur de s’assurer que la contrepartie est solvable et au vendeur de s’assurer qu’il pourra verser les indemnités si une vague de défauts survient. Les actionnaires de ces entreprises sont responsables de ces pertes, si elles surviennent. La décision de sauver AIG était selon moi injustifiée. Nous avons appris par la suite que Goldman Sachs avait été un acheteur important de CDSs de AIG et que l’entreprise lui devait $13 milliards. Ça explique pourquoi Hank Paulson, un ancien de Goldman Sachs, a décidé de sauver AIG! Le problème n’est donc pas le CDS, mais plutôt l’intervention gouvernementale pour soutenir les banques.

3) Je laisse Yan Barcelo présenter le troisième problème dans ses mots éloquents:

« N’entrons pas dans le fin détail physiologique de ces créatures et contentons-nous de savoir qu’il s’agit d’un produit d’assurance tout à fait inouï : on peut acheter un CDS pour assurer un actif financier qu’on ne détient pas et qu’a n’a jamais détenu! C’est un peu comme si on détenait une assurance sur la vie d’un voisin. Un telle assurance est une invitation à l’assassinat! Et c’est à un tel jeu d’assassinat les banques se sont livrées avec les obligations de la Grèce pour en écraser la valeur. Elles ont acheté des CDS en masse auprès d’une foule d’acteurs financiers (fonds de pension, fonds mutuels, fonds de couverture, etc.) et, disposant de ceux-ci en poche, ont attaqué systématiquement les obligations du gouvernement grec, faisant ainsi augmenter la valeur de leur « assurance ». Évidemment, une foule de gens à Wall Street y gagnent… tandis que le gagne-petit en Grèce verra ses taxes et son coût de la vie augmenter. »

 Si les ‘banques de Wall-Street’ ont pu jouer ce jeu, c’est qu’elles croyaient que la situation financière grecque était pire que ce que les vendeurs de ces CDSs croyaient, et elles ont eu raison. Pour ‘assassiner’ la Grèce, elles ont dû vendre les obligations grecques. Si les problèmes financiers de la Grèce avaient été fictifs ou surévalués par les banques, celles-ci auraient perdu gros dans cette histoire (si la situation de la Grèce s’était améliorée), mais ce n’était pas le cas. Les banques ne sont pas responsables du déficit de 12.7% du PIB de la Grèce ni de la gestion des finances publiques de ce pays. Ainsi, les banques ont profité de la naïveté et de l’incompétence des investisseurs qui étaient de l’autre côté de la transaction, comme ceux qui gèrent notre chère Caisse de Dépôts… Dommage pour les cotisants à ces fonds de pension, qui sont forcés d’y déposer leurs avoirs.  

Finalement, notez qu’il y a d’excellentes raisons de détenir des naked-CDSs, autre que pour spéculer sur les malheurs d’un pays. Par exemple, si vous faîtes une grosse partie de votre chiffre d’affaires auprès du gouvernement grec et que vos comptes à recevoir s’accumulent, ça pourrait être prudent de détenir un CDS pour vous protéger d’un défaut de paiement.

Conclusion:

En somme, il est facile de comprendre pourquoi les politiciens s’opposent aux CDS. Les politiciens aiment dépenser, générer des déficits et s’endetter pour gagner des votes. Ils aimeraient bien pouvoir le faire impunément, à l’insu des marchés financiers, mais les CDSs sont là pour mettre à jour la situation financière précaires de ces pays dépensiers et contribuent à protéger les citoyens de ces pays contre leurs politiciens irresponsables. Les CDS améliorent la transparence des marchés financiers et permettent à toutes sortes d’investisseurs de se prémunir, sinon de profiter de la déterioration des finances d’un émetteur de dette. Cette détérioration n’est pas la faute des CDS contrairement à ce qu’on voudrait nous faire croire!

À cet égard, David Descôteaux publiait un excellent article sur les spéculateurs il y a quelques jours:

Une bombe de 2200 pages vient d’éclater aux États-Unis. Le lourd rapport d’enquête dévoile que Lehman Brothers, cette banque dont la faillite a précipité la débâcle boursière de l’automne 2008, avait trafiqué ses livres comptables plusieurs mois avant de s’effondrer.  (…) Mais des petits futés avaient compris l’arnaque. Ils ont vendu massivement leurs actions, exposant la situation précaire de la banque et provoquant sa faillite. Le rapport montre que ces spéculateurs – des investisseurs professionnels qui recherchent le profit à court terme – avaient vu juste. Sous les mensonges comptables, l’empereur était nu.

