Comme vous l’avez sûrement lu, la Californie est pratiquement en faillite depuis environ un an. Quelle est la force politique dominante et le lobby le plus influent en Californie? Les syndicats de la fonction publique!
Il y a tout d’abord les enseignants (California Teachers Association ou CTA). En 1988, ce groupe a réussi à faire passer la Proposition 98, requérant que 40% du budget de l’État soit alloué à l’éducation locale. Pour ce faire, ils ont financé une immense campagne publicitaire. Cette victoire a permis d’augmenter le budget de l’éducation de $450 millions par année, somme qui a été refilée en augmentations de salaires. Pas surprenant que les enseignants Californien soient devenus les mieux payés au pays.
En 1996, le gouvernement bénéficiait d’un surplus fiscal en raison du boum économique. La CTA a dépensé $1 million dans une campagne publicitaire faisant la promotion de classes plus petites. Ces pubs ont mis de la pression sur les politiciens qui devaient agir pour rassurer l’opinion publique. Le gouverneur Pete Wilson a alors alloué $750 millions annuellement pour réduire la taille des classes. Beaucoup d’enseignants ont alors dû être embauché pour combler les nouveaux postes, créant presque une pénurie, ce qui a permis à la CTA d’augmenter son membership et aux enseignants de négocier des augmentations salariales. La performance des étudiants ne s’est cependant pas améliorée.
Deux ans plus tard, le gouverneur Wilson a voulu réduire encore plus la taille des classes, à conditions que le système scolaire adopte un mécanisme de suivi de la performance. La CTA a dépensé $6 millions pour faire tomber cette initiative.
La CTA s’implique souvent dans des causes politique qui n’ont rien à voir avec son mandat de négocier les conventions collectives de ses membres. Par exemple, en 1994, la CTA s’est opposé à un projet de loi visant à reconnaître les mariages gais ayant été célébrés dans un autre état.
La CTA installe son pouvoir à l’aide des élections scolaires, auxquelles les taux de participation sont très faibles. Les conseils d’administration des commissions scolaires se retrouvent donc dominés par les candidats supportés par la CTA, ce qui lui permet d’obtenir des privilèges plus facilement (puisque c’est le conseil qui approuve les augmentations salariales).
Le deuxième groupe syndical important est celui qui représente les travailleurs de la sécurité publique (policiers, gardiens de prison, pompiers, etc), notamment la Correctional Peace Officers Association (CCPOA).
En 1998, quand Gray Davis s’est porté candidat au titre de gouverneur, la CCPOA lui a fourni son support monétaire ($2.5 millions au total). Au cours des 5 années suivantes, le salaire moyen des membres de la CCPOA a augmenté de 34%.
Les syndicats de la sécurité publique ont beaucoup de pouvoir politique parce que les politiciens savent que les gens veulent se sentir en sécurité. L’appui des policiers est presque une nécessité pour gagner une élection. Bien au courant de ce fait, la California Organization of Police and Sheriffs (COPS) publie un « guide de l’électeur » dans lequel elle recommande les candidats pour lesquels elle croit que les gens devraient voter. Pour y figurer, les candidats doivent payer la COPS, qui amasse une dizaine de millions de dollars à chaque publication.
Les employés de la sécurité publique prennent généralement leur retraite à 50 ans avec une pension équivalant à environ 90% de leur salaire final. Les gardiens de prison de la Californie sont les mieux payés de tout le pays (les dépenses en services correctionnels représentent 11% du budget du gouvernement).
Le troisième gros syndicat de Californie est présent partout au pays, la SEIU. Le chef de cette centrale a rencontré la président Obama au moins 22 fois à la Maison Blanche au cours des premiers 6 mois de sa présidence. Cette centrale syndicale représente surtout les travailleurs de la santé.
La branche Californienne de la SEIU a dépensé $20 million en 2005 pour bloquer une série d’initiatives visant à limiter la croissance des dépenses de l’État. Ils ont aussi dépensé des millions pour faire instaurer des augmentations d’impôts (et on réussi en 2004).
