“The Cult of the Presidency: America’s Dangerous Devotion to Executive Power” Gene Healy.
Partie 1 ici.
La guerre à volonté
La plupart des périodes d’expansion du pouvoir du POTUS sont survenues durant des guerres ou des crises graves. Dans ces conditions, le POTUS arrive plus facilement à convaincre la population et le Congrès qu’il doit avoir davantage de pouvoir. C’est aussi pour cela que les présidents modernes tendent à reformuler les problèmes socio-économiques en termes militaires: war on crime, war on drugs, war on poverty.
En fait, entre 1953 et 1988, la probabilité qu’un conflit soit initié par les États-Unis excède 60% durant les années où le président tente d’être réélu et que l’économie sous-performe. Le reste du temps la probabilité est de 30%.
On constate aussi que les historiens ont un biais favorable envers les présidents qui ont réussi à augmenter leurs pouvoirs, surtout ceux qui ont fait la guerre. Dans un sondage mené en 1996 auprès d’historiens sur la popularité des présidents passés, 5 des membres du top 10 ont été impliqués dans des guerres majeures (James Polk, Harry Truman, Woodrow Wilson, Franklin Roosevelt).
Parmis, les pires présidents selon les historiens sont ceux qui ont été au pouvoir durant une période de paix et prospérité, comme Hayes, Arthur, Harding et Coolidge.
Malgré une campagne électorale promettant de garder les États-Unis neutres, Woodrow Wilson a réussi à faire entrer le pays dans la Première Guerre Mondiale grâce au prétexte de l’attaque contre le Lusithania, un navire civile à bord duquel des armes avaient été chargées en direction de l’Angleterre et envoyé à travers le blocus Allemand.
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Plus de 33,000 soldats américains sont morts lors de la guerre de Corée, sans que cette intervention militaire n’ait été approuvée par le Congrès. Quant à la guerre du Vietnam, qui tua plus de 58,000 soldats américains et des millions de civils Vietnamiens, la résolution sur l’intervention dans le Golfe de Tonkin fut approuvée après moins de 9 heures de débats au Sénat, devant une chambre pleine qu’aux deux-tiers. La Chambre des Représentants ne mis que 40 minutes à approuver la mesure. En fait, cette approbation fut obtenue grâce à un mensonge de LBJ à l’égard d’une attaque non-provoquée contre l’USS Maddox dans le Golfe de Tonkin.
Le progessiste LBJ ne s’est pas arrêté là. Il a orchestré un coup au Brésil, envoyé 20,000 soldats intervenir en République Dominicaine, renversé un président démocratiquement élu en Grèce et soutenu le coup de Suharto en Indonésie qui résultera en un meutre de masse ayant fait des centaines de milliers de morts.
Dans le cas de Nixon, ses bombardements secrets aux Cambodge, l’Opération Menu, tuèrent de nombreux civils, violèrent la neutralité de ce pays dans le contexte de la Guerre du Vietnam, favorisèrent l’émergence du terrible régime des Khmers Rouges et se firent sans que le Congrès ne soit même mis au courant. Il déclara lors d’une fameuse entrevue que “si le président le fait, c’est que ce n’est pas illégal”!
Les War Power Resolutions furent adoptées en 1973, malgré le veto de Nixon. Elles stipulaient que si le président déployait l’armée, il devait la retirer après 60 jours à défaut d’obtenir l’approbation du Congrès. Mais le problème est que le président contrôle le moment où le décompte commence, ce qui a rendu cette limite de temps inutile.
Carter et, par la suite, Reagan, ont financé les Talibans en Afghanistan dans leur lutte contre le régime pro-URSS de ce pays. Ces Talibans extrémistes vont tuer tous les modérés et prendre le contrôle du pays, pour ensuite se retourner contre les États-Unis.
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En 1983, Reagan a déployé 2,000 soldats pour renverser le régime politique du Liban. Il finança illégalement les cruels Contras au Nicaragua grâce à des ventes d’armes illégales à l’Iran. Lors de la guerre Irak-Iran, il apporta son soutient à Saddam Hussein.
En 1989, c’est Bush père qui renversa le gouvernement Noriega au Panama sans autorisation du Congrès. Puis, il orchestra la defense du Koweit contre l’Iraq. Certes, il obtint de justesse l’approbation du Congrès, mais grace a des mensonges sur l’accès à des armes nucleaires de Saddam Hussein et le faux témoignage d’une membre de la famille royale koweitienne s’étant fait passer pour une citoyenne ayant été témoin des atrocités commises par l’armée iraquienne dans un hôpital du Koweit (ici). Il lança l’attaque à partir de l’Arabie Saoudite, après avoir fait croire au roi que Saddam voulait aussi l’envahir en lui montrant de fausses photos satellites montrant des camps militaires iraquiens près de sa frontiere. Suite à cette guerre, le taux d’approbation de Bush grimpa a 91%.