Mais dans leur tour d’ivoire, les milliers de bureaucrates et de «gendarmes» chargés de démasquer ce genre de fraude aux États-Unis (la Réserve fédérale, la Securities and Exchange Commission, les agences de crédit, etc.) n’ont rien vu. Comme dans le cas de Bernie Madoff, ils dormaient sur la switch. Et comme dans celui d’Enron en 2001 – ce courtier en électricité qui a déclaré faillite après avoir menti sur l’état de ses finances –, ils ont manqué le bateau. Dans ce dernier cas, ce fut encore une fois les spéculateurs qui sonnèrent l’alarme en faisant chuter le titre d’Enron. Les régulateurs, eux, ont allumé… six mois plus tard!

Pourtant, les politiciens et autres démagogues blâment toujours les spéculateurs quand ça va mal. Prenez la Grèce en ce moment. Les politiciens grecs, bon nombre d’entre eux des irresponsables qui ont endetté leur pays jusqu’au bord de la faillite, blâment aujourd’hui les spéculateurs pour leurs problèmes. Mais les spéculateurs ne provoquent pas les crises. Ils les exposent au grand jour. Et forcent les responsables à corriger leurs problèmes sans tarder. En faisant chuter une devise ou une action en bourse, ils préviennent les autres investisseurs – comme vous et moi – qu’il vaut mieux déguerpir. Que les choses sentent mauvais dans telle entreprise ou tel pays. Ce sont les entreprises comme Enron, Lehman Brothers et les gouvernements qui provoquent les crises. Les spéculateurs donnent seulement l’heure juste sur la situation d’une entreprise ou d’un pays. Comme le veut l’adage: si votre visage est laid, ne blâmez pas le miroir.

Bref, le spéculateur est le meilleur policier du marché.

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Dans un excellent article de Matt Taibbi paru dans Rolling-Stones (dont j’ai trouvé le lien sur le blogue des 7 du Québec), l’auteur relate de quelle façon Goldman Sachs (GS) a réussi à infiltrer le gouvernement et comment elle tire profit de ces positions.

http://www.rollingstone.com/politics/story/29127316/the_great_american_bubble_machine/1

Voici tout d’abord une liste d’anciens haut-placés de Goldman Sachs qui oeuvrent au sein du gouvernement et/ou d’agences de règlementation:

  • – Robert Rubin: ancien secrétaire du trésor de Clinton.
  • – Henry Paulson: ancien secrétaire du trésor de Bush.
  • – Joshua Bolten: ancien chief of staff de Bush.
  • – Mark Patterson: treasury chief of staff de Obama.
  • – Ed Liddy: celui que Paulson a mis en charge de AIG suite au bailout.
  • – Neel Kashkari: celui que Paulson a mis en charge du TARP.
  • – Gary Gensler: en charge de la Commodity Futures Trading Commission.
  • – Neil Levin: en charge du New York State Insurance Department.
  • – Stephen Friedman: ancien chairman de la NY Federal Reserve.
  • – William Dudley: chairman de la NY Federal Reserve.
  • – Mark Carney: chairman de la Banque du Canada.
  • – Robert Zoellick: chairman de la Banque Mondiale.
  • – John Thain: ancien PDG de Merrill-Lynch.
  • – Robert Steel: ancien PDG de Wachovia.

Et je suis sûr que la liste pourrait très bien s’allonger si on cherche davantage…

Comment GS a-t-elle usé de ces relations importantes? Voici la réponse (selon l’article de Taibbi dont plusieurs faits demeurent à vérifier):

1) Durant la bulle technologique, après avoir fait le premier appel public à l’épargne (PAPE) de Yahoo!, GS est devenu un leader dans ce domaine, multipliant les PAPEs d’entreprises fraîchement créées, sans profits, ni modèle d’affaire. Elle a utilisé plusieurs tactiques frauduleuses pour arriver à ses fins, notamment le « laddering » et le « spinning« , consistant à manipuler les marchés. Elle  a payé de faibles amendes à cet égard (grâce à ses contacts), mais a empochés d’immenses profits et payé d’immense bonus à ses dirigeants et employés.