En 2003, le syndicat a poussé le CalPERS (le fonds de pension des fonctionnaires Californiens) à arrêter d’investir dans des entreprises qui agissent comme sous-traitants pour le gouvernement à meilleur coût. Le conseil d’administration de CalPERS est d’ailleurs entièrement contrôlé par les syndicats de la fonction publique.
En 1998, lors des élections, le candidat Gray Davis a reçu $600,000 en contributions électorales de la SEIU. En 1999, ce gouverneur a adopté une loi augmentant les prestations de pension des fonctionnaires et permettant aux employés de la sécurité publique de prendre leur retraite à 50 ans avec 90% de leur salaire. Le fonds CalPERS a déclaré qu’il pourrait se permettre ces dépenses additionnelles en utilisant son surplus et en augmentant la portion d’actions dans son portefeuille pour obtenir de meilleurs rendements. Qu’est-il arrivé après l’éclatement de la bulle de 2000? Le gouvernement a dû renflouer CalPERS avec l’argent des contribuables.
En 2002, après sa réélection, le gouverneur Davis a annoncé que l’État faisait face à un immense déficit budgétaire. La population a alors voulu destituer Davis, mais la SEIU a dépensé $2 millions pour le supporter, sans succès.
Ce fut alors l’entrée en scène du gouverneur Schwarzenegger, qui a vite réalisé à quel point le gouvernement Californien est paralysé par les syndicats. En 2005, il a tenté une série d’initiatives visant à réduire le pouvoir politique des syndicats (les empêchant notamment d’utiliser les cotisations syndicales pour contribuer aux caisses électorales) et ralentir la croissance des dépenses de l’État. La CTA a dépensé $57 million pour défaire ces initiatives (notamment en hypothéquant son siège social).
Conclusion :
Suite au boum immobilier des années 2000s, les revenus de l’État ont augmenté considérablement. Cependant, cet argent a été vite dépensé car en 4 ans, les dépenses de l’État ont augmenté de +32% ou $34 milliards. Le crash immobilier de 2007 a amené un dur retour à la réalité, mettant l’État en faillite. Dès la mi-2009, le déficit atteignait $21 milliards et le gouvernement n’avait plus assez de liquidité pour payer ses factures.
Le problème en Californie n’est pas nécessairement le nombre de fonctionnaires, mais plutôt la générosité de leurs salaires et avantages sociaux, qui dépassent l’entendement. Le gouvernement fait ce qu’il peut pour se sortir du trou et réduire les dépenses, mais est complètement paralysé par les syndicats, car les salaires des fonctionnaires représentent la part du lion des dépenses de l’État.
Ce problème n’est pas unique à la Californie, plusieurs autres états sont aux prises avec d’immenses déficits. Récemment, nous avons aussi assisté à la débâcle de la Grèce, dont la situation est fort similaire.
Maintenant, si vous croyez qu’au Québec et au Canada, nous sommes plus responsables et éviteront une telle crise, lisez ces quelques nouvelles triées sur le volet en provenance du site Antagoniste.net :
http://www.antagoniste.net/2010/04/29/lattrition/
http://www.antagoniste.net/2010/01/27/a-nos-frais/
http://www.antagoniste.net/2010/01/07/le-malheur-des-uns-et-le-bonheurs-des-autres/
Donc… conclusion?
Le Québec vivra une situation similaire à celle de la Grèce? Il y a assez de professeurs dans les classes? Pas trop d’élèves? Les syndicats sont en vérité ceux qui détiennent le pouvoir?