« They took the babies out of the incubators, took the incubators and left the children to die on the cold floor. [crying] It was horrifying. » (Nayirah al-Ṣabaḥ, témoignage devant le Congrès)
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Les crises économiques et les catastrophes naturelles
En plus des guerres, ces deux plaies ont fourni aux présidents des justifications à l’augmentation de leur pouvoir.
Parfois, on a l’impression que les gens imaginent que le président est assis dans le cockpit de l’économie nationale, actionnant le manche et pressant les boutons qui permettront d’atteindre le plein emploi et la croissance potentielle du PIB. Pourtant, comme je l’expliquais dans un article antérieur, le POTUS a bien peu d’impact sur l’économie.
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Le National Industrial Recovery Act (NIRA) imposé par FDR durant la Grande Depression a octroyé au président de tout nouveaux pouvoirs, lui permettant de contrôler l’économie à sa guise en fixant les prix et les salaires. C’est ce programme qui a fait Benito Mussolini s’exclamer “Ecco un ditatore!”.
En mai 1964, le président Johnson énonça son discours intitulé Great Society, au cours duquel il affirmait que le gouvernement avait le pouvoir de régler tous les problèmes sociaux et de modeler la civilization que tous désirent. Encore une fois, ce n’est pas le rôle du président de faire cela.
Tout comme Donald Trump en 2016, John Kerry a fait campagne en 2004 promettant de ramener des emplois manufacturiers aux États-Unis, allant même jusqu’à surnommer son autobus de campagne le “Job First Express”. Mais la réalité est que le POTUS n’a pas le pouvoir ni le devoir de créer des emplois, manufacturiers ou non. La relance de l’économie ne fait pas partie de son mandat non plus.
En 2008, Bush a decidé de prêter $17.4 milliards aux trois grands fabriquants automobiles américains alors en difficultés financières majeures même si le Congrès a rejeté cette mesure. Le Congrès a exprimé son refus que l’argent des contribuables aide des entreprises privées, mais Bush a plutôt interprété ce refus comme une indication que le Congrès ne voulait pas agir comme un “partenaire” dans cette affaire et mettait la tâche sur les épaules de la Maison Blanche! Pourtant, le TARP ne permettait pas d’acheter des actions de societés privées, il ne permettait que d’acheter des titres de dette adossés a des créances hypothécaires. Mais Bush a pu contourner la situation et faire ce qu’il souhaitait.
L’autre élément utilisé par les présidents pour augmenter leur pouvoir est l’aide pour les catastrophes naturelles. La loi de 1950 a octroyé ce pouvoir au président, et il fut augmenté par le Stafford Act de 1988.
L’expert en politique Andrew Reeves a calculé qu’entre 1981 et 2004, les états où la lutte électorale est plus chaude reçoivent plus de 60% plus de déclaration de catastrophe naturelle que les autres.
Non seulement les président ont utilisé les catastrophes naturelles pour obtenir plus de pouvoirs, comme par exemple la capacité de déployer l’armée en sol américain et de s’approprier des fonds d’urgence sans vote au Congrès, mais ils utilisent aussi ces catastrophes comme outil pour mousser leur popularité.
Le Congrès délègue
Le Congrès délègue de plus en plus de pouvoir exécutif au POTUS de manière à récolter les bienfaits politiques des initiatives sans souffrir des contrecoups négatifs de la règlementation qui découle de ces mesures. D’ailleurs, beaucoup de projets de loi importants sont approuvés par le Congrès sans que les représentants n’aient eu la chance de les lire!
L’article 1 – section 1 de la constitution stipule que tous les pouvoirs législatifs appartiennent au Congrès. Mais au 20e siècle, le Congrès a de plus en plus délégué de ce pouvoir au président, en se contentant d’émettre des directives vagues, laissant au président et son administration le soin de déterminer les règles précises permettant d’accomplir son interprétation des directives du Congrès (la loi Dodd-Frank est un bon exemple).
Selon la constituion, le président n’est pas censé intervenir dans le processus législatif, mais cela est devenu une prérogative au 20e siècle. À sa première année au bureau oval, Eisenhower a refusé de soumettre un programme législatif au Congrès et fut blâmé pour cela. Il en a tiré une leçon et l’année suivante il créa le White House Office of Legislative Affairs, une administration qui s’assure de faire avancer les projets législatifs du président au Congrès.
Parfois, c’est le Congrès qui donne au président des pouvoirs dont il ne veut pas. En 1950, la président Truman a appliqué son veto contre une loi permettant au président d’incarcérer quiconque est soupçonné d’actes d’espionnage ou de sabotage (McCarran Internal Security Act). Malgré cela, le Congrès a renversé le veto présidentiel et la loi fut adoptée!
La suite la semaine prochaine…
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