Quand j’étais enfant, mon repas préféré chez McDonald’s (et peut-être même d’entre tous) était les McCroquettes accompagnées d’une délicieuse sauce au miel. Je ne me doutais pas à l’époque que ce n’est que grâce à une innovation des marchés financiers que ce magnifique produit a pu être commercialisé.
Ray Dalio est le fondateur de Bridgewater Associates (voir ceci), le plus important « hedge fund » au monde. Au début des années 80s, la firme de consultation en gestion des risques de Dalio comptait McDonald’s parmi ses clients.
Le restaurateur désirait ajouter les croquettes de poulet à son menu, mais s’inquiétait d’une hausse potentielle des prix du poulet, ce qui aurait pu résulter en d’importantes pertes financières. Les producteurs de poulet quant à eux refusaient d’offrir à McDonald’s un contrat à prix fixe, craignant une hausse de leur structure de coûts.
Dalio est alors intervenu en expliquant au producteur qu’un poulet n’est en fait qu’un poussin combiné à du maïs et du soja pour le faire grossir. Ainsi, ce producteur n’avait qu’à se couvrir sur les marchés futurs de ces deux denrées pour sécuriser sa structure de coût, ce qui lui permettrait ensuite d’offir à McDonald’s un contrat d’approvisionnement à prix fixe. Dalio a donc synthétiquement recréé la structure de coût du producteur à l’aide de produits dérivés transigés sur les marchés financiers.
Comment fonctionnent les contrats à terme :
Un contrat à terme, souvent appelé future ou forward, est un contrat qui stipule que l’une des parties s’engage à acheter de l’autre un actif sous-jacent à un moment donné et à un prix donné. Par exemple, supposons que vous êtes un agriculteur et que vous planifiez vos finances pour votre production de l’été. Vous prévoyez produire 1,000 boisseaux de maïs durant l’été et le prix du boisseau est présentement de $345. Vous avez besoin de $325,000 en revenus pour couvrir vos coûts de production et vivre confortablement, mais comme le prix du maïs fluctue, vous craignez qu’il ne passe sous les $325 durant l’été.
Vous décidez donc de vendre 1,000 contrats à terme sur le maïs à $345 avec une maturité de 3 mois. Au cours de l’été, vous réalisez que votre crainte s’est matérialisée ; le prix du maïs a chuté si bien que vous vendez votre production à un prix moyen de $300 (pour un revenu de $300,000). Cependant, à la date du règlement des contrats à terme, l’acheteur du contrat vous paie la différence entre le prix du contrat ($345) et le prix actuel ($300), soit une somme de $45,000. Votre revenu net est donc de $345,000.
Cependant, supposons que le prix du maïs avait monté à $400, plutôt que de baisser. Vous auriez récolté $400,000 en revenus pour la vente de votre production, mais vous auriez dû payer à l’acheteur du contrat à terme la différence entre le prix actuel ($400) et le prix du contrat ($345), soit $55,000. Votre revenu net aurait donc été de $345,000.
Le contrat à terme vous permet donc d’éliminer l’incertitude quant au prix du maïs et vivre en paix, sachant à l’avance à quel sera votre revenu. Dans notre exemple, l’acheteur du contrat pourrait être un acheteur de maïs, tel un producteur de maïs soufflé. Il pourrait aussi s’agir d’un spéculateur qui croit que le prix du maïs va augmenter.
Les marchés des contrats à terme ont une influence sur les autres marchés puisqu’ils envoient un signal de prix basé sur les anticipations des participants à ces marchés. Ce signal peut ensuite être utilisé par les producteurs et consommateurs pour ajuster leurs décisions économiques. Par exemple, si le prix du contrat à terme sur le maïs se met à augmenter, cela signale que les participants à ce marché pensent que la production sera moindre que prévu et/ou que la demande sera plus forte que prévu. Les producteurs profiteront de ce signal pour augmenter leur production alors que les consommateurs rationneront leur consommation. Les contrats à terme ont donc aussi un effet stabilisateur sur les marchés.
Enfin, les McCroquettes!
Les McCroquettes apparurent au menu dès 1983 et ne l’ont jamais quitté, permettant à mes enfants de s’en régaler encore aujourd’hui. Ceci dit, les croquettes de poulet n’ont peut-être pas révolutionné le monde, mais les produits dériviés de type « futures » eux l’ont fait!
Alors que les socialistes s’évertuaient à critiquer les marchés pour leur « irrationnalité » et leur « volatilité excessive », risquant de laisser les producteurs régulièrement sur la paille, ils n’avaient pas envisagé (comme c’est si souvent le cas), que ce genre d’innovation puisse en venir à exister et régler bien des problèmes.
Grâce aux contrats futures, les agriculteurs et producteurs de denrées, ainsi que les entreprises manufacturières qui achètent leur production, peuvent se prémunir contre les fluctuations des prix sur les marchés. Ces instruments permettent donc d’obtenir une structure plus stable, tout en bénéficiant des mouvements de prix si cruciaux, qui envoient d’importants signaux aux consommateurs et aux producteurs de manière à éviter pénuries et surplus. Ces prix libres constituent l’élément clé du système de coordination économique le plus efficace qui soit: le marché.
Cette innovation explique d’ailleurs pourquoi le prix du pétrole est beaucoup moins volatile que le prix des oignons. Il existe des produits dérivés sur le pétrole permettant aux producteurs et aux acheteurs de se couvrir, ce qui lisse la trajectoire des prix, alors qu’il n’en a pas existé sur les oignons, de le prix varie fortement en fonction de la météo, de la qualité des récoles et des saisons.
Cette invention permet de réfuter près de la moitié des arguments socialistes des Karl Polanyi et Jacques Sapir de ce monde sans trop se fatiguer. Cette histoire démontre bien qu’au final, la finance a un impact positif sur nos vies. Bravo M. Dalio!
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En ce qui me concerne je préférait les McPizza :p (dommage que ça n’existe plus).
Sinon intéressant comme d’habitude, content de voir un tel regain d’activité 😉
@Bobjack : un article par semaine depuis septembre😉