En passant, une statistique de Gagnon est (encore) fausse car il calcule l’ensemble des travailleurs sur le « payroll » de l’État. S’il veut s’en prendre aux fonctionnaires, il doit utiliser ces chiffres (tels que publiés sur le blogue du QL):
« Pour l’exercice financier 2007-2008, la taille de la fonction publique québécoise était de 85 614 employés dont 66 598 à temps complet. Entre l’année fiscale 2003-2004 et 2007-2008, le nombre de fonctionnaires québécois travaillant à temps complet est passé de 70 742 à 66 598. Il y a donc eu une réduction d’environ 5.5% des employés à temps complet. »
Réduire la fonction publique de 11%, la ramenerait donc à environ 59,200 travailleurs. Plus de 7,300 employés seraient touchés.
Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi un type comme toi semble d’accord avec l’approche d’un David Gagnon… Il me semble que tu as beaucoup plus de rigueur que lui… Non?
@Lutopium
« Donc… conclusion? Le Québec vivra une situation similaire à celle de la Grèce? »
En Californie (tout comme en Grèce) les syndicats de la fonction publique ont trop de pouvoir et ils ont grandement contribué à amener l’État au bord du gouffre financier. Les syndicats devraient s’en tenir à négocier les conventions collectives, et non à faire du political medling.
Mon opinion est que le Québec devrait prendre bonne note des problèmes Californiens car ici aussi la fonction publique est gras dur.
« Je n’arrive toujours pas à comprendre pourquoi un type comme toi semble d’accord avec l’approche d’un David Gagnon… »
Avec lui, il faut en prendre et en laisser (je l’ai souvent critiqué sur son blogue relativement à des billets que je trouvaient mal ficelés et dont l’interprétation était erronée) et je suis d’accord avec toi que la nuance (temps partiel/complet) doit être prise en compte. Néanmoins, les chiffres qu’il fournit sont souvent très intéressants.
En passant, va voir son billet d’aujourd’hui sur l’éducation; c’est très intéressant.
Aller sur le blogue de Gagnon? Non merci. Je ne porte plus attention à ceux qui insultent tous ceux qui ne pensent pas comme eux et qui font un usage abusif de syllogismes et de propos d.émagogues pour diffuser des imprécisions, des sous-entendus et des faussetés. Comme ce commentaire que j’ai lu aujourd’hui sur le blogue les Analystes:
« Votre description de la paranoïa nationaliste n’est pas sans rappeler l’Allemagne des années 30 où les nazis utilisaient le même genre de rhéthorique. Je me joins à vous pour dire que le nationalisme est effectivement une idéologie collectiviste beaucoup plus près du socialisme que de n’importe quelle idéologie de droite… »
Et le type se permet par la suite de citer Adolf Hitler complètement hors-contexte. C’est vraiment malhonnête et ces gens-là ne méritent pas qu’on leur réponde ou qu’on visite leurs blogues.
Salut!
L’opinion que vous citez rejoins ce qu’Hayek expose dans son livre « The Road To Serfdom ». En fait Hayek est plus direct et dit que le nationalisme, comme dans « national socialism », est un système collectiviste contrairement à ce que la majorité des penseurs de son époque affirmaient. Beaucoup prétendaient que c’était l’aboutissement du capitalisme. Il démontre également que les systèmes socialistes mènent vers le totalitarisme, comme le communisme, fascisme et nazisme mais le chemin n’est pas irréversible.
Donc en quoi est-ce que le commentaire est démogagique et où sont les syllogismes, sous-entendus et faussetés?
@Sylvain,
Ça ne me surprend pas que Hayek soit derrière cette citation…
Le commentaire est démagogique car il utilise un fait historique hors contexte afin de disqualifier les politiques « de gauche ».
Syllogisme:
Le parti nazi est le parti national-socialiste
La social-démocratie s’apparente au socialisme
Donc, derrière la social-démocratie se cache le nazisme.
À soir, on fait peur au monde…
@Lutopium
Pour moi Hitler était centriste (autant gauchiste que droitiste).
Son système économique était proche du collectivisme (gauche), mais comportais aussi un fort volet corporatiste (droite).
Une chose est sûre, le rôle de l’État y était maximal (totalitaire).
Voir cette image:
https://minarchiste.files.wordpress.com/2010/01/nolanchart11.jpg?w=500&h=429