2) GS a été une pionnière dans la titrisation de créances « sub-prime », vendant ces titres frauduleux à des fonds de pension, sachant très bien que les pertes seraient immenses. La preuve qu’elle n’y croyait pas? Elle a pris des positions gigantesques dans des credit-default-swaps (CDS), notamment auprès de AIG (i.e. elle a parié que les pertes sur ces prêts seraient élevées). C’est un cas typique d’asymétrie d’information: GS savait que les CDOs ne vaudraient rien, donc elle les vend à d’autres et achète des CDS pour faire le pari inverse! De la pure fraude de valeurs mobilières.

Comment AIG a-t-elle pu prendre ces immenses positions en passant sous le radar de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC)? Grâce à la collaboration de Robert Rubin et de son Commodity Futures Modernization Act et aussi grâce à Neil Levin, qui a fait en sorte que les CDS ne soient pas règlementés comme un produit d’assurance.

À noter que suite au bailout de AIG, Ed Liddy, nommé par Paulson pour prendre AIG en charge, a fait un chèque d’environ $13 milliard d’argent des contribuables à GS, pour rembourser les gains de GS sur les CDS que AIG lui devait. Il est donc faux de prétendre que GS n’a pas bénéficié du bailout parce qu’elle voulait à tout prix le rembourser. Le bailout a sauvé ses contreparties; et elle a voulu le rembourser pour pouvoir payer de généreux bonus à ses employés!

Ce paiement de AIG fait en sorte que les résultats du premier trimestre de 2009 de GS ont surpris à la hausse, stimulant le prix de l’action. GS en profite pour faire une émission d’actions à prix avantageux, et ce quelque temps avant l’annonce des fameux « stress-tests » qui allaient faire en sorte que plusieurs banques allaient avoir à émettre des actions toutes en même temps; comme si GS savait à l’avance ce qui allait arriver. Ensuite, les règles pour le remboursement du TARP ont été annoncées et requièrent que l’argent soit remboursé avec de la dette fraîchement émise d’au moins 5 ans, non-garantie par le FDIC, ce que GS avait fait une semaine auparavant! C’est ce qui s’appelle être ahead of the curve…

3) GS a grandement bénéficié de la hausse des prix des commodités en 2008, surtout du pétrole. Elle a pu en profiter largement parce qu’elle a obtenu une exemption du CFTC (où elle a un homme d’influence) lui permettant de prendre d’immenses positions sur les marchés à terme, ce qui n’était pas permis auparavant pour ne pas que les prix soient manipulés. GS avait d’ailleurs plusieurs investissements directs dans le pétrole, notamment des rafineries au Kansas.

4) L’auteur de l’article suggère que la prochaine source de profits de GS sera les crédits d’émission de carbone. Le site internet de l’entreprise corrobore d’ailleurs cette affirmation (voir image de la page principale de GS plus bas). L’entreprise a déjà mobilisé tous ces contacts gouvernementaux, dont le Président lui-même, de façon à créer une règlementation qui lui permettra de s’enrichir. Elle a d’ailleurs déjà positionné ses investissements à cet égard:

  • – Horizon Wind Energy ( énergie éolienne)
  • – Changing World Tech
  • – BP Solar (partenariat d’énergie solaire avec British Petroleum)
  • – Chicago Climate Exchange (bourse du carbone)
  • – Blue Source LLC
  • – Generation Investment Management (avec Al Gore)
  • – Green Growth Fund

Non seulement ces entreprises recevront de généreuses subventions avec de l’argent des contribuables, mais elles pourront en plus permettre à GS de s’enrichir au fur et à mesure que le prix des crédits de carbone vont augmenter. Et elle s’assurera que cela se produise en utilisant son immense pouvoir spéculatif et ses contacts au gouvernement.

Finalement, Goldman Sachs a fait $2 milliard de profit en 2008, mais n’a payé que $14 millions en impôts, grâce à ses filiales dans les paradis fiscaux. Le PDG a fait $42.9 millions et les employés ont fait $16 milliards en rémunération. Les employés et l’entreprise ont contribué $981,000 à la campagne de Obama et $4.5 millions au parti Démocrate.

Facile de faire de l’argent lorsqu’on sait à l’avance (ou décide à l’avance) de ce qui va arriver. L’intervention du gouvernement dans l’économie, influencée par les bonzes de GS, lui a permis tricher le capitalisme et de rediriger des milliards d’épargne des citoyens sous la forme de profits pour les actionnaires et de bonus pour les haut-placés de cette banque.

GS_climatechange